Le débat sur l’avenir de la Politique Agricole Commune après 2013 est lancé. En mai et juin 2010, la Commission européenne a procédé à une consultation publique citoyenne sur le sujet. Les quelques 5000 contributions collectées ont été rassemblées dans un rapport de synthèse en vue d’alimenter une conférence organisée sur la question par la Commission les 19 et 20 juillet 2010 à Bruxelles. La Commission s’appuiera entre autres sur ce travail pour préparer ses propositions, qu’elle publiera dans une communication en novembre 2010. Les diverses options proposées feront ensuite l’objet d’une consultation des parties prenantes, entre décembre 2010 et mars 2011. L’ensemble du processus devrait déboucher sur une proposition législative en juillet 2011, soumise au Conseil et au Parlement européens dans le cadre de la procédure de codécision.

Les enjeux du futur de la PAC sont nombreux pour l’Europe : assurer la sécurité alimentaire des européens avec des produits de haute qualité gustative, nutritionnelle et sanitaire à des prix raisonnables pour le consommateur, assurer un revenu équitable aux agriculteurs et autres acteurs des chaînes agroalimentaires, participer activement à la bonne qualité des eaux, des sols et de l’air, contribuer à la lutte contre le réchauffement climatique, préserver la biodiversité, respecter les droits des femmes et contribuer à l’égalité hommes-femmes dans le secteur agricole, etc. Mais ils concernent aussi le reste du monde et tout spécialement les populations des pays les plus pauvres. En particulier dans la mesure où la PAC actuelle contribue, avec d’autres politiques européennes, à la situation d’extrême pauvreté et de sous-alimentation de nombreux pays en développement. Respecter la souveraineté alimentaire des pays tiers et ne plus porter atteinte à leur sécurité alimentaire font partie des défis essentiels à relever.

C’est de ces enjeux internationaux de la PAC après 2013 que traite le présent article. Il constitue la version originale, plus complète, d’une contribution à une recherche collective menée à la demande du « Mouvement européen pour la souveraineté alimentaire et une nouvelle PAC »*. L’étude rappelle les enjeux et formule un ensemble de propositions susceptibles de refonder la PAC sur les objectifs d’une agriculture réellement durable et sur la souveraineté alimentaire.

Selon la Banque mondiale, 1,4 milliard de personnes vivent avec moins de 1,25 dollar par jour[Voir le site Internet de la Banque mondiale à la page suivante, consultée le 2 avril 2010 : [http://web.worldbank.org/WBSITE/EXTERNAL/ACCUEILEXTN/NEWSFRENCH/0,,contentMDK:20486990~pagePK:64257043~piPK:437376~theSitePK:1074931,00.html.

]]. La FAO estime quant à elle à 1,02 milliard le nombre d’individus sous-alimentés[[C’est-à-dire souffrant de la faim presque tous les jours.

]] en 2009 (FAO, 2009a), dont une centaine de millions de victimes de la faim supplémentaires recensées en une seule année à la suite de la flambée des prix agricoles internationaux de 2007-08. Toujours selon la FAO, parmi ce milliard d’individus sous-alimentés en 2009, 642 millions vivent en Asie-Pacifique (région la plus peuplée au monde), 265 millions en Afrique subsaharienne, 53 millions en Amérique latine et Caraïbes, 42 millions dans le Proche-Orient et en Afrique du Nord et 15 millions dans les pays développés. La faim affecte donc principalement les PED (Pays En Développement) et en premier lieu l’Afrique subsaharienne, où une personne sur trois est concernée (FAO, 2009b). En outre, elle touche surtout les ruraux. Ceux-ci représentent entre 70 et 80 %, selon les sources, des sous-alimentés[[Voir par exemple Mazoyer M. (2008).

]]. Quant aux autres 20 à 30 %, il s’agit en partie de ruraux ayant migré vers les villes dans l’espoir d’une vie meilleure. Cette forte proportion de ruraux parmi les victimes de la faim n’est pas surprenante : les économies nationales et les populations de la plupart des PED, et en particulier des plus pauvres d’entre eux, sont très dépendantes de l’agriculture. À titre d’exemple, d’après le PNUD (Programme des Nations Unies pour le Développement), l’agriculture compte pour 30 à 60 % du PIB des PMA (Pays les Moins Avancés) et y fournit la majeure partie des emplois (fréquemment jusqu’à 70%) (PNUD, 2007).

Ces données indicatives montrent combien l’éradication de l’extrême pauvreté et de la faim repose en bonne partie sur l’amélioration des conditions de vie des paysans et travailleurs agricoles des PED. Cette amélioration suppose des mesures multiples à l’échelle de politiques diverses (agricoles, économiques, commerciales, foncières, énergétiques, de développement, de concurrence…) adoptées dans les instances internationales, régionales et nationales compétentes. Au-delà de leur diversité, ces mesures présentent un dénominateur commun. En l’occurrence: la prise en compte des intérêts légitimes et le respect des droits fondamentaux des paysans et travailleurs agricoles, intérêts et droits le plus souvent négligés. Cette nécessaire remise en cause des politiques relevantes vaut notamment pour l’Union Européenne.

