Dans un monde aux ressources limitées, où les prix des ressources ont augmenté de 150% pendant la dernière décennie1, et avec des taux de recyclage qui ne dépassent pas les 40% en Europe2 (alors que notre modèle économique actuel conduit à en gaspiller plus de 60%), il est insensé que l’Union européenne et la Belgique n’aient pas une politique ambitieuse de réduction des prélèvements de ressources. Nos économies développées dépendent fortement d’un apport continu d’énergie et de matières à bas prix. Cette réalité physique est mésestimée par les économistes classiques. Les coûts de l’énergie et des matières ont augmenté plus vite ces dernières années que les coûts du travail. Par ailleurs, les secteurs de l’énergie et des matières sont cruciaux pour la transition de l’économie. Ils représentent une part importante des économies développées dont tous les secteurs dépendent d’une manière ou d’une autre. Les externalités environnementales de ces secteurs sont massives et une action spécifique à leur profit peut générer rapidement de nombreuses améliorations environnementales et économiques.

Constats et enjeux

Face à ces constats, l’objectif majeur de l’économie circulaire est d’optimiser les flux d’énergie et de matières pour utiliser efficacement le minimum de ressources et réduire la production de déchets, tout en relocalisant une partie de l’économie. L’économie circulaire est un concept englobant qui vise (1) la réduction de déchets en amont par l’éco-conception des produits, (2) l’échange de ressources secondaires entre entreprises (l’écologie industrielle), (3) le remplacement de la vente de produits par la vente de services ou la location (économie de fonctionnalité – voir infra), peu génératrices de déchets, (4) le réemploi, (5) la réparation, (6) la réutilisation et enfin (7) le recyclage. Elle bouscule ainsi les conceptions économiques classiques : remplacer la concurrence par la collaboration entre les entreprises et s’inspirer du vivant pour trouver de nouveaux processus de production moins énergivores.

Dans le Manifeste politique d’Ecolo – Une économie circulaire – Une réindustrialisation verte doit transformer les modes de production et de consommation de manière systémique, depuis leurs infrastructures les plus vastes jusqu’à leurs détails les plus menus. L’économie circulaire doit permettre que les déchets soient considères comme une nouvelle ressource de la production industrielle.

graphePMB.jpg

Une fois encore, si pareille approche engendre d’indéniables gains économiques et environnementaux à court terme, ses conséquences sont aussi mesurables sur la durée, et notamment au niveau de la résilience de nos systèmes économiques. Un des effets les plus frappants de la mondialisation est de désarticuler, pour ne pas dire détruire, le tissu économique, et de rendre chaque entreprise plus dépendante des caprices et de la volatilité des marchés internationaux que de son environnement local.

Miser sur l’écologie – ou la symbiose – industrielle signifie donc aussi, à long terme, tisser à nouveau ce qui a été détruit au cours des dernières décennies pour rendre nos PME moins dépendantes des marchés internationaux, et donc moins vulnérables face à des retournements de conjoncture sur lesquels elles n’ont aucune prise. C’est aussi leur faire nouer des relations de partenariat et de coopération avec leurs voisins, et non des liens de soumission aux irrationnelles fantaisies des marchés internationaux. La lutte contre l’hégémonie des marchés ne se gagnera pas uniquement sur le plan politique – où elle doit par ailleurs évidemment être menée – mais également du point de vue de la structuration de notre paysage industriel.

Pistes concrètes

Un travail pilote a été mené en matière d’écozoning par la Wallonie et par la région bruxelloise au cours de la législature qui s’achève. Il s’agit désormais de passer du projet pilote à la généralisation et d’étendre progressivement ces succès locaux à l’ensemble des entreprises et des zonings existants et futurs.

Pour Ecolo, adopter la voie de l’écologie industrielle implique de:

Proposer dès lors que les gouvernements fédéral et régionaux poursuivent une stratégie de soutien à l’économie circulaire, sur base des expériences réalisées et en adaptant certaines législations existantes (éco-conception, réutilisation des déchets, etc.) et que les gouvernements accompagnent les entreprises et les territoires dans une démarche qui vise une économie zéro déchet. Les « déchets » ou, de manière plus appropriée les « co-produits » des activités des uns peuvent devenir des matières premières dans les processus de production des autres ;

Proposer que les gouvernements favorisent l’essor de l’économie circulaire, notamment en s’appuyant sur la méthode des Alliances Emploi-Environnement en s’assurant de la conscientisation, du soutien et des engagements des partenaires des secteurs publics, privés et non-marchand envers ces pratiques à plus-value sociale et environnementale. Il faut, par ailleurs, renforcer les relations inter-entreprises, notamment afin de contribuer à la confiance entre les entreprises partenaires. Les parcs d’activité économique (un peu plus de 200 en Wallonie) sont les entités les plus appropriées pour démarrer ou approfondir cette dynamique d’écologie industrielle ;

Mettre en place un pool d’experts en écologie industrielle soit mis en place au niveau régional afin d’accompagner les entreprises en fonction de leur choix de transition ;
Et, sur le plan fiscal, encourager les entreprises qui investissent dans l’économie circulaire. On peut imaginer que, sur la base d’une analyse du cycle de vie des ressources naturelles utilisées dans leurs activités, elles seraient exonérées en totalité ou en partie des redevances ou des taxes environnementales

Concrétiser, au niveau européen, l’engagement pris par l’UE de réduire l’utilisation des ressources d’ici 2050.

Les principaux freins

L’un des principaux freins aux projets de type “éco-zoning” est la mentalité des entrepreneurs et notamment la culture de la concurrence. La création d’un réseau d’acteurs et la mise en œuvre d’une approche incrémentale sont ainsi capitales pour construire un climat de confiance nécessaire à toute collaboration utile et efficace. La première étape de mise en œuvre des principes d’écologie industrielle porte généralement sur les aspects de sécurité (vols dans les entreprises) ou de gestion des espaces verts ; il s’agit là de synergies de mutualisation. Une fois ce climat de confiance instauré, il devient alors possible d’envisager d’autres actions plus risquées du type synergies de substitution.

Par ailleurs, concernant le domaine d’application de l’écologie industrielle, la transformation des ZAE existantes constitue un frein important, par rapport à la conception de nouveaux projets où la prise en compte de la complémentarité des entreprises peut être pensée en aval. Dans ce cadre, la présence de deux-trois entreprises “locomotives” est primordiale, sous peine de voir la démarche s’essouffler (par exemple avec l’épuisement des subsides)

Share This