Mercredi 22 novembre 2006. Le jour de ma dernière commission de concertation. Le porte-parole d’un des comités de quartier ucclois se lève et me remercie publiquement pour le travail que j’ai accompli, en soulignant « la qualité de mon écoute ». Un hommage inattendu, qui me va droit au cœur. Car tous les citoyens n’ont pas compris que, même si leur demande n’a pu être satisfaite, elle avait pourtant bien été écoutée… et comprise, donc entendue !

Ecouter, entendre.

Deux verbes français dont les sens m’ont toujours paru ambigus.

Certains dictionnaires, après les avoir distingués (« entendre » : percevoir par l’ouie ; « écouter » : prêter une oreille attentive) finissent par considérer qu’ils peuvent être presque synonymes dans le sens de comprendre, tenir compte de ce qui est dit. Il est évident que les emplois de ces mots s’entremêlent dans la langue française. Curieusement, l’évolution de la langue entretient cette ambiguïté : le « malentendu » résulte d’un défaut de compréhension, le « malentendant » a un problème d’audition !

Après hésitation, je suis tentée d’opter pour le sens qui transparaît
dans ces deux expressions courantes :

« Il n’y a de pire sourd que celui qui ne veut point entendre »

« A quoi cela sert-il de nous avoir longuement écoutés puisque nous n’avons pas été entendus »

(reproche formulé par certains habitants à propos des enquêtes publiques d’urbanisme)

La capacité d’une « écoute qui entend » est une qualité nécessaire en politique.
Il est très important de permettre aux citoyens d’exprimer leur opinion et d’accorder toute l’attention requise pour une bonne réception de leur message.

Mais l’écoute attentive, aussi utile soit-elle, n’implique pas forcément l’adhésion au message reçu. Comprendre n’est pas forcément valider ou cautionner !

Ainsi, par exemple, dans les courriers que reçoivent les élus Ecolo ucclois figurent souvent des rappels à l’ordre qui disent en substance : « nous votons Ecolo pour que soient défendus les espaces verts ; vous perdrez notre voix si vous n’assumez pas ce qui est votre mission première ». En dehors du côté déplaisant de cette forme de chantage, je suis frappée par le fait que des électeurs s’arrogent le droit de décider ce qu’est la priorité d’un parti politique.

Pourtant, à chaque échéance électorale Ecolo diffuse des programmes qui témoignent amplement d’un projet politique global de société ; un projet qui, loin d’être focalisé sur la seule défense de la nature, accorde une large importance aux préoccupations sociales. L’image de notre parti n’évolue pas pour autant dans l’esprit des électeurs. Il faut croire que très peu de gens lisent les programmes électoraux ! il est en tout cas certain que l’écart est manifeste entre les opinions de l’électorat traditionnel d’Ecolo et celles de beaucoup de ses militants d’aujourd’hui.

Il peut y avoir de la démagogie dans l’écoute des citoyens par les politiques.

La campagne électorale de Ségolène Royal pour les élections présidentielles françaises a débuté par une phase « d’écoute citoyenne » qui fut diversement commentée. S’il s’agissait d’être à l’écoute des problèmes et des suggestions des citoyens pour en tenir compte lors de l’élaboration de son programme, je retrouve là une démarche familière à celle du parti Ecolo, qui me parait non seulement sympathique mais fort judicieuse. Si l’idée était « d’écouter les questions plutôt que de donner les réponses », je crains qu’elle n’ait esquivé la mission première d’un candidat à la présidence : présenter clairement aux électeurs son projet politique pour les 5 ans à venir. Et si l’opération visait surtout à plaire à un électorat potentiel, j’y vois une regrettable dérive de l’idéal d’une démocratie participative authentique !

Dans la faculté d’écouter l’autre il y a la compréhension de son discours,

mais aussi une nécessaire empathie,

qui n’implique pas forcément d’être d’accord avec lui.

Il y a aussi le souci de le faire avancer et pas seulement de l’apaiser.

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