1. Une responsabilité multiple

Diverses politiques européennes contribuent en effet à la sous-alimentation et à la précarité des conditions de vie des populations rurales du monde en développement. La PAC est l’une de ces politiques, bien qu’elle ne soit pas nécessairement celle qui porte le plus gravement préjudice à l’agriculture des pays en développement. Des problèmes autres que ceux relatifs à la PAC doivent aussi être pris en compte, parmi lesquels:

  • La libéralisation des frontières (remise en cause des outils de protection à l’importation) prônée par l’UE dans le cadre des programmes d’ajustement structurel de la Banque Mondiale et du FMI, de l’OMC et des accords bilatéraux. Cette libéralisation a ouvert les portes des PED aux importations à bas prix (subventionnées ou non) venues d’Europe, d’Asie et des États-Unis. Elle contribue fortement aux poussées soudaines d’importations (accroissements inhabituellement élevés des volumes d’importations, combinés à de fortes baisses de prix des produits importés), dont les conséquences s’avèrent dramatiques pour les populations locales. En soumettant les denrées produites localement à une concurrence insoutenable, ces poussées d’importations à bas prix appauvrissent considérablement les agriculteurs et travailleurs agricoles. Elles engendrent le déclin des prix et des revenus agricoles, la destruction des modes de vie traditionnels des petits exploitants, le déplacement des agriculteurs et un chômage rural massif. Par ailleurs, en s’accompagnant d’un déclin significatif de la production alimentaire nationale de nombreux PED, les poussées soudaines d’importations contribuent à accroître fortement leur déficit alimentaire et donc à les rendre encore plus dépendants des importations. Elles participent en outre à leur endettement en alourdissant les dépenses que ces pays doivent consentir pour financer les importations. Le phénomène est loin d’être anecdotique: entre 1984 et 2000, 17 PED enregistraient à eux seuls 767 poussées soudaines d’importation.[[Voir Glipo A. (2006). Ces pays sont les suivants: Bangladesh, Bénin, Burkina Faso, Cap-Vert, Côte d’Ivoire, République Dominicaine, Guinée, Haïti, Honduras, Jamaïque, Madagascar, Mali, Mauritanie, Maroc, Niger, Pérou, Philippines.

]]

  • L’absence de régulation efficace des pratiques d’approvisionnement de l’industrie de transformation agroalimentaire et plus encore du secteur de la grande distribution. L’immense pouvoir de marché détenu par ces acteurs leur permet par exemple de s’approvisionner à très bas prix: des prix chroniquement inférieurs aux coûts de production des paysans d’Europe et des pays tiers, et qui contribuent à de bas salaires pour les travailleurs des grandes plantations industrielles. Il leur permet également d’imposer aux fournisseurs des normes et standards de production aux exigences excessives, inadaptées aux modes de production paysans.
  • La croissance de la demande européenne en agrocarburants. D’une part, celle-ci a joué un rôle dans la flambée des prix agricoles internationaux de 2007-2008[[Voir, par exemple, De La Torre Ugarte D., Murphy S. (2008).

]] et pourrait contribuer à l’avenir à de nouvelles fortes hausses[[Voir, par exemple, Koning N., Löffler H., Louwaars N. (2010).

]]. D’autre part, les importations européennes de cultures destinées à la production ou l’utilisation d’agrocarburants ne sont pas conditionnées au respect de critères suffisamment exigeants en matière de durabilité écologique, économique et sociale dans les pays exportateurs. Cela encourage les pays concernés à investir dans leur production de manière non durable (déforestation, réquisition de terres au détriment des paysans…).

  • L’aide de l’UE aux PED, qui n’est pas assez ciblée sur la pauvreté et les besoins des petits paysans, et qui est mal coordonnée.[[Practical Action, Terra Nuova et Vredeseilanden (2008). Ce texte est le document de référence de « l’Exercice de suivi par des organisations de la société civile européenne » (OSC)  de l’initiative AAA (Advancing African Agriculture) de l’UE. Ce document analyse les diverses voies par lesquelles les activités de l’UE affectent l’agriculture en Afrique. Voir aussi Lines T. (2009) pour d’autres éléments à prendre en compte au regard des impacts des activités de l’UE sur l’agriculture du monde en développement.

]]

En ce qui concerne la PAC, la contribution de l’UE à la faim et à l’extrême pauvreté dans le monde en développement réside principalement dans le dumping agricole que cette politique engendre.[[D’autres aspects de la PAC sont en cause, dont la politique d’assèchement des stocks délibérément menée depuis 2003, qui a aussi contribué à l’augmentation des prix de 2007-08. Voir Boussard J.M., Gérard, F., et Piketty, M.G. (2003).

