En ce début d’année 2008, le thème de l’énergie connaît aujourd’hui
un engouement médiatique et publicitaire sans précédent.
Un fait étroitement lié à l’inquiétude relative au réchauffement climatique de la planète ;
mais aussi aux problèmes posés par la libéralisation du marché et l’augmentation des coûts.


L’organisation de notre société moderne s’est fondée sur le postulat de l’existence d’énergies fossiles abondantes et bon marché.

Une enquête récente révèle que la Belgique est l’un des pays européens dont la consommation d’énergie par habitant est la plus élevée. Par ailleurs, la part des énergies renouvelables n’est que de 3% du total de notre consommation (une des plus basses en Europe et nettement moins que la France, l’Italie et la Pologne).

L’annonce d’une raréfaction des ressources pétrolières et la prise de conscience de l’enjeu du réchauffement climatique remettent ce postulat en question.

L’accord européen de mars 2007 a été qualifié « d’historique » parce qu’il met l’Europe à l’avant de la lutte contre le réchauffement climatique. Il a réussi à mettre d’accord les 27 Etats membres de l’Union Européenne sur des engagements de principe contraignants à l’échéance de 2020 : une réduction de 20% des émissions de gaz à effet de serre et de la consommation d’énergie (par rapport à 1990) ; une part de 20% d’énergies renouvelables dans la production totale d’énergie.

Chacun devra y contribuer. Reste la délicate question de la répartition des efforts nécessaires entre les 27. Plutôt que de chercher à se montrer pionnier en la matière, chaque pays plaide pour la défense de ce qu’il estime être les intérêts de son économie à court terme…

L’Europe a par ailleurs imposé la libéralisation du secteur de l’énergie.

En Belgique elle a eu l’intérêt de mettre fin au quasi monopole de la puissante société privée Electrabel (devenue filiale du groupe Suez) dont la production d’électricité repose essentiellement sur le nucléaire. Les effets attendus sur la diminution des prix à la consommation sont cependant décevants. Et le choix éclairé du meilleur fournisseur suppose une maîtrise des informations dont tous les consommateurs n’ont pas la même possibilité.

Quant à la hausse actuelle du prix des carburants, elle semble être la meilleure des incitations à consommer moins.

A l’initiative de l’échevinat de l’Environnement, notre commune a bénéficié (pour des réunions d’information et une animation à la fête annuelle des enfants) de la collaboration d’une ASBL belge spécialisée dans ces deux domaines : l’APERE. Sa compétence est mise au service d’une vulgarisation de qualité. Elle diffuse de précieux conseils techniques pour « consommer moins et consommer mieux ».

Le thème de l’énergie se décline en deux volets :

les économies d’énergie (ou URE « utilisation rationnelle de l’énergie »)

et les énergies renouvelables (énergies alternatives aux énergies fossiles).

Un grand potentiel d’économie d’énergie
Nous avons longtemps vécu dans une société atteinte de boulimie énergétique ! La hausse des prix de l’énergie remet utilement cette fâcheuse habitude en question.

Plusieurs avantages financiers (diminution des factures, primes URE, déductions fiscales) concourent à inciter les ménages à réduire leur consommation. Les difficultés budgétaires des pouvoirs publics les contraignent à faire de même.

Les diverses façons de consommer moins :

  • l’énergie dans les bâtiments

    Une utilisation plus rationnelle de l’énergie par des investissements dans l’isolation est présentée comme une priorité en Belgique ; à très juste titre ! Le principe de la cogénération (production conjointe de chaleur et d’électricité à partir d’un même combustible) est désormais présenté comme une solution d’avenir.

    En région bruxelloise, un audit énergétique gratuit de son habitation peut être réalisé sur simple demande à l’IBGE (Institut Bruxellois de Gestion de l’Environnement) avec les conseils qui en découlent. Contrairement à ce qui se dit souvent, l’écoconstruction n’est pas un luxe de riche ; d’autant moins, que les économies sont substantielles à l’usage ! Quelques exemples récents de maisons unifamiliales uccloises témoignent que la construction à basse consommation d’énergie ne revient pas forcément plus cher. Plusieurs promoteurs immobiliers s’engagent dans la même voie.

En matière d’économie d’énergie l’exemple des pouvoirs publics peut être contagieux, stimulant l’effort citoyen, voire même la mobilisation de comités de quartier.

