Sur les 23.000 espèces végétales et animales recensées en Belgique,

plus d’un tiers seraient aujourd’hui menacées d’extinction !


La caractéristique le plus extraordinaire de la vie c’est sa diversité. Les diverses branches de l’évolution biologique ont généré une multiplicité d’espèces dont nul n’est capable de chiffrer le nombre parce qu’une large part est encore méconnue.

Moins de 2 millions d’espèces sont actuellement répertoriées sur un nombre total estimé entre 5 et 30 millions ! Les forêts tropicales sont la zone bioclimatique la plus riche ; et les îles contiennent de fortes proportions d’espèces endémiques (celle de Madagascar, par exemple, exceptionnelle pour sa diversité biologique et paysagère, est un haut lieu de la biodiversité mondiale).

Une biodiversité naturelle menacée

Parmi les espèces vivantes connues,il est certain que le nombre de celles menacées est très important et ne cesse d’augmenter.
Quelques problèmes d’actualité, à titre d’exemple :
– Plusieurs espèces d’oiseaux ont disparu de nos jardins. De très nombreuses variétés de pommes indigènes ne se trouvent plus dans les supermarchés. Les médias nous informent qu’un nombre croissant d’espèces sauvages sont aujourd’hui menacées de disparition…

 L’espace ucclois semi-naturel du Kauwberg est progressivement envahi par un arbre : le cerisier tardif. Il nous vient d’Amérique du nord et prospère chez nous. La renouée du Japon (introduite pour ornementer nos jardins) est une plante buissonnante qui pousse presque partout dans nos régions, grâce à sa bonne résistance à la pollution. Deux exemples, parmi beaucoup d’autres, d’espèces exotiques « invasives » dont la prolifération appauvrit notre flore indigène.

 La pollution et la « surpêche » menacent gravement la biodiversité marine. Le cabillaud n’est pas la seule espèce en voie d’extinction ; c’est l’ensemble de l’écosystème océanique dont l’avenir n’est plus assuré. Il semble encore possible d’inverser la tendance avant qu’il ne soit trop tard.

 Partout dans le monde les populations d’abeilles se raréfient. Or, leur rôle est essentiel en tant qu’insectes pollinisateurs pour le maintien d’un très grand nombre d’espèces végétales.

Au cours de l’histoire de la terre de nombreuses espèces vivantes ont disparu pour des causes naturelles. La terre a connu cinq grandes crises d’extinction.

La disparition des dinosaures et des ammonites de l’ère secondaire est la plus connue d’entre elles. L’hypothèse la plus probable est que ces disparitions ont été la conséquence de la chute d’une météorite dans le golfe du Mexique.

Mais les spécialistes s’accordent aujourd’hui pour dénoncer la rapidité actuelle des disparitions d’espèces à un rythme sans commune mesure avec ce qu’a connu précédemment l’histoire de la vie sur terre (le taux de disparition d’espèces est actuellement des milliers de fois supérieur à celui des extinctions naturelles !).

Les raisons de la perte de la biodiversité mondiale sont nombreuses :

Fragmentation des habitats naturels nuisible à la dissémination des espèces

Disparition d’une part importante des forêts tropicales

Pollution des habitats terrestres par les activités agricoles et industrielles de l’homme

Désertification et érosion des sols

Surpêche, acidification du milieu océanique par saturation en CO2,

Sélection par l’homme des espèces agricoles les plus rentables

Exploitation des espèces sauvages et commerce illégal d’espèces menacées.

Difficultés d’adaptation au réchauffement climatique

Elimination d’espèces par la concurrence d’espèces invasives en migration


Le réchauffement climatique récent n’est qu’un des facteurs qui agit sur un terrain déjà fortement fragilisé !

L’Europe s’est donné pour objectif d’enrayer la perte de biodiversité. La position de l’Union Européenne au sommet mondial de la biodiversité au Japon (en 2010) sera déterminante.

Une politique très élaborée a notamment déjà été mise en route pour la protection des poissons menacés par la surpêche. Mais le contrôle est bien difficile et certains gouvernements se montrent réfractaires par manque de courage politique.

Un capital de l’humanité à préserver

La biodiversité sur terre est un héritage de l’espèce humaine produit par des millions d’années d’évolution. Elle est un capital de ressources aux potentialités multiples et qui restent encore largement à découvrir.

Elle peut dynamiser la recherche (fondamentale et appliquée) et le développement économique dans des secteurs très variés tels que les bioénergies, l’industrie pharmaceutique, l’écoconstruction, la génétique, le biomimétisme (l’imitation de la vie ou l’innovation technique inspirée par la nature)…

On estime qu’environ 40% des médicaments commercialisés par l’industrie pharmaceutique sont tributaires de substances issues des forêts tropicales. Certaines d’entre elles, comme par exemple la pervenche de Madagascar, se sont déjà révélées efficaces contre le cancer. Le botaniste français Jean-Marie Pelt est l’initiateur de recherches menées en collaboration avec des ethnologues dans le but de recueillir le savoir médicinal traditionnel des peuples de la forêt amazonienne et de l’analyser à la lumière des connaissances scientifiques occidentales.

Le maintien de la biodiversité est aussi nécessaire à celui des écosystèmes naturels vitaux pour l’homme ; pensons, par exemple, à la pollinisation des plantes par les insectes, ou à la dépollution naturelle de l’air et de l’eau.

Les espèces sont complémentaires ; la disparition de l’une met en cause la survie d’autres. Aucune n’est « banale », chacune est le produit de millions d’années d’évolution et joue un rôle dans un écosystème. Or le récent rapport des Nations Unies sur l’Evolution des Ecosystèmes pour le Millénaire montre qu’environ 60% des services à l’homme issus des écosystèmes sont en cours de dégradation ou exploités de manière non rationnelle (avec un risque élevé de modifications brutales et non réversibles).

La protection de la biodiversité : une nécessité
Plusieurs raisons fondamentales justifient donc d’accorder la priorité à la préservation de la biodiversité sur terre :

  • son utilité directe pour l’homme (notamment en matière de santé et d’alimentation) ;
  • sa capacité potentielle de résilience en temps de crise (l’adaptation d’un écosystème aux fluctuations du milieu se fait d’autant mieux qu’il est « biodiversifié », de même que la diversité génétique d’une population la rend moins vulnérable aux agressions) ;
  • son rôle d’indicateur toxicologique naturel (la disparition d’une espèce sensible peut donner l’alerte à une pollution) ;
  • l’information qu’elle nous apporte pour une meilleure connaissance du vivant alimentant les recherches en biomimétisme (une science pluridisciplinaire très prometteuse, qui s’inspire des solutions éprouvées dans la nature pour résoudre des problèmes techniques qui se posent à l’homme).

    Un exemple parmi beaucoup d’autres : la colle sécrétée par un ver de vase vivant dans les zones littorales offre aux chercheurs un modèle pour la création d’une « superglu » insoluble dans l’eau, non toxique et biodégradable, qui pourrait très utilement remplacer les vis et plaques métalliques aujourd’hui nécