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Le 23 juin 2013, l’Assemblée générale d’Ecolo, réunie à Bruxelles, a adopté le Manifeste politique d’Ecolo. En application de ses statuts, ce Manifeste vient remplacer le précédent texte exprimant les principes fondateurs du mouvement Ecolo[[La Déclaration de Peruwelz-Louvain-la-neuve (1986)]].

Le processus participatif qui a mené à son adoption a duré plusieurs mois. Un texte initial, déposé par les Co-présidents Olivier Deleuze et Emily Hoyos, a été rédigé sur base des travaux du chantier « Redéfinir la prospérité » des Rencontres de l’écologie politique, initiées en 2011[[Les Rencontres de l’Ecologie Politique (2011-2012) furent la grande opération de dialogue avec la société lancée par Ecolo, en vue de renouvellement son programme (voir www.ecologie-politique.be)]]. Ce premier texte a été discuté dans toutes les Régionales et commissions d’Ecolo, ainsi qu’au sein d’ecolo j. Un panel de vingt-cinq citoyens-électeurs s’est par ailleurs réuni pour débattre sur le fond du projet. Et dans la foulée, une « Commission spéciale » désignée par le Conseil de Fédération d’Ecolo a rédigé le texte soumis à amendements par les membres. Ceux-ci ont déposé 500 amendements, négociés pied à pied avec ceux qui avaient la responsabilité de soumettre le texte et ses votes de modifications à l’Assemblée générale. Enfin, cette dernière a délibéré à plus de 700 présents et voté sur une trentaine d’amendements avant d’adopter le texte définitif.

Ce processus inédit a été rendu possible par l’implication de centaines de membres à chacune de ses étapes jusqu’à l’adoption finale. Mais il nous faut en pointer ici l’originalité particulière.

Elle réside tout d’abord dans la mise en œuvre d’une étape préalable à la phase classique d’adoption d’un texte par une Assemblée générale. Ce préliminaire a consisté à créer un large moment délibératif, purement argumentatif, sans enjeu de positionnement politique, sans expression de rapports de force. C’est sur cette base plus informée, plus rationnelle, collectivement plus intelligente, qu’a alors pu démarrer une phase formelle et politique d’arbitrages politiques (rédaction collective d’amendements, débats en Assemblée générale selon des règles très précises, votes, etc.). Cette phase préalable a également eu la vertu d’élargir progressivement le cercle des personnes se sentant concernées par l’enjeu.

Pointons également le fait qu’un panel de citoyens s’est penché sur la version initiale du texte durant deux journées entières. Ainsi, le point de vue des électeurs – et non des seuls militants – a pu être pris en considération dans la délibération préalable.

Enfin, relevons qu’à chaque étape, le texte a été largement réécrit (et amplifié, conséquence sans doute inévitable d’un tel processus[[Ainsi, par exemple, le texte a triplé de volume et a vu sa structure initiale profondément modifiée. Le texte a en effet triplé de volume entre sa version initiale et sa version adoptée après amendement par l’Assemblée générale.
]]), sans que ses auteurs successifs ne puissent d’une quelconque manière s’y accrocher. Ils ont donc en quelque sorte pris le pouvoir sur le texte, puis ont dû le rendre entièrement à la délibération collective.

C’est sans doute cette démarche relativement complexe mais bien articulée qui a permis que 700 personnes adoptent sereinement ce texte et apprécient le moment démocratique de son adoption.

Enfin, mesurons que le moment de cette refondation n’est pas anodin : de nombreux manifestes écologistes émergent depuis le début des années 2010, dans la société. Après le très symptomatique «Indignez-vous» de Stéphane Hessel, Los Indignados, Occupy, les Colibris, Roosevelt 2012, etc., autant de mouvements qui peu à peu s’organisent, endossent la responsabilité de devenir des acteurs du politique et précisent leurs valeurs et objectifs.

Ecolo est certes devenu au fil du temps un parti capable de gouverner, mais son ADN est aussi resté celui d’un mouvement. Ses militants, par leurs implications sociales, sont en phase avec les interrogations contemporaines et « le terrain ». Ecolo, comme parti, reconnaît les nouvelles mobilisations sociales et écologiques, leurs vibrations, leurs énergies. Et s’il a voulu, lui aussi, préciser ses valeurs, c’est pour mieux dialoguer avec la «société civile» et lui proposer une articulation avec le monde politique.

Ces dynamiques civile et politique sont le signe que la transition écologique est en marche à tous les niveaux de l’écosystème des institutions. Par en bas. Par en haut. Confrontées à des freins de même nature et soulevant des espoirs de même ampleur.

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