Mettre un terme au gaspillage d’énergie (éclairage, chauffage, conditionnement d’air) dans les administrations publiques passe par l’éducation des usagers des locaux de bureau. Mais aussi par des décisions d’investissements qui sont rapidement rentables : isolation des bâtiments, radiateurs équipés de vannes thermostatiques, chaudières plus performantes …

 Les communes de Watermael-Boitsfort et de Schaerbeek ont été les plus rapides à montrer l’exemple.

 Celle de Uccle s’est engagée elle aussi, à partir de 2005, dans une politique volontariste d’économie d’énergie. Après l’établissement d’un cadastre énergétique de tous les bâtiments communaux, un bureau d’étude spécialisé en engenering a été engagé fin 2007 pour la conception des actions à entreprendre. La Commune participera au programme PLAGE (Programme Local d’Actions pour la Gestion Energétique) initié par l’IBGE, qui vise à la réalisation d’un ensemble coordonné d’actions au bénéfice d’un même patrimoine. D’ores et déjà, une installation de cogénération est prévue pour la piscine. Par ailleurs, le projet de logements moyens de la Régie foncière sur le site de la rue de la Pêcherie (que j’ai initié sous la précédente législature) prévoit un coefficient énergétique très performant.

 L’exemple de la ville de Gembloux est lui aussi intéressant : à l’initiative de l’échevin Ecolo de l’énergie, l’investissement en économie d’énergie dans les bâtiments publics a été financé grâce à un tiers investisseur privé (la filiale belge d’une société canadienne). Après une période d’amortissement de 7 ans, c’est la ville qui tirera les bénéfices des travaux réalisés.

On parle de plus en plus de l’intérêt d’élaborer un « bilan carbone » à l’échelle des communautés locales (chiffrant le plus précisément possible les émissions de gaz à effet de serre de l’entité territoriale dans tous les secteurs d’activité publics et privés).

La commune d’Uccle a commandité le sien à un bureau d’étude ; le plan d’action qui en découle (visant à réduire des émissions de 35%) a été adopté par le conseil communal en octobre 2009 en même temps que l’agenda 21. Reste à le mettre en application !

L’exigence légale d’une performance énergétique des bâtiments (PEB) est désormais acquise en régions bruxelloise et wallonne. Elle s’appliquera à toutes les demandes de permis de bâtir.

L’ordonnance bruxelloise entrera en vigueur dès 2008 pour tous les bâtiments neufs qui devront obtenir un certificat PEB). Le milieu des promoteurs immobiliers a affirmé son soutien à cette initiative politique (l’entreprise CIT Blaton, pionnière en réalisation « d’immeubles verts », estime même qu’il faut aller plus loin dans la prise en compte des coûts environnementaux des bâtiments à l’usage). Et les projets de « constructions passives » se multiplient aujourd’hui, capables de réduire les coûts de chauffage au minimum avec des prix de revient de plus en plus concurrentiels.

  • Economiser l’énergie dans le secteur des transports (particulièrement énergivore !)

    Chacun pense d’abord à des véhicules motorisés à faible consommation de carburant. L’industrie automobile fait des efforts en ce sens, marketing publicitaire oblige ! Plus difficile est d’admettre qu’un effort est aussi nécessaire pour réduire le nombre et la longueur des déplacements motorisés.

    De nombreux longs trafics commerciaux pourraient être évités par une consommation de produits locaux. Les courts trajets automobiles en ville pourraient s’effectuer à pied ou à vélo. Par ailleurs, un aménagement du territoire tendant à une densification accrue et plus de mixité pourra contribuer très utilement à réduire les besoins de mobilité en ville.
  • Petits gestes au quotidien, grands effets

    Ne sous-estimons pas l’impact positif des efforts individuels multipliés par un grand nombre de citoyens responsables.

    C’est ce que rappelle une brochure disponible gratuitement par Bruxelles-Environnement, qui, diffusée via les communes, multiplie les suggestions à cet égard. Réglementation modulée des thermostats, utilisation plus réfléchie du frigo et de l’eau chaude, extinction de l’éclairage en quittant une pièce sont des habitudes aisées à acquérir par tout un chacun.