]]

2. Qu’est-ce que le dumping économique à l’exportation et quelle en est l’origine ?

Au sens économique du terme, le dumping à l’exportation désigne l’exportation d’un bien à un prix inférieur aux coûts de production.

Cette pratique n’est évidemment pas rentable sans l’octroi de subventions compensant la différence entre le prix de vente à l’exportation du bien considéré et son coût de production (supérieur). Pour autant, considérer ces subventions comme leur « cause » à proprement parler serait simpliste et réducteur. Car aujourd’hui, l’octroi des aides bénéficiant aux volumes de biens exportés est de moins en moins déclenché pour soutenir spécifiquement la vente à l’exportation. Les aides sont de plus en plus allouées pour compenser la faiblesse des prix de vente, sur le marché intérieur, au regard de coûts élevés de production[[D’autres impératifs peuvent bien entendu encore les déclencher, tels que le respect de critères environnementaux de production, par exemple.

]]. Or ces bas prix ont eux-mêmes une origine : l’absence de politique domestique efficace de gestion de l’offre (adaptation de l’offre à la demande) visant précisément à garantir sur le marché intérieur des prix plus stables et rémunérateurs aux producteurs locaux. Autrement dit, le dumping économique à l’exportation doit moins son émergence à la seule existence de subventions qu’à une politique agricole prise dans son ensemble, caractérisée par :

  • (1) Des prix inférieurs aux coûts de production sur le marché intérieur, conséquence de l’absence de systèmes efficaces de gestion de l’offre à l’échelle de ce marché ;
  • (2) L’octroi d’aides aux producteurs domestiques pour compenser la différence entre ces prix et les coûts de production ;
  • (3) L’absence d’une interdiction d’exporter des volumes bénéficiant directement ou indirectement de subventions lorsqu’aucune mesure n’est prise dans le même temps pour éviter tout effet de dumping sur les marchés internationaux[[À contrario, éviter tout effet de dumping sur les marchés internationaux de volumes bénéficiant de subventions directes et/ou indirectes peut consister à leur imposer des taxes (variables) à l’exportation suffisamment élevées pour annihiler l’avantage concurrentiel induit par l’octroi de subventions.

]].

3. Quels en sont les principaux effets ?

Les pratiques de dumping économique à l’exportation engendrent deux types de conséquences sur le marché du pays importateur :

  • La baisse des prix de vente. Cette baisse procède à la fois par :
  • Un effet de « contamination » des prix intérieurs par les bas prix des exportations qui sont soutenues par la politique de dumping. De manière générale, plus le dumping accorde un avantage concurrentiel important à ces exportations, plus celles-ci ont un effet dépréciateur sur les prix intérieurs du pays importateur. Quand le pays responsable du dumping est un acteur majeur du marché, il est « faiseur de prix » (price maker) : son influence est telle qu’il parvient à déterminer les prix, ce qui accentue davantage encore leur baisse ;
  • Une croissance du ratio offre/demande découlant de la présence sur le marché de référence d’une offre « artificielle » : une offre qui sans être soutenue par une politique de dumping, serait économiquement non rentable et n’aurait donc pas lieu d’être.
  • Une perte de débouchés potentielle pour tous les producteurs (locaux et étrangers) qui ne bénéficient pas de la politique de dumping.

En fournissant des « aliments à bas prix » (au moins à court terme), le dumping économique à l’exportation est une subvention directe allouée par les contribuables européens (dans le cas du dumping agricole de l’UE) aux pauvres des PED, essentiellement ceux qui vivent en zones urbaines. Cela le rend très confortable pour les gouvernements des pays concernés, au point même d’en rendre la suppression difficile[[Voir, par exemple, la thèse de A. Diarra, (Diarra, 2010).

]]. Mais à long terme, il est très préjudiciable aux populations des pays importateurs, non seulement parce qu’il prive les producteurs locaux de débouchés et donc de moyens de subsistance, mais aussi parce qu’il empêche la création de filières alimentaires dans des pays qui, selon tout bon sens, devraient avoir un avantage comparatif important à produire eux-mêmes certaines des denrées qu’ils importent. En outre, il contribue aux poussées des importations[[On peut penser des pratiques de dumping économique à l’exportation qu’elles ne constituent en général pas le facteur déclenchant des poussées soudaines d’importation. Car ce qui déclenche ces poussées est soudain. Or ces pratiques affectent plus de manière permanente et sur le long terme certaines relations commerciales qu’elles ne surgissent de manière soudaine. Mais dans la mesure où elles favorisent grandement les importations à bas prix dans les pays concernés, elles y contribuent de manière manifeste.

]].

