Un texte de Lucien Kroll, architecte-urbaniste, chercheur-associé à Etopia
Ugo Sasso est décédé fin janvier. Il était originaire des environs de Bari (Pouilles). Il avait étudié l’architecture dans les grandes universités et y avait fréquenté les architectes les plus fins de l’Italie.
Il a été un infatigable promoteur de l’Écologie urbaine en Italie. Avec son associée Wittfrieda Mitterer ils ont fondé la INBAR,(Istituto Nazionale de Bioarchitettura), une association installée depuis les années ’90, à Bolzano (Bozen) la région germanophone italienne : sans doute étaient-ils plus proches de l’Autriche et de l’Allemagne et ont pu ainsi devenir des précurseurs. Ils ont sans cesse sillonné l’Italie et l’étranger et organisé un nombre incroyable de colloques, conférences, séminaires, foires et expositions et fondé quelques cours pos-tuniversitaires : le dernier s’est installé à Rome à l’Université LUMSA et forme des post-étudiants venus de toute l’Italie.
Il a eu une production littéraire énorme, dans toutes les maisons italiennes d’éditions spécialisées et a fondé une revue « Bioarchitettura » largement diffusée. Sa position était celle d’un architecte qui pense politiquement l’écologie, non comme une simple science, ni une technique de plus, ni un métier nouveau et confortable mais comme une philosophie et un art passionnés qu’il se chargeait de répandre à travers l’Italie. Son objectif était de « retourner » les valeurs habituelles et d’organiser une nouvelle vertu civique et peut-être même de sauver la planète… Trop amical pour être fanatique, il voulait convaincre et y montrait une grande force.
Bon technicien, il ne croyait à la technologie que dans la mesure où celle-ci pouvait aider un humanisme rayonnant et communicatif à se créer lui-même sa propre forme relationnelle et éco-compatible.
Ugo Sasso est le pionnier de la Bioarchitecture en Italie. On lui doit l’idée nouvelle d’un humanisme en architecture qui se caractérise non seulement par la préoccupation envers les ressources naturelles et la santé des habitants mais aussi envers les lieux et la société. Depuis 1986, il collabore avec les plus grands noms du monde du projet écologique. Au cours de nombreuses interventions de récupération et de restauration pour le privé et le public, le premier ensemble écologique italien de, construction sociale publique, projeté en 1994 à Bolzano, (lors du 1er prix ANIACAP ‘02 pour l’innovation). Pour la Province de Florence, il a coordonné la révision dans le sens écologique des Prix pour la Qualité des Bâtiments Provinciaux ; pour la commune de Pesaro, il a coopéré à la définition des normes d’actualisation de la Bioarchitecture ; pour la commune de Rimini, il a rédigé les Lignes du Guide Écologique pour les interventions des constructions du secteur scolaire. Il a donné des conférences et assisté à des entretiens en plus des 150 congrès nationaux et internationaux, entre autres : le 4ème à Dortmund 1995, le 7ème à Aix-la-Chapelle 1998, le 10ème à Vienne 2001 et au 11ème Symposium européen à Bruxelles 2002, organise par les principaux Ministères Européens de Travaux Publics. Il a été envoyé par le gouvernement italien au Style Italien en 2000 à New York. Il a été invité par la France à la Biennale d’Architecture à la Biennale de Venise en 2006, À Barcelone en 2004 au 7ème Congrès International « Une seule Terre ». À la Faculté de la Science Environnementale de l‘Université d’Urbino il a été Coordinateur Scientifique du Cours de Perfectionnement postuniversitaire en Bioarchitecture en 2000 ; la Faculté d’Ingénierie de l’Université de Bologne, il a codirigé en 1999, le Laboratoire de Spécialisation post universitaire de Bioarchitecture . Il a dirigé pour la Libre Université LUMSA de Rome, le cours de spécialisation postuniversitaire pour la Soutenabilité en 2005. Il a été le coauteur des premiers textes italiens sur l’argumentaire, et le coordinateur responsable du « Nouveau Manuel Européen de la Bioarchitecture.