Et n’oublions pas d’essayer de prendre en compte la consommation « d’énergie grise » : celle qu’il a fallu consommer pour produire un bien et le transporter, le recycler ou le détruire (et qui reste le plus souvent cachée !).

Sait-on par exemple que boire une eau de bouteille en plastique consomme 2000 fois plus d’énergie que l’eau du robinet ? Et qu’une pile non rechargeable requiert pour sa fabrication 40 à 140 fois plus d’énergie qu’elle ne peut en fournir ? Pense-t-on en choisissant des châssis en PVC à la grande quantité d’énergie que la production de ce matériau a demandée (à partir de pétrole et de sel), alors qu’il n’est pas recyclable ?

Diversité et richesse des sources d’énergies renouvelables

Le développement industriel des 19ème et 20ème siècles s’est fondé sur l’utilisation des énergies fossiles accumulées dans le sous-sol au cours d’un processus géologique qui se compte en millions d’années. L’épuisement des gisements de charbon, de pétrole et de gaz est inéluctable à plus ou moins court terme. Et leur utilisation augmente, tout aussi inéluctablement, la teneur de l’atmosphère en gaz à effet de serre.

Remarquons que, lorsque l’on parle de l’après pétrole on pense d’abord au manque de carburant pour les véhicules motorisés. C’est oublier que notre dépendance au pétrole est davantage encore ancrée dans son utilisation comme matière première dans l’industrie chimique et pharmaceutique. Raison de plus pour réduire la consommation du pétrole à des fins énergétiques.

Les énergies alternatives possibles pour remplacer les énergies fossiles sont très diverses : soleil, vent, cours d’eau, marées, biomasse (bois, déchets organiques), géothermie… Il y a là un potentiel renouvelable et non polluant considérable, actuellement très sous-exploité ; et qui présente l’avantage supplémentaire d’être largement dispersé dans l’espace, permettant donc une production d’énergie décentralisée.

La commune agricole de Beckerich, au Grand-Duché de Luxembourg (2200 habitants) espère avoir gagné son autarcie énergétique pour 2015. Son secret ? La combinaison du solaire, de l’éolien, du bois et du biogaz obtenu par recyclage des déchets d’élevage ; et l’impulsion du maire, député vert !

Le potentiel des énergies renouvelables ne fera que croître à mesure que seront consentis des investissements plus importants dans la recherche ; il permettra le développement de filières très intéressantes en matière d’emploi.

L’effort de la Belgique en recherche-développement à cet égard est encore très insuffisant. Il faut avoir la volonté politique de généraliser les expériences pilotes en énergies renouvelables. Ce secteur est un vivier d’emplois pour demain beaucoup plus important que celui des énergies fossiles !

Quelques commentaires plus particuliers :

  • L’exploitation de l’énergie solaire (à laquelle un autre chapitre est consacré)

    C’est la source d’énergie dont la production est la plus décentralisable. Elle a commencé par des capteurs thermiques (eau chaude sanitaire ou four solaire). La transformation directe de l’énergie lumineuse en énergie électrique (photovoltaïque) est aujourd’hui en plein développement : une surface de captation est disponible sur la plupart des toits et le retour sur l’investissement en panneaux photovoltaïques est en voie de réduction grâce aux améliorations technologiques (il ne faut plus que 1 à 3 ans de fonctionnement pour amortir l’énergie investie dans un panneau). Et l’on parle aujourd’hui de centrale solaire.
  • L’énergie éolienne

    Longtemps considérée comme une aimable fantaisie des écologistes, elle a fait ses preuves en Europe et aux Etats-Unis en tant que source d’électricité relativement bon marché.

    C’est une source d’énergie inépuisable, présente dans le monde entier. Le potentiel est considérable et les grandes sociétés productrices d’énergie ne s’y trompent plus aujourd’hui (l’éolien marginal exploité par de petites entreprises intéresse désormais les grosses !). Le Danemark en est le leadership mondial. _ La Belgique est à la traîne mais d’importants projets sont en bonne voie de concrétisation, dans la mer du Nord notamment ; Infrabel (le gestionnaire du réseau ferroviaire belge) se montre même intéressé par l’implantation d’éoliennes le long des voies ferrées).