Cela dit, le dumping économique à l’exportation ne ruine pas nécessairement les producteurs domestiques. La mesure dans laquelle cela arrive ou non dépend surtout de l’existence ou de l’absence d’une protection efficace à l’importation dans le pays ou la région importatrice. Celle-ci peut théoriquement prendre plusieurs formes, éventuellement complémentaires : barrières douanières, contingents à l’importation, subventions aux producteurs locaux… Là où cette protection existe, des drames peuvent être évités et les politiques de dumping à l’exportation peuvent même s’avérer relativement bénéfiques, comme le montre l’exemple des importations égyptiennes de blé européen (voir encadré). En dernière instance, les impacts socio-économiques engendrés par ces politiques doivent donc être évalués au cas par cas: ce qui vaut pour un contexte donné ne vaut pas forcément pour l’autre. Dans la pratique, cependant, ces impacts s’avèrent souvent très néfastes pour les populations : compte tenu de la libéralisation du commerce international et en particulier de l’ouverture des frontières, l’indispensable protection à l’importation requise pour éviter les catastrophes fait le plus souvent défaut. Les pays les plus pauvres sont dans ce contexte les plus vulnérables, entre autres parce qu’à la différence des pays développés, ils ne sont pas en mesure de subventionner de manière significative leurs propres producteurs.

Importations égyptiennes de blé européen: plutôt bénéfiques pour l’Égypte

Le pain joue un rôle central dans l’alimentation de la population égyptienne. Un Égyptien en mange chaque jour environ 400 grammes en moyenne. Le blé est donc un produit de base très stratégique pour l’Égypte. Or, la production locale est largement insuffisante pour couvrir ces besoins. La surface agricole du pays est limitée (vallée du Nil) et les rendements sont déjà élevés (parmi les meilleurs au monde). L’Égypte est donc contrainte d’importer une grande part du blé qu’elle utilise, soit plus de 65 % des 13 millions de tonnes consommées chaque année par ses 76 millions d’habitants (2003)[Voir Buccianti (2010) à [http://www.rfi.fr/actufr/articles/100/article_65139.asp (Radio France International).

]]. En l’absence de mesures efficaces de protection à l’importation, les producteurs locaux risqueraient de ne pas résister à la concurrence d’importations à bas prix subventionnées en provenance d’Europe. Mais le gouvernement a pris des initiatives visant à les protéger des effets potentiellement destructeurs de ces importations. Une politique stricte de contrôle des prix a été mise en place il y a des années. Les importations sont gérées par un organisme public, le blé est acheté aux producteurs locaux à un prix élevé et la vente du pain aux populations pauvres est subventionnée. Dans ce cadre, le dumping économique à l’exportation de blé de l’UE a des effets plutôt positifs pour l’Égypte: le pays réduit sa facture alimentaire tout en préservant le revenu de ses paysans (Hermelin, 2008).

Notons enfin que les préjudices induits par les politiques de dumping ne surviennent pas seulement à l’extérieur des pays ou régions qui en sont responsables. Des préjudices divers induits par ces politiques à l’échelle de producteurs étrangers peuvent aussi survenir sur le marché intérieur de ces pays ou régions. En privilégiant le maintien de bas prix intérieurs compensés par des aides, l’UE accorde à ses propres productions et sur son propre marché un avantage comparatif important sur certaines denrées importées, notamment en provenance des PED. Cela peut freiner l’accès de ces denrées au marché européen.

Cela étant, la condamnation des préjudices induits sur le marché intérieur des pays ou régions responsables du dumping paraît plus délicate. L’essor des agricultures et des économies nationales des PED passe-t-il prioritairement par l’accroissement des échanges agricoles et alimentaires internationaux ? N’implique-t-il pas plutôt le développement d’une production agricole et alimentaire diversifiée destinée à approvisionner les marchés locaux ? Les marchés internationaux peuvent-ils légitimement prétendre être davantage que des marchés résiduels ?[[La priorité à l’approvisionnement des marchés intérieurs n’empêche pas qu’à l’échelle de certains produits d’exportation aujourd’hui très stratégiques pour les économies des pays les plus pauvres, l’octroi de débouchés privilégiés sur le marché européen fasse sens dans le cadre d’accords préférentiels bien régulés, respectueux des droits et intérêts légitimes des producteurs et citoyens européens. Compte tenu de la forte dépendance actuelle de ces économies aux marchés internationaux, l’UE dispose là d’une marge de manœuvre positive pour améliorer la situation socio-économique de ces pays. Mais l’essentiel ne reste-t-il pas de réduire cette dépendance ?

]]

4. La légalisation du dumping agricole de l’UE

Depuis des années, beaucoup d’organisations agricoles du Sud, ONG de développement et représentants politiques de pays pauvres, mais aussi quelques organisations agricoles du Nord[[Principalement celles affiliées à la Coordination Européenne Via Campesina.

