1. Avant-propos
Emplois verts, formations vertes, alliances emploi-environnement, … sont des concepts évoqués très régulièrement lors de cette législature marquée par la présence des écologistes dans les exécutifs bruxellois et wallon. Utilisés lors des contacts avec les secteurs professionnels pour analyser de possibles gisements d’emploi, présents dans tous les débats sur les affectations budgétaires du plan Marshall 2.vert, évoqués dans les concertations inter-cabinets, leur signification n’a guère fait l’objet d’échanges conceptuels ni de débat préalable à leur utilisation.
Dans la réalité des décisions à prendre, le pragmatisme et l’urgence ont conduit les acteurs à ne pas s’interroger sur le sens commun à donner aux concepts et aux finalités du développement durable. C’est un combat que les écologistes doivent mener à nouveau pour éviter que le développement durable ne soit qu’un concept électoraliste que chaque parti veut s’approprier.
C’est le simple enjeu de la présente note, présentée comme « une pièce à casser ». Toutes les contributions complémentaires sont les bienvenues.
2. Quelques définitions de base
On trouvera ci-dessous un tableau qui vise à décrire et situer quelques concepts-clés et à les replacer dans un contexte de développement durable. Dans la première colonne, on trouve la définition générale, applicable à tous les secteurs professionnels, et dans la deuxième, on pourra lire la déclinaison particulière pour le domaine vert.
Concept |
Définition générale | Application au domaine vert |
Filières | Ensemble d’activités productives (biens et services) d’un même secteur économique | Ensemble d’activités productives contribuant à un modèle de développement répondant aux défis énergétiques et environnementaux. |
Emploi | Contrat passé entre deux parties (employeur et employé) pour la réalisation d’un travail contre rémunération | Tout emploi qui contribue à la réduction d’impacts environnementaux, à l’efficacité énergétique et qui s’exerce dans des conditions de travail décentes (cf. déf. OIT). Exemple : les travailleurs de l’industrie automobile assemblant des voitures dites « vertes » occupent des emplois moins verts que ceux qui construisent des bus ou des vélos. |
Métier | Somme d’activités dans lesquelles des compétences spécifiques sont mobilisées | Métier mobilisant de nouvelles compétences liées à des activités visant à réduire les impacts environnementaux et à l’efficacité énergétique ou métier plus ancien mais s’exerçant dans un nouveau contexte (ex. : chauffeur de bus électrique) ou avec de nouvelles compétences (ex : électricien qui maîtrise l’étanchéité à l’air). |
Compétence | Combinaison de connaissances, savoir-faire, expérience et comportements s’exerçant dans un contexte précis. Elle se valide en situation professionnelle. | Ensemble de ressources nouvelles mobilisées dans des situations professionnelles anciennes (ex. : chauffeur de bus diesel qui maîtrise l’éco-conduite) ou nouvelles (ex. : utiliser un générateur à combustion dans le bâtiment) et liées au DD |
Savoir- faire comporte-mental | Il constitue une dimension importante de la compétence. Il rassemble les comportements appris ou innés à la disposition de l’individu. On y distinguera particulièrement : les modes d’adaptation relationnelle et organisationnelle, les motivations qui font agir et qui déterminent un ensemble de valeurs. | Ensemble de capacités utiles acquises par une éducation au développement durable pour se comporter dans un contexte professionnel particulier en vue de réduire les impacts environnementaux et augmenter à l’efficacité énergétique: comprendre les enjeux, savoir coopérer, auto-contrôle, autonomie, précision du geste. |
Formation professionnelle | La formation professionnelle est le processus d’apprentissage qui permet à un individu d’acquérir le savoir et les savoir-faire (habiletés et compétences) nécessaires à l’exercice d’un métier ou d’une activité professionnelle. | Formation destinée à faire acquérir des compétences nouvelles (savoir-faire, connaissances et comportements) visant à diminuer les impacts environnementaux et augmenter à l’efficacité énergétique dans l’exercice d’un métier. |
3. Généralités
Les métiers spécifiques, dits « verts » : ils ne devraient donc correspondre qu’à une partie relativement faible d’emplois liés à la croissance verte. Par contre, les métiers mobilisant des compétences additionnelles, liées à des activités visant à réduire les impacts environnementaux et les métiers plus anciens s’exerçant dans un nouveau contexte vont se développer considérablement. La formation continuée et l’adaptation des programmes de formation initiale sont des enjeux de court terme.
Les métiers de l’environnement : Si tous les métiers ne seront pas catalogués « verts » mais que, par ailleurs, tous les métiers devraient contribuer, à moyen terme, à la réduction des impacts énergétiques, certains métiers se développent (déjà) en lien direct avec la protection de l’environnement. On précisera qu’à ce stade, le traitement des déchets et la qualité de l’eau représentent ¾ des métiers consacrés à l’environnement.
Parmi les métiers classiques de l’environnement, on peut distinguer 4 domaines principaux :
- Protection et gestion de la nature (par ex : technicien en environnement, paysagiste…)
- Prévention et traitement des pollutions (par ex : analyste de l’air, technicien de traitement des déchets…)
- Valorisation du cadre de vie (par ex: acousticien, urbaniste…)
- Sensibilisation et éducation à l’environnement (par ex : éco-conseiller, psychologue environnementaliste…)
Les nouvelles compétences « vertes » : La volonté politique de réduire les impacts environnementaux pousse les entreprises à développer de nouveaux produits et de nouvelles techniques, de nouvelles méthodes de gestion et donc de nouvelles situations professionnelles se présentent dans bon nombre de secteurs, qui sont autant d’occasions de mobiliser sur le lieu de travail de nouvelles compétences.
