Plutôt que le mot « tradition », j’ai préféré celui de « changement ».

Non pas que je renie tout attachement aux traditions.

Bien au contraire. Il peut y avoir une fierté identitaire légitime dans le respect de la tradition.

Mais le poids de la tradition m’est apparu comme trop lourd dans la gestion de la commune.


Traditions et changements au niveau communal.

Tous les 6 ans, après les élections, s’installe un nouveau Collège et donc l’arrivée est possible dans les services de l’administration communale de nouvelles personnalités d’échevins.

Lorsque je suis devenue échevine, j’ai souvent été amenée à poser la question du « pourquoi ? ». La réponse était souvent satisfaisante. Quelques fois, cependant, elle s’est limitée à « on a toujours fait comme cela » !

Dans certains cas, la pratique m’a semblé justifiée, même si la mémoire collective n’en avait pas gardé explicitement les raisons. Dans d’autres, par contre, le recul que permet un regard neuf posé sur le fonctionnement d’une institution établie m’incitait à vouloir changer les choses.

Changer les choses est plus facile à dire qu’à faire !
Tout changement dans l’organisation du travail d’une administration demande un effort d’adaptation qui oblige à sortir de la routine du traintrain quotidien. Il est source d’inquiétude : pour certains fonctionnaires celle de ne pas être à la hauteur (par exemple pour l’informatisation du service de l’Urbanisme) ; pour les initiateurs du changement celle de voir leurs espérances déçues. Beaucoup trouvent sécurisant de ne pas changer leurs habitudes de travail. Par contre, j’ai constaté que certains fonctionnaires ont besoin de changement pour restimuler leur motivation.

Parmi les nouveaux élus, il est des tempéraments qui imposent

leur marque en faisant table rase du passé.

D’autres ont la volonté de s’inscrire dans une histoire ;

et la sagesse de demander conseil et de s’informer, avant d’innover.

Je pense avoir été de ces derniers.

Changements subis

Nous vivons aujourd’hui dans un monde en mutation rapide.

Révolutions technologiques dans la maîtrise de la matière et de la vie, nouvelles formes de vie familiale, changements d’emploi fréquents, mondialisation de l’économie, et réduction des obstacles de temps et d’espace à la communication entre les hommes en sont des exemples frappants.

Il est de plus en plus nécessaire d’être capable de s’adapter au changement. Les situations de crises nous y obligent.

La hausse actuelle des prix pétroliers et la prise en compte des coûts vérité du transport pour la collectivité induisent une remise en question inévitable de nos habitudes de consommation. Un changement de comportement individuel plus facile à accepter quand on a pris conscience qu’il va dans le sens de l’intérêt général à long terme de l’humanité.

Le changement est moins difficile à vivre s’il a été librement consenti. Mais, surtout, il est d’autant mieux accepté que l’on a pu participer au processus de la prise de décision.

C’est ce qui légitime toutes les formes de démocratie participative, que ce soit au niveau d’une famille, d’une entreprise ou d’une commune.

Attention cependant à ne pas céder à la mode d’un culte du neuf, sans se poser de questions sur la valeur de cette nouveauté !

Tout changement n’est pas progrès ! La privatisation de certains services publics comme la poste risque d’en être un bon exemple.

Changements induits
La question se pose par ailleurs de la meilleure façon de promouvoir un changement souhaité. Une question particulièrement cruciale face à l’accélération de la dégradation des équilibres écologiques planétaires.

La science écologique a mis en évidence le concept de « seuil », c’est-à-dire de point dont le franchissement peut provoquer des changements très rapides et parfois imprévisibles dans une évolution donnée. Il n’est pas impossible d’envisager le même type de phénomène dans les évolutions sociales, sous forme d’une contagion culturelle dans un sens positif.

A l’égard des exigences d’un développement durable, les mentalités commencent à évoluer. La société civile devient un ferment de changement de plus en plus actif. Et certains pouvoirs publics mènent une action qui a valeur d’exemple.

Mais la prise de conscience de tous les impacts négatifs d’une réalité (comme, par exemple, celle de la place excessive prise par l’automobile dans notre société ou celle d’une production alimentaire de plus en plus polluée et internationalisée) suppose l’effort de lucidité d’une analyse systémique souvent complexe.

Chacun sait d’autre part que la prise de conscience ne suffit pas à déclencher le passage à l’acte. Les gens n’aiment pas changer leurs habitudes. Il se peut aussi qu’ils cèdent à un sentiment d’impuissance devant l’ampleur du changement nécessaire à l’échelle planétaire ; ou qu’ils se disent « pourquoi moi et pas les autres » ? L’individu a besoin de se sentir partie prenante d’un mouvement collectif ; il sera prêt à faire des efforts d’autant plus qu’il ne se sentira pas seul à les faire.

Imposer par la force des changements de comportement est rarement efficace. Il vaut mieux créer un contexte qui va encourager des changements progressifs endogènes c’est-à-dire induits de l’intérieur.

Lors du dernier congrès préélectoral d’Ecolo, en juin 2007, Carine Russo (candidate au Sénat) nous a transmis un message particulièrement sage : on ne peut changer les choses que sur des bases profondément réfléchies ; et c’est en douceur qu’il faut les faire évoluer. Il faut espérer pouvoir concrétiser des projets révolutionnaires à la manière de la maman enceinte qui met 9 mois à façonner un nouveau-né.

A cet égard, les actes symboliques ont une importance qui va bien au-delà de leur impact direct sur le problème parce que susceptibles de renforcer une dynamique.

Comme par exemple la Journée en ville sans voiture et l’allumage des bougies d’Amnesty international le 10 décembre.

Mais si l’on veut transformer une réalité, il faut commencer par comprendre sa genèse et les facteurs qui contribuent à son maintien. L’analyse d’un mécanisme ayant mis en évidence toutes les forces en action, il devient possible de les utiliser, ou de les contrer, pour induire une dynamique qui aille dans le sens de l’objectif que l’on s’est fixé.

Le changement qui s’impose dans le fonctionnement d’un système économique mondial fondé sur l’optimisation des profits financiers à court terme, sans souci d’une éthique sociale et environnementale est certes radical. Et il est d’autant plus difficile que les responsabilités sont diluées et que l’action des grandes sociétés multinationales échappe au contrôle du pouvoir des Etats. Mais ce n’est pas une raison pour ne pas se mobiliser, chacun dans la mesure de ses moyens.

Ne pas avoir peur du changement

et le croire toujours possible mais pas forcément souhaitable.

Un bon fondement de l’action politique !

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