]] accusent le dumping agricole de l’UE d’être responsable d’une destruction des moyens de subsistance des paysans des PED. La Commission européenne (CE) rejette ces accusations. Dans un communiqué daté du 20 juin 2008, elle affirme : « Dans le passé nous avons souvent produit des quantités excédentaires à haut prix pour les exporter ensuite au moyen de généreuses subventions à l’exportation. Cependant, les temps ont changé. (…) Ces subventions sont de moins en moins nécessaires car nos prix sont maintenant alignés sur les prix du marché mondial. (…) 90 % de nos paiements directs sont classés par l’OMC comme non générateurs de distorsions commerciales » (CE, 2008a)[[Notons que l’affirmation selon laquelle 90 % des paiements directs de la PAC seraient classés par l’OMC comme non générateurs de distorsions commerciales, est incorrecte. Si la Commission a bel et bien notifié les DPU (Droits à Paiement Unique – aides découplées) dans la « boîte verte » pour 2005-06 et 2006-07, l’OMC n’a jamais cautionné cette notification.

]]. En le décortiquant, le raisonnement de la Commission pourrait être résumé comme s’appuyant sur l’argumentaire suivant :

  • (1) Les réformes successives de la PAC introduites depuis 1992 ont opéré le passage progressif d’une politique de soutien aux revenus agricoles par les prix (prix minima, garantis par les mécanismes de l’intervention et des restitutions à l’exportation) à une politique de soutien par des aides directes (baisses des prix d’intervention et versement d’aides compensatoires). Des aides aujourd’hui dans leur grande majorité « découplées » (supposées être indépendantes de l’évolution des prix de l’année en cours et des quantités produites) ;
  • (2) La baisse des prix d’intervention a entraîné mécaniquement celle des restitutions ;
  • (3) Le régime d’aides de la PAC n’est donc pratiquement plus distorsif des échanges au sens où l’OMC conçoit les aides « distorsives » (encadré). Car les aides de la catégorie « subventions à l’exportation », de la boîte orange et de la boîte bleue ont été majoritairement transférées dans la boîte verte ;
  • (4) Les mêmes réformes ont permis de réduire considérablement l’écart entre les prix intérieurs européens et les prix internationaux. À terme, cet écart sera nul, de sorte que l’UE n’exportera plus jamais à des prix inférieurs à ceux de son marché intérieur ;
  • (5) Or, au sens où le définit l’OMC, le dumping à l’exportation est l’exportation d’un bien à des prix inférieurs, non pas aux coûts de production, mais aux prix du marché intérieur[[Plus précisément, la définition du dumping retenue par l’OMC figure dans l’Article 6, §1, de l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) de 1947, comme « l’introduction des produits d’un pays sur le marché d’un autre pays à un prix inférieur à sa valeur normale ». Et il est considéré comme inférieur à sa valeur normale « si le prix de ce produit est (a) inférieur au prix comparable pratiqué au cours d’opérations commerciales normales pour un produit similaire, destiné à la consommation dans le pays exportateur; (b) ou, en l’absence d’un tel prix sur le marché intérieur de ce dernier pays, si le prix du produit exporté est (i) inférieur au prix comparable le plus élevé pour l’exportation d’un produit similaire vers un pays tiers au cours d’opérations commerciales normales, (ii) ou inférieur au coût de production de ce produit dans le pays d’origine, plus un supplément raisonnable pour les frais de vente et le bénéfice ».

]] ;

  • (6) Le dumping économique à l’exportation de l’UE appartient donc essentiellement au passé. En 2013, il aura complètement disparu[[Lors de la sixième Conférence ministérielle de l’OMC à Hong Kong, en 2005, la Commission s’est engagée à mettre un terme à l’ensemble de ses aides à l’exportation.

]].

Subventions à l’exportation et soutiens internes à l’OMC[[Sources de l’encadré : Parmentier, Bailly. (2005) ; Berthelot, (2010c).

]]

En matière de subventions et soutiens, l’OMC distingue quatre grandes catégories selon le degré de distorsion des échanges, qu’elle ne soumet pas aux mêmes traitements et obligations :

  • Les subventions à l’exportation. Spécifiquement destinées à soutenir les exportations, elles sont considérées comme les plus distorsives des échanges. Elles sont proscrites par l’OMC, à l’exception de celles spécifiées sur des listes d’engagements des Etats-membres, pour lesquelles ceux-ci sont tenus de réduire progressivement les montants des dépenses effectuées à cet effet, ainsi que les quantités d’exportations subventionnées. Les pays développés se sont ainsi engagés à réduire de 36 % ces aides à l’exportation et de 21 % les quantités exportées, le tout pendant six ans, à savoir de 1995 à 2000. Pour les PED non PMA, ces réductions sont respectivement de 24 % et 14 %, pendant une période de dix ans, soit de 1995 à 2004. Les PMA ne sont quant à eux soumis à aucune réduction.
  • Les soutiens de la « boîte orange » ou, plus exactement, de la « MGS (mesure globale de soutien) »[[La dénomination commune des diverses catégories de soutiens internes en boîtes de couleur (respectivement orange, bleue et verte) ne figure explicitement nulle part dans les textes officiels.

