En langage courant le mot « classement » est très simple à comprendre.

Dans la terminologie urbanistique, il y a « classement » et « classement » !

Il y a d’une part des « bâtiments et des sites classés » en raison de leur valeur patrimoniale ; d’autre part des « installations classées » en raison des nuisances potentielles qu’elles représentent pour l’environnement.

Dans l’esprit du public, le mot évoque généralement le premier sens du terme.
Le second n’en est pas moins important.


Patrimoine classé

La protection du patrimoine est régie par une ordonnance régionale spéciale. La démolition ou une modification de l’usage susceptible d’engendrer des dommages sont interdites pour un bien d’intérêt patrimonial classé. Le propriétaire est tenu d’assurer l’entretien d’un bien classé (avec l’octroi d’un subside et d’une déduction fiscale).

La commune d’Uccle est propriétaire de quelques biens classés dont elle la responsabilité d’assumer l’entretien. Une lourde responsabilité en termes d’études et de budget ! Pendant longtemps seul le presbytère du parvis St Pierre fut considéré comme une priorité. Il a fallu attendre des années pour que se concrétise, enfin, les intentions de rénovation de la ferme Rose, du moulin du Nekkersgat et du chemin du Crabbegat (dont les travaux sont loin d’être terminés à l’heure actuelle).

Toute demande de permis pour la transformation d’un bien classé doit être soumise à l’avis de la CRMS (Commission Royale des Monuments et Sites). Il s’agit d’une commission indépendante dont les membres sont désignés par le Gouvernement sur une liste établie par le Parlement. L’avis de celle-ci est « conforme » ce qui signifie qu’il est obligatoire de s’y conformer.

Le parti Ecolo a toujours défendu l’idée qu’un recours devrait être possible contre un avis défavorable de la CRMS ; il l’est désormais et je m’en réjouis.

Une récente modification de l’ordonnance régionale a instauré le « permis unique » (d’urbanisme et de patrimoine) pour les biens classés ou mis sur une « liste de sauvegarde ».

La procédure s’en trouve allongée. Il est à craindre que cela n’introduise un facteur d’insécurité, tant pour les habitants que pour les investisseurs.

La procédure de classement d’un bien est une longue aventure, dont l’issue est incertaine. C’est pour cela que tant de bâtiments de qualité ne bénéficient pas encore d’une protection patrimoniale légale.

La procédure est entamée par le Gouvernement régional, à son initiative ou à celle de la CRMS ; ou encore, moyennant l’aval de la CRMS, à la requête d’un Collège communal, d’une ASBL ou du propriétaire du bien.

J’ai pris l’initiative, en septembre 2005, de proposer au Collège ucclois d’introduire trois demandes de classement : celles des deux maisons les plus remarquables que Jacques Dupuis a construites sur notre commune (la maison Everaert et la maison Bedoret) et celle du vieil estaminet bien connu du Spijtige Duivel. Trois solides dossiers avaient été constitués à cet effet. A la fin de la précédente législature, je ne savais toujours pas si le Gouvernement bruxellois avait l’intention d’entamer les procédures !

On ne peut pas classer tout ce qui est ancien ; le classement y perdrait de sa crédibilité. Mais il n’est pas évident de décider quels sites et monuments méritent d’être classés. C’est à des spécialistes qu’il appartient d’en juger ; avec une capacité à relativiser que n’ont pas les simples citoyens… ni la plupart des élus !

Dans le cadre de la contestation d’un projet d’urbanisme, il arrive que des associations introduisent auprès du Gouvernement régional une demande de classement du site ou du bâtiment concerné.

L’exemple du plateau Engeland mérite ici d’être explicité :

Deux importantes demandes privées de promotion immobilière pour du logement ont été introduites pendant la précédente législature, qui ont suscité toutes deux une très vive contestation. En cours d’instruction, l’association environnementale SOS Kauwberg a introduit une demande de classement de l’ensemble du site du plateau Engeland. Il faut savoir qu’un classement empêcherait toute nouvelle construction future !

La CRMS a déjà rendu son avis ; un avis favorable pour une grande partie du site (ceinturée d’une zone de protection s’étendant à l’ensemble). L’association demanderesse a introduit en 2007 une action en référé pour obliger le Gouvernement à initier la procédure ; il est encore trop tôt pour préjuger de son issue. La Commune s’est cependant déjà prononcée, par un avis défavorable sur cette demande, approuvé par le Conseil communal malgré la proposition du groupe Ecolo d’une prise de position plus nuancée.

