« L’environnement est au cœur de l’avenir social et économique de notre société »
(Alain Hubert)
« Les hommes politiques des pays dits riches s’affrontent sur des questions qui paraîtront bientôt dérisoires devant la montée des périls écologiques »
(Nicolas Hulot)
Le hasard fait bien les choses : ces deux personnalités marquantes de la sensibilité écologique contemporaine ont un nom qui commencent par la même lettre !
Leur ressemblance ne se limite pas à cela : même sujet dominant de préoccupation (l’avenir de la planète Terre et de l’humanité qu’elle abrite) et même volonté pédagogique de conscientisation citoyenne ; même affirmation d’un engagement « transpolitique », j’entends par là sans affiliation partisane.
Une comparaison plus approfondie permet cependant de déceler des différences intéressantes à analyser entre ces deux personnalités charismatiques.
Alain Hubert est une personnalité fort attachante, tant par l’authenticité de ses engagements que par le fait qu’il paie de sa personne pour les servir.
Cet ingénieur de formation, ébéniste et guide de montagne de métier, est d’abord un homme d’aventure (pour ne pas dire un « aventurier » car ce terme a pris un sens péjoratif) qui a développé de très solides qualités sportives.
Cet amoureux du Valais, après avoir relevé le défi de courses en haute montagne de plus en plus difficiles dans les Alpes et dans l’Himalaya, s’est passionné pour les deux mondes polaires.
Ses deux expéditions de traversée à pied du continent antarctique (en 1997-98) et de la banquise arctique de la Sibérie au Groenland (en 2007), via les pôles sud et nord, ont été des exploits largement médiatisés. Deux hommes seuls (Alain Hubert et Dixie Dansercoer), tirant leur traîneau pendant plus de 100 jours à travers un univers de glace, dans des conditions souvent très difficiles, jusqu’à la limite de l’épuisement.
Il est aujourd’hui responsable de l’implantation sur le continent Antarctique de la nouvelle station belge « Princesse Elisabeth », conçue pour être entièrement autonome des points de vue de l’énergie et de la gestion des déchets.
Arctique et Antarctique ont offert à Alain Hubert la possibilité d’allier son goût de l’exploration et de l’effort physique à la recherche scientifique de terrain. Ces mondes de la glace sont en effet des témoins privilégiés de l’évolution climatique passée et future de la planète.
Dans le cadre de la fondation polaire qu’il a mise sur pied, il s’est aussi affirmé comme un remarquable pédagogue. L’objectif de la « Fondation polaire internationale », créée en 2002, est d’être une passerelle entre science et société.
Elle témoigne de la volonté d’Alain Hubert de mettre les acquis de la recherche scientifique polaire à la portée de tous ; la visite de son site internet en témoigne également, de même que les nombreuses conférences qu’il accepte de faire, souvent à titre bénévole et pour des publics très diversifiés.
Alain Hubert est aussi, avec Claudine Brasseur (responsable de l’émission « Le jardin extraordinaire »), à l’origine de l’opération « Planète-Nature » lancée par la RTBF en mars 2007, en partenariat avec la Fondation polaire. Un exemple positif, pour le média francophone belge audio-visuel, de sa manière, par ailleurs controversée, d’assumer sa mission de service public !
C’est dans le cadre de cette fondation qu’Alain Hubert a initié la conception puis le montage de la nouvelle station belge en Antarctique. Une réalisation pionnière qui relève le défi de n’avoir aucun impact néfaste sur l’environnement naturel protégé dans lequel elle s’implante. Et une opération dont la Belgique a tout lieu d’être fière même si l’essentiel des fonds nécessaires a été obtenu du secteur privé.
Photographe de formation, Nicolas Hulot est d’abord un homme des médias aux très grandes qualités de communicateur ; qui a, depuis quelques années, acquis une renommée qui dépasse largement le monde occidental.
Il s’est d’abord fait connaître par une émission télévisée « écologique » de TF1 : « Ushuaia » complétée par la mise sur le marché de produits labellisés du nom de l’émission.
Lui aussi a créé une fondation («Pour la nature et l’homme») qui dispose de très importants moyens financiers apportés par des partenaires privés.
Le bus pédagogique scolaire de la fondation a récemment circulé dans notre commune. Une école a été ouverte dans le Morbihan en 2004 ; elle se veut un « centre de sensibilisation, d’éducation, de formation et d’information sur la biodiversité dans une perspective de développement durable », qui accueille en priorité des enfants et jeunes adolescents.
Nicolas Hulot partage donc avec Alain Hubert la volonté d’une mission de sensibilisation pédagogique. Mais sa notoriété actuelle provient surtout d’un engagement « politique » au sens large du terme, qui veut prendre ses distances par rapport aux pouvoirs en place tout en cherchant par tous les moyens à les influencer. Il proclame en effet à tous les responsables que le temps n’est plus à la prise de conscience : il faut passer à l’action, en faisant de l’impératif écologique une priorité.
Conseiller en environnement et ami du Président Chirac, Nicolas Hulot est un homme proche du pouvoir (il avait même un moment envisagé de se présenter personnellement aux élections présidentielles françaises de juin 2007) mais qui se réclame de la société civile.
Il a choisi, au-delà des clivages politiques traditionnels, de proposer un « pacte écologique » à la signature des candidats aux élections présidentielles françaises de 2007.
Le livre de présentation de ce pacte témoigne à la fois d’une réflexion scientifique profondément mûrie sur le plan conceptuel et de propositions très concrètes de choix politiques réalistes. Beaucoup de ses idées sont transposables dans un contexte plus large que celui de la France.
Sa démarche a d’ailleurs inspiré le monde associatif belge.
Une dizaine d’associations environnementales ont collaboré à la rédaction d’un pacte écologique à la belge, dont les 36 mesures concrètes ont été soumises aux 4 grands partis francophones pendant la campagne électorale des élections fédérales de juin 2007.
Les conclusions qui se dégagent de leurs réponses ont mis en évidence les réticences du MR dès qu’il s’agit de s’engager à promouvoir des changements qui remettent en question le système socio-économique en place. A quelques nuances près, Ecolo a par contre souscrit à ce pacte belge.
Quelles conclusions se dégagent de cette double présentation ?
Le grand impact que peut avoir un individu,
en tant que leader d’opinion, lorsqu’il s’implique
au service d’une cause d’intérêt collectif.
L’importance de la communication publique dans le processus de contagion culturelle, tant par la qualité du contenu que par les moyens mis en œuvre.
La difficulté d’inciter les décideurs à passer de la parole aux actes
quand il s’agit de changer de paradigme.