]]. Ces soutiens, qui n’englobent pas seulement des subventions mais aussi des « soutiens des prix du marché », sont « couplés », c’est-à-dire liés aux quantités, produites ou utilisées comme intrants, ou aux prix de l’année en cours. L’OMC considère qu’ils entraînent une distorsion des échanges au sens où ils favorisent une surproduction et subventionnent indirectement la production exportée ou réduisent les importations. Ces soutiens ont été astreints à réduction par rapport à leur niveau autorisé d’une période de base. Pour l’Uruguay Round, la période de base était 1986-88. La réduction a été de 20 % pour les pays développés de 1995 à 2000 et de 13,3 % de 1995 à 2004 pour les PED non PMA. Pour le Doha Round, s’il est finalisé, la période de base est 1995-2000 pour les pays développés et 1995-2004 pour les PED non PMA. La réduction serait de 70 % pour l’UE, 60% pour les EU et 30 % pour les PED non PMA. Néanmoins, tant que la MGS calculée spécifique par produit est inférieure à 5 % de la valeur du produit pour les pays développés (10 % pour les PED non PMA), ou que la MGS non spécifique à un produit est inférieure à 5 % de la valeur de la production totale (10 % pour les PED non PMA), on ne les inclut pas dans la MGS à notifier. Dans tous les cas, les PMA ne sont pas concernés.

  • Les subventions de la « boîte bleue ». Elles correspondent à des aides partiellement découplées car fonction des superficies, rendements ou têtes de bétail de la période 1986-92 et qui sont considérées de ce fait comme limitant la production. Dans le Doha Round, la boîte bleue est toutefois considérée comme couplée. Elle fait en effet partie du « SGEDE (soutien interne global ayant des effets de distorsion des échanges) », qui outre la boîte bleue englobe la MGS et les deux soutiens de minimis (spécifique par produit et autre que par produit). Dans le cas de l’UE, le SGEDE doit être réduit de 80 % par rapport au niveau autorisé de 1995-2000.
  • Les subventions de la « boîte verte ». Ce sont les aides agricoles considérées par l’OMC comme n’induisant aucun effet de distorsion des échanges ou un effet minime. Il s’agit notamment des subventions dites « découplées », qui consistent en un soutien direct du revenu de l’agriculteur qui n’est pas lié, ni aux quantités produites, ni aux prix en vigueur sur le marché. Il peut aussi s’agir de subventions visant à protéger l’environnement ou à soutenir des programmes de développement régional. Les subventions de la boîte verte sont pour l’instant autorisées sans restriction.

Combinées à la manière dont l’OMC conçoit les aides agricoles et le dumping économique à l’exportation, les réformes successives de la PAC depuis 1992 ont eu pour effet de légaliser pour l’essentiel les pratiques de dumping agricole de l’UE[[Pour une explication plus approfondie de la manière dont l’UE a dans une certaine mesure légalisé ses pratiques de dumping économique à l’exportation, voir par exemple Berthelot J. (2005).

]].

5. Le dumping agricole généralisé de l’UE

L’UE exploite massivement cette ouverture. Etant donné les règles du commerce international, les dernières réformes de la PAC n’ont pas réduit mais pérennisé son dumping agricole. Le budget consacré aux restitutions a fortement diminué, certes, passant d’environ 10 milliards d’Euros en 1991 (CE, 2008b) à 926 millions d’Euros seulement en 2008 (Berthelot, 2010b). Mais cette baisse n’a rien changé à l’ampleur du dumping : tout au long de ces années, la plupart des volumes de produits agricoles exportés par l’UE l’ont été à des prix très inférieurs à leurs coûts de production moyens (Berthelot, 2006a). Simplement, sur l’ensemble de toutes les subventions directes et indirectes bénéficiant aux productions exportées (incluant les subventions aux aliments du bétail), la proportion des restitutions a globalement décru considérablement.

Évolution et répartition des dépenses liées à la PAC left>(Commission européenne, mai 2008)

Au cours des 15, 20 dernières années, le dumping agricole de l’UE a notamment concerné les céréales (dont le blé) et les produits à base de céréales, le lait et les produits laitiers, le sucre, la viande de volaille ou encore la viande bovine. En voici trois exemples :

  • Les exportations de céréales entre 1995-96 et 2001-02 ont été soutenues à hauteur de 2,15 milliards d’Euros de subventions totales en moyenne chaque année, dont 1,673 milliard d’Euros de subventions internes, soit 3,5 fois plus que les 477 millions d’Euros de restitutions. La valeur moyenne annuelle des céréales exportées ayant été de 2,956 milliards d’Euros au cours de la même période, le taux de dumping moyen a été de 72,7 % (Berthelot, 2006a)[[Le taux de dumping moyen correspond ici au ratio entre d’une part la valeur des subventions totales aux productions exportées et, d’autre part, la valeur totale des productions exportées. Soit, dans cet exemple : 2,15 milliards d’Euros / 2,956 milliards d’Euros.

