Dans le domaine délicat des infractions urbanistiques,
un souvenir attendri me revient en mémoire :
Une dame âgée vint me voir, en profonde détresse : elle vient d’être verbalisée, suite aux plaintes des voisins, pour la construction d’une cage haute de 2 mètres érigée au-dessus d’une plate-forme arrière à l’étage supérieur de sa maison. L’édifice réalisé à grands frais et sans permis (l’entrepreneur ayant affirmé que ce n’était pas nécessaire) est destiné aux ébats d’une dizaine de chats qu’elle a recueillis chez elle ; la hauteur de la cage est justifiée par la nécessité de son entretien.
En lui expliquant qu’une telle « chose » aussi inesthétique n’était pas régularisable, compte tenu des exigences urbanistique de protection des intérieurs d’îlots, je comprends vite que cette dame vit un drame. Ses chats sont toute sa raison de vivre. Je propose alors à l’administration une solution de compromis : arguant du fait que la hauteur d’un chat – même avec sa queue en périscope – n’excède pas 50cm, je suggère la pose d’un simple couvercle grillagé amovible, à intégrer discrètement dans les tons de la façade arrière.
L’histoire finit bien : la dame introduisit une demande de permis en bonne et due forme (authentifiée par des plans d’architecte pour un « espace de détente féline » !). Le permis fut octroyé et la situation nouvelle fait le bonheur des chats, comme celui de leur vieille amie, sans plus gêner les voisins.
Tous les faits d’infraction n’ont malheureusement pas une issue si heureuse !
Types d’infractions
Les infractions urbanistiques sont fréquentes et leur contrôle est une tâche difficile et ingrate.
Elles peuvent être de plusieurs types :
- Des travaux exécutés sans demande de permis,
On a vu ces dernières années proliférer la transformation « rapido-presto » de jardinets de façade avant en aires de stationnement (interdite par le Règlement Régional d’Urbanisme et donc non régularisable sauf motif exceptionnel).
Plus récemment s’amorce une pratique de fait accompli de la part de certaines chaînes de magasins, qui se permettent d’ouvrir une nouvelle surface commerciale bien avant que le permis ne soit délivré (préférant assumer le risque d’une amende avec l’éventuelle obligation de transformation de leur vitrine, plutôt que d’attendre la fin de l’instruction de leur demande). - Des travaux ne respectant pas les conditions telles qu’imposées dans le permis délivré.
Le non respect du permis accordé peut aller depuis l’abattage d’arbres à préserver jusqu’à la construction d’un étage supplémentaire (ce qui a motivé jadis, par exemple, l’arrêt d’un important chantier au coin de l’avenue Brugmann et de la rue de l’Echevinage) ; en passant par l’aménagement d’une terrasse, la modification d’une façade ou un changement d’utilisation. - Plus subtile est la démarche qui consiste à introduire une demande de permis pour une « transformation » alors que, dans les faits, c’est à une « démolition-reconstruction » que l’on procède.
Nous en avons vécu quelques exemples récents. L’intérêt n’était pas des moindres : taxe communale de bâtisse et TVA beaucoup moins importantes pour une transformation-rénovation ; possibilité d’obtenir ainsi des autorisations qui n’auraient pas été accordées dans le cas d’une construction nouvelle, en raison des prescriptions du PRAS (Plan Régional d’Affectation du Sol). Sans parler du gain de temps pour l’entrepreneur !
Remarquons qu’une législation régionale nouvelle, entrée en vigueur en mai 2007, réduit l’avantage financier d’une telle pratique : Uccle fait partie des 8 communes bruxelloises pouvant bénéficier d’une TVA réduite à 6% (au lieu de 21%) pour une démolition-reconstruction affectée à du logement.
Beaucoup d’infractions sont commises par ignorance des règles en vigueur.
Une ignorance admissible dans le chef des citoyens mais pas dans celui des architectes et des entrepreneurs. On ne le répétera jamais assez : il est prudent de s’informer au service de l’urbanisme avant toute intention de projet immobilier !
Généralement l’auteur d’une infraction urbanistique verbalisée n’est pas tenté de recommencer. J’ai pourtant rencontré quelques cas de récidivistes incurables !
Contrôle des infractions
Le contrôle des infractions pose problème à la plupart des administrations communales.
Les infractions sont trop nombreuses pour être spontanément remarquées et verbalisées par l’administration communale. Les dénonciations des voisins doivent être reçues avec circonspection car toutes ne sont pas justifiées. Certains contrôleurs sont tentés de fermer les yeux sur certains faits qu’ils estiment sans gravité…
Cela conduit à un regrettable paradoxe : nous avons fait le constat, à Uccle d’une fâcheuse discordance entre l’habitude d’une instruction minutieuse des demandes de permis par les architectes communaux (aboutissant à l’imposition de conditions exigeantes), et un manque récurrent de régularité et de rigueur dans la vérification du respect de ces conditions par le demandeur.
La solution n’était pas dans un recul de nos exigences urbanistiques ;
mais bien dans un renforcement du contrôle par une nouvelle organisation du travail
(qui commence à porter ses fruits à Uccle).