Recherches et publications
Il existe plus de 300 articles scientifiques dans les revues techniques et écologiques ; et la rubrique suivie dans le mensuel Nouvelle Écologie, Vie et Santé ; les premiers textes sur l’argumentation 1992 : Bioarchitecture, un Engagement envers le Projet Écologique ; puis Bioarchitecture, une hypothèse de construction écologique 1995 , l’Environnement Restauré 1999 ; Construction Écologique ; Architecture Bioclimatique – Fondements de géométrie Solaire 2003 ; des interventions sur des ouvrages importants du secteur : entre autres, la trilogie « Construire de l’Environnemental, 2000, 2001 & 2002 ;Construction Résidentielles Publiques Écocompatibles 2002 ; Expériences Innovatives pour la Configuration du Paysage Rural 2003 ; coordination des textes Projeter avec le Soleil et : Qualité, Récupération & Nouveaux Usages avec des interventions des plus grands experts européens 1998 ; Quarante-sept questions à Ugo Sasso ; Isolants oui, Isolants non 2004.avec la présentation de Enzo Tiezzi et Bioarchitettura Forme et Formation, avec la présentation de Fritjof Capra.
Formation
À l’Université d’Urbino 2000, il est Coordinateur Scientifique du Cours de Perfectionnement Postuniversitaire en Bioarchitecture ; À la Faculté d’Ingénerie de l’Université de Bologne, il codirige depuis 1999 le Laboratoire de Spécialisation Postuniversitaire en Bioarchitecture ; à la Libre Université LUMSA de Rome, il est directeur du Cours de Spécialisation Postuniversitaire de la Construction Soutenable 2005 ; il a donné des conférences 2003 & 2004, pour le Master en Architecture Écosoutenable de l’Université de Bologne puis des Interventions et conférences à l’Université de Venise, Naples, Bologne, Urbino, Reggio-Emlia, Ferrara, Firenze, Cornell University NY, Roma, et l’Académie Domus. Il a projeté et coordonné aux Ministères de la Construction des Pays-Bas et du Danemark, et aussi pour l’Assesseur du Land Nordrhein-Westfalen et à la Region Emilia Romagna pour le Projet Européen Energylink.
Napolitain d’origine, c’était un grand, solide interlocuteur, toujours aimable. Il « était » l’écologie italienne.
Avec sa compagne, Wittfrieda Mitterer, ils ont appris l’écologie d’abord d’après les Allemands : ils vivaient à Bozen/Bolzano, région germanophone du Haut-Adige. Ils ont sillonné toute l’Italie et aidé à fonder des associations locales qui, à leur tour essaimaient…
Il possédait tout d’abord, une philosophie pratique très fine qui d’instinct, dévoilait les volontés de pouvoir, les intérêts trop personnels, les ambitions trop individuelles (parfois péniblement…) et encourageait les participations de groupe.
Il m’avait demandé d’accompagner un cours de perfectionnement d’urbanisme et d’architecture soutenable à Reggio Emilia ; une trentaine de professionnels entreprenaient l’étude d’un morceau de quartier « ordinaire » en vue de « l’écologiser »… Je discutais des attitudes et des volontés de chacun et des sous-groupes qui se formaient parfois tumultueusement. À un moment, quelque chose m’a échappé : certains participants entraînaient le groupe vers un projet narcissique d’architectes isolés et, déjà un peu usé par quelques jours de discussions, je n’arrivais plus à convaincre ce mouvement de retrouver son ouverture « empathique » envers la rue qu’ils étudiaient… Je m’en étais ouvert à Ugo : je n’oublierai jamais avec quelle gentillesse et quelle rigueur il a démonté les attitudes et a rétabli « l’innocence » des intentions…
Comme ce n’était pas un goupe d’ingénieurs, à la fin des cours, lorsqu’il s’est séparé, tout le monde, la larme à l’œil, embrassait tout le monde… Écologie.
Nous étions profondément d’accord sur le fond de nos attitudes mais quelques détails nous faisaient discuter des heures : une heureuse séance d’entraînement pour les discussions publiques.
Avec Witta, ils assuraient tout le travail de la revue « Bioarchitettura » qu’INBAR publiait, récrivant tous les articles, choisissant les thèmes et les auteurs… Elle « était la seule de sa nature » : des article sur les techniques « sensibles », des architectes composant avec le contexte, etc. Et surtout soigneusement aucune architecture moderne arrogante… Et ils discutaient ferme avec des éditeurs pas toujours délicats…
Elle continue.