]]. En 2006, le taux de dumping moyen des céréales exportées a été de 61,3 % (Berthelot, 2010b) ;

  • Les exportations de produits laitiers entre 1995-96 et 2001-02 ont été soutenues à hauteur de 2,751 milliards d’Euros en moyenne chaque année, dont 38,2 % de subventions internes. La valeur moyenne annuelle des produits laitiers exportés ayant été de 4,703 milliards d’Euros, le taux de dumping moyen au cours de cette période a été de 58,5 % (Berthelot, 2006c) ;
  • Les exportations de viande bovine entre 1995-96 et 2001-02 ont été soutenues à hauteur de 1,797 milliards d’Euros en moyenne chaque année, dont 52,2 % de subventions internes. La valeur moyenne annuelle des exportations de viandes bovine ayant été de 1,026 milliard d’Euros, le taux de dumping moyen au cours de cette période a été de 175,2 % (Berthelot, 2006b)[[En moyenne chaque année durant cette période, les subventions totales bénéficiant aux exportations concernées ont donc été supérieures de 771 millions d’Euros à la valeur même du produit sur les marchés internationaux.

]].

Les PED ont été des destinations privilégiées pour les exportations européennes à bas prix, comme l’atteste l’analyse des données statistiques d’exportations de l’UE-15 fournies par Comext (Eurostat). A titre d’exemples, au cours de la période 1991-2006, ces pays et en particulier ceux d’Afrique et du Moyen-Orient ont été des marchés très importants pour les exportations européennes de lait en poudre, de sucre et de blé. En 2006, les PED ont ainsi absorbé plus de la moitié des volumes d’exportations totales européennes de ces trois produits. Pour le lait en poudre, l’Afrique saharienne est devenue le premier partenaire de l’UE, avec des exportations européennes qui n’ont cessé de croître alors qu’elles diminuaient vers les autres régions du monde. Au cours de la même période, les PED sont également devenus les premiers débouchés en volumes pour les farines européennes, avec une croissance des exportations de l’UE-15 là encore tirée par l’Afrique subsaharienne. Les volumes d’exportations européennes d’oignons à destination des PED ont quant à eux été multipliés par entre 3 et 5 alors que ceux à destination des pays riches stagnaient (Mosnier, 2008).

Les conséquences du dumping agricole de l’UE en Afrique et notamment en Afrique subsaharienne (dont l’Europe agricole a longtemps été le premier fournisseur) ont souvent été dramatiques. Sur les marchés côtiers de la Côte d’Ivoire, du Ghana ou du Nigéria, les tonnes de bœufs dont les européens voulaient se débarrasser au début des années 2000 (crise de la vache folle), ont fortement déstabilisé les filières locales approvisionnées par les éleveurs du Mali, du Niger ou du Burkina. Les exportations à bas prix de concentré de tomate italien ont précipité la faillite de nombreuses entreprises ghanéennes de transformation (Hermelin, 2008). En 2005, au Burkina Faso, les importations massives de lait en poudre provenant notamment d’Europe ont fait obstacle au développement de la filière laitière locale. A l’époque, pour les laiteries burkinabè, produire un litre de lait revenait à 300 francs CFA à partir de lait local, contre seulement 200 francs CFA à partir de poudre de lait importée (Estival et Boubacar, 2006). Au Sénégal, les ventes de lait en poudre dans les années 2000 ont contraint la multinationale Nestlé à renoncer à ses projets de création d’une filière lait locale (Diarra, 2010). Au Cameroun, en 2003, les importations à bas prix de poulet congelé provenant majoritairement d’Europe (Espagne, Belgique, France, Pays-Bas, …) ont occasionné dans l’ensemble de la filière locale une perte totale estimée à 110.000 emplois, en majorité des emplois ruraux (éleveurs, agriculteurs) mais aussi urbains (plumeurs, commerçants) (Bopda et Njonga, 2004).

En favorisant les poussées soudaines d’importations dans plusieurs PED, le dumping agricole de l’UE a aussi contribué à rendre ceux-ci plus dépendants des importations. Or ce sont surtout les pays à faible revenu importateurs nets de produits alimentaires, et en particulier les PMA (où 50 à 80 % en moyenne du revenu des ménages sont dédiés à l’alimentation), qui ont le plus souffert de l’aggravation de la crise alimentaire (CNUCED, 2008).