Je comprends qu’il était impossible au Collège de souscrire à la demande de classement du site telle qu’introduite : elle englobe les deux grands terrains (affectés en zone à bâtir au PRAS) qui sont l’objet d’un permis de lotir. Le plus petit (à front de l’avenue Dolez) est un champ qui n’a pas d’intérêt particulier et le projet d’urbanisation qui le concerne est devenu de très bonne qualité après un premier refus ; je ne sais d’ailleurs pas pourquoi la CRMS l’a englobé (sans motivation !) dans la zone classée qu’elle préconise.

Je pense cependant, qu’il aurait été possible que le nouveau Collège saisisse l’opportunité de soutenir l’idée d’assurer une protection partielle des zones que le PRAS a déclarées constructibles sans pour autant y interdire toute construction. Un classement partiel du plateau aurait donné la possibilité légale d’une double extension de la « zone verte de haute valeur biologique » déjà protégée : celle d’une bande lisière de 20m incluse dans le terrain bâtissable Engeland-du Puits (comme je l’avais proposé, en vain, au Collège précédent) ; et une partie de la zone bleue d’équipement collectif de l’Institut Pasteur (de manière à élargir le couloir- relais du maillage vert, que je juge trop étroit tel qu’il a été délimité par le PRAS).

Je le regrette d’autant plus que, même s’il n’est que consultatif, cet avis communal négatif aura du poids lors de l’instruction de la demande de classement du plateau Engeland par le Gouvernement régional. Et je pense qu’il faut retenir de cet exemple l’idée que formuler une demande environnementale d’une exigence irréaliste n’est pas toujours une stratégie efficace de participation citoyenne. C’est offrir au pouvoir public des arguments pour motiver un refus. En demandant le plus pour obtenir un mieux, on risque de ne rien obtenir du tout !

Installation classée

L’ordonnance régionale de Protection de l’Environnement (OPE) reprend elle aussi un concept de « classement » pour l’attribution des « permis d’environnement » (valables pour 15 ans). Elle établit la liste de près de 200 « installations classées » qui, parce que susceptibles de causer des nuisances dommageables à l’Environnement, sont l’objet de procédures particulières.

Elles sont réparties en quatre catégories (classes III, II, IB et IA) auxquelles correspondent des procédures de délivrance du permis de plus en plus lourdes.

Sont classés dans la catégorie 1A les projets susceptibles d’avoir de très importantes incidences environnementales (relativement rares à Uccle). Ils sont soumis à l’obligation d’une « étude d’incidences » réalisée par un bureau d’étude. Dans la classe 1B se trouvent les demandes (beaucoup plus nombreuses à Uccle) qui sont seulement soumises à un « rapport d’incidences » élaboré par le demandeur (et qui manque donc généralement de recul critique !). Les demandes de classe I et II sont toujours soumises à enquête publique.

Un des principaux critères de cette classification des installations soumises à permis est l’importance du stationnement (en raison de la prise en compte de l’impact du projet sur la mobilité). Un permis d’environnement est exigé pour tout projet qui prévoit au moins 25 places de parking.

De nombreux projets d’urbanisme sont soumis à l’obligation d’un double permis : un permis d’urbanisme et un permis d’environnement. Ce sont les dossiers que l’on appelle « mixtes » (dont les deux demandes sont soumises simultanément à l’enquête publique). Il s’agit de projets importants qui comportent des installations de classe I.

Les deux permis sont délivrés par des autorités différentes : administration régionale de l’urbanisme (AATL) d’une part, IBGE (Institut Bruxellois de Gestion de l’Environnement) d’autre part. Le non octroi de l’un entraîne la caducité de l’autre (ce qui est par exemple arrivé dans le cas de la demande de la clinique Fond Roy, suite aux recours introduits par quelques riverains contre le permis d’environnement).

Vous trouvez que le commentaire de ce mot est bien ardu…

Croyez bien que vous n’êtes pas seuls à le penser.

Le droit de l’urbanisme c’est vraiment compliqué pour un non spécialiste !

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