L’acte de produire est revisité, en replaçant l’usager au centre des préoccupations. Des changements de comportements, dans le chef du travailleur et de ceux qui le dirigent, ainsi que des compétences supplémentaires, sont nécessaires pour répondre aux besoins nouveaux Outre des capacités techniques, l’exigence qualitative du résultat sera plus forte.
4. Propositions pour un pilotage des compétences vertes au niveau territorial
On devrait considérer comme « formation verte » – qui devrait donc bénéficier de financement additionnel – tous les modules d’apprentissage visant tant l’efficacité énergétique que la réduction des impacts environnementaux, soit :
- Sous la forme plus générale d’éducation au développement durable visant à faire comprendre le sens plus général des démarches (qualité environnementale du bâtiment) et la modification des comportements (précision des gestes, interaction entre les intervenants sur le chantier,…).
- Soit sous la forme d’acquisition de savoirs- faire nouveaux liés à des techniques ou matériaux nouveaux.
- Sous la forme de l’acquisition connaissances liées à des techniques, des réglementations,…
Il serait nécessaire, dans une dynamique de développement territorial (par ex au niveau des bassins de vie) de réunir, de façon permanente, les acteurs avec comme objectif de :
- Inventorier et faire connaître les formations existantes.
- Mutualiser les savoirs et savoir-faire.
- Identifier les freins, faire émerger les besoins prioritaires et soutenir de nouvelles initiatives.
- Favoriser le développement de la demande des entreprises en matière de compétences relatives à la qualité environnementale.
On devrait considérer comme « emploi vert », tous les emplois existants ou émergents qui mobilisent en tout ou en partie des compétences qui contribuent à l’efficacité énergétique et la réduction des impacts environnementaux.
Dans la même dynamique de développement territorial, les acteurs devraient également prendre en charge une démarche visant:
- Inventorier les métiers existants
- Identifier les métiers en pénuries
- Cerner les tendances de développement de l’emploi à court et moyen terme
En confrontant les états des lieux et les analyses territoriales de formation et d’emploi, il devait être possible de piloter le développement des compétences liées aux développements des emplois verts et d’orienter les politiques publiques avec efficience et dans le souci de la qualité de l’emploi.
Annexe 1 : liste d’activités vertes ou de domaines verts selon différents opérateurs
Ces différents référentiels, peuvent, déclinés en savoir- faire à acquérir ou compétences à maîtriser, servir de guide pour analyser les programmes de formation existants et déterminer la, partie verte de chaque programme ainsi que les emplois existants ou en devenir.
- QEB (qualité environnementale du bâtiment )
(La Haute qualité environnementale ou HQE est un concept environnemental datant du début des années 1990 qui a donné lieu à la mise en place de l’enregistrement comme certification par l’AFNOR[ ; elle a notamment produit la démarche QEB en 14 cibles)
14 cibles en 2 domaines :
Domaine 1 : Impacts sur l’environnement extérieur
Eco-construction :
- Relation des bâtiments avec l’environnement immédiat
- Choix intégré des produits et procédés de construction
- Chantier à faibles nuisances
Eco-gestion :
- Gestion de l’énergie
- Gestion de l’eau
- Gestion des déchets d’activité
- Gestion de l’entretien et de la maintenance
Domaine 2 : Création d’un environnement extérieur satisfaisant
Confort :
- Confort hygrothermique
- Confort acoustique
- Confort visuel
- Confort olfactif
Santé :
- Qualité sanitaire des espaces
- Qualité de l’air
- Qualité sanitaire de l’eau
- Valideo
(Valideo est un système belge de certification volontaire de construction durable soutenu par les partenaires du secteur)
Quatre thèmes de référentiel et 16 cibles
Site et construction :
Intégration du projet et valorisation du site
chantier
matériaux, produits
adaptabilité
Gestion :
énergie
eau
entretien maintenance
déchets en exploitation
Confort :
hygrothermie
visuel
acoustique
santé
Valeur sociale :
lieu de vie
mobilité
accessibilité
anti- effraction
- Bruxelles Environnement
(Bruxelles environnement, l’ancien Institut bruxellois pour la gestion de l’environnement, créé par arrêté régional en 1989)
Huit domaines de compétences à acquérir :
Matériaux écologiques
Étanchéité de l’air
Performance énergétique des bâtiments
Passif et basse énergie
Ponts thermiques
Principes de ventilation
Principes d’isolation acoustique
Autres à définir…
- Cluster CAP 2020
(CAP 2020 est un cluster d’entreprises de la construction reconnu en 2008 qui rassemble près de 100 entreprises : entreprises de la construction, bureaux d’architectes et producteurs de matériaux)
Cinq domaines identifiés :
aspects de performance énergétique globale,
utilisation des ressources naturelles,
gestion de l’eau et des déchets,
confort
santé des occupants
occupation du territoire.