6. Développement récents

Le dumping agricole de l’UE demeure aujourd’hui massif et il porte sans nul doute une part de responsabilité dans la crise alimentaire et son aggravation. Dans le même temps, deux évolutions récentes suggèrent que l’ampleur de la concurrence insoutenable qu’il continue d’exercer dans nombre de pays pauvres doit être relativisée s’agissant des dernières années :

  • L’explosion des prix agricoles internationaux de 2007-08 a entraîné une réduction provisoire de la concurrence des importations dans ces pays (en provenance d’Europe et d’ailleurs). Elle peut d’ailleurs offrir quelques opportunités de relance de filières de production locales par endroits. Mais pour combien de temps ?
  • L’UE a perdu des parts de marché au profit d’autres poids lourds du commerce agricole international plus compétitifs qu’elle, incluant le Brésil et l’Argentine. L’Europe est concurrencée par le Brésil sur le marché, par exemple, de la découpe de volaille. Celle-ci est moins chère à élever dans ce pays où les céréales et le soja, constituants de l’alimentation animale, sont abondants et bon marché et où la main-d’œuvre est nettement moins payée. L’Europe a aussi perdu des plumes sur le marché sénégalais des importations d’huiles de colza. Alors qu’elle détenait en 2000 les trois-quarts de ce marché, le Brésil en détenait plus de 90 % en 2005. Autre illustration, l’Argentine devance désormais les exportations européennes de blé au Congo (Hermelin, 2008). Cela dit, la présence de l’Europe agricole dans le monde en développement et notamment en Afrique reste importante. Sur la période 2005-07, par exemple, 14 % des importations agricoles et alimentaires totales de la CEDEAO (Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest) viennent d’Europe. Des importations souvent concurrentes des filières ouest-africaines (CTA, 2009). Par ailleurs, à supposer qu’elle se conclue, la négociation d’APE (Accords de Partenariat Économique) devrait logiquement renforcer les exportations européennes dans l’ensemble des pays ACP.

7. La nécessité d’une prise de responsabilités globale de l’UE incluant la fin du dumping agricole

Éradiquer la pauvreté, la faim et nourrir convenablement 9 milliards d’individus en 2050 est possible. Mais pour ce faire, un changement de cap radical est nécessaire à l’échelle de toutes les politiques internationales, régionales et nationales ayant des incidences directes ou indirectes sur le secteur agricole et alimentaire. Opérer ce changement consiste à mettre au cœur de ces politiques l’objectif prioritaire, dans le cadre de la Souveraineté Alimentaire, du maintien et du développement d’agricultures paysannes durables, fondées de manière croissante sur les pratiques de l’agro-écologie[En avril 2008, près de soixante gouvernements signaient le rapport sur l’« Evaluation internationale des connaissances, des sciences et des technologies agricoles pour le développement (IAASTD) ». Réalisé par quatre cents chercheurs du monde entier, ce rapport pluridisciplinaire appelle à réorienter et à augmenter le financement d’une révolution agricole écologique. Cinq agences de l’ONU ont été impliquées : l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) et l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Pour une synthèse du rapport : [www.agassessment.org

]].

Garantir ce maintien et ce développement implique que tous les acteurs de la société, dans le monde développé et en développement, prennent en ce sens leurs responsabilités. Cela implique notamment la reconnaissance par l’UE, dans le cadre des politiques de la Banque mondiale et du FMI, de l’OMC et des accords bilatéraux (incluant les APE), du droit à la protection à l’importation. Pour protéger leurs populations des effets potentiellement destructeurs des importations à bas prix (subventionnées ou non), les pays en développement doivent pouvoir utiliser les outils nécessaires, incluant des droits de douane variables et des contingents aux importations (deux outils financièrement accessibles aux pays les plus pauvres). Corollairement, l’UE doit mettre un terme au dumping agricole dont sa PAC continue à être responsable. La mise en place de systèmes efficaces de gestion de l’offre, fondés sur un contrôle public de la production et sur une protection variable aux frontières, y contribuerait largement. Elle mettrait essentiellement fin aux conséquences préjudiciables exercées par les exportations européennes à bas prix dans les PED, tout en garantissant des prix plus stables et rémunérateurs aux producteurs européens.

Sur le plan international, en tant qu’acteur majeur du commerce mondial, l’UE a un rôle fondamental à jouer dans la remise en cause, plus que jamais nécessaire, de la logique de Marrakech qui est à l’origine de l’OMC. Les traditionnels outils de régulation des marchés constituent autant de moyens sans lesquels la définition souveraine et la poursuite d’objectifs de développement durable, dont l’élimination de la pauvreté et la concrétisation du droit à l’alimentation, n’ont aucun sens. En organisant leur démantèlement, la libéralisation prive les pays et groupes régionaux de cette indispensable marge de manœuvre. Au contraire, ces pays et groupes régionaux doivent pouvoir définir leurs propres politiques, notamment agricoles et alimentaires. En lieu et place de la libéralisation et dérégulation des marchés, l’UE doit défendre et respecter la souveraineté alimentaire.

RÉFÉRENCES

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