    Le fait qu’il s’agisse d’une source d’énergie intermittente n’est pas un argument convainquant en sa défaveur : dans le cadre d’un réseau interconnecté et alimenté par diverses sources d’énergies renouvelables, la réactivation des centrales polluantes ne devrait pas être nécessaire en l’absence de vent ! Par contre, les éoliennes sont contestées à plus juste titre lorsque leur implantation est cause d’une dégradation de paysages ruraux de qualité.
  • L’hydroélectricité

    Cette source d’énergie est importante pour les pays qui détiennent des reliefs montagneux ou/et des fleuves à grand débit. Quoique renouvelable, son potentiel est partiellement menacé par le réchauffement climatique (en raison d’une fonte des glaciers qui s’accélère).

    Les barrages de cours d’eau ont le triple avantage de procurer de l’énergie, une régularisation des crues et des réserves d’eau. Mais ils ont des effets pervers du point de vue écologique (dont les plus connus sont les retenues de limon et les coupures des voies de passages des poissons migrateurs).

    Sans avoir ces inconvénients, l’énergie marémotrice est une possibilité intéressante pour tous les pays côtiers.
  • La biomasse

    Il est beaucoup question ces derniers temps des (bio)agrocarburants. Le potentiel très relatif qu’ils représentent pour l’avenir fait l’objet d’un débat particulièrement intéressant. Ce sujet est largement développé dans un autre chapitre.

    La biométhanisation des déchets organiques (ménagers, agricoles et forestiers) est par contre beaucoup plus prometteuse. Certains estiment qu’elle pourrait à elle seule couvrir l’ensemble des besoins énergétiques de la Wallonie.
  • L’énergie géothermique

    Peu de pays disposent d’un potentiel important lié à une activité volcanique. Mais il est partout possible de prélever de l’énergie souterraine grâce à des pompes à chaleur (dont la mise en place est techniquement assez simple). Seul revers de la médaille : une pompe à chaleur consomme de l’électricité ! Il est donc recommandé de choisir des systèmes les plus performants possibles dans le rapport entre l’énergie renouvelable gratuite récupérée sous forme de chaleur et l’énergie électrique nécessaire pour la produire.
  • L’hydrogène

    Que penser par ailleurs de la perspective des moteurs à hydrogène (la fameuse « pile à combustible »)?

    L’hydrogène apparaît comme un carburant de choix puisqu’il est non polluant (le résultat de sa combustion est de l’eau !). Mais il ne se trouve pas dans la nature : il s’obtient par électrolyse de l’eau, donc en consommant de l’électricité. D’où l’idée de stocker sous forme d’hydrogène l’énergie éolienne en surplus et les potentiels hydrauliques encore sous-exploités. Mais il y a un « hic » majeur : la production d’hydrogène par électrolyse consomme beaucoup plus d’énergie que la quantité que cet hydrogène pourra restituer ! Il ne s’agit donc pas d’une solution d’avenir au problème mondial de l’approvisionnement en énergie, à moins que n’aboutissent les recherches en cours portant sur l’amélioration possible du rendement du processus d’électrolyse.

    Le Japon a toutefois déjà misé sur cette énergie : la pile à combustible domestique y sera commercialisée dès 2009 et la commercialisation de la voiture à hydrogène est prévue pour 2015.
  • Et l’énergie nucléaire ?

    Je ne l’ai pas oubliée puisqu’elle fait l’objet d’un autre chapitre de cet abécédaire. Mais il est illusoire de la considérer comme une alternative durable aux autres énergies fossiles. Pour de multiples raisons, à commencer par le fait qu’elle repose sur l’exploitation d’une matière première (l’uranium) dont les ressources « fossiles » sont elles aussi limitées et non renouvelables !

En guise de conclusion

L’avènement d’une nouvelle « culture » de l’énergie est urgent. Il dépend davantage des choix politiques que de la recherche de technologies nouvelles. Et il apparaît possible sans induire une diminution de notre qualité de vie, bien au contraire !

L’énergie apparaît comme un des défis majeurs du 21ème siècle. La remise en question de nos habitudes en matière de production et de consommation d’énergie était jadis une opportunité ; c’est devenu aujourd’hui une priorité !

Dans le cadre de l’objectif européen « zéro énergie »,

tous les bâtiments construits à partir de 2019

devront produire autant d’énergie qu’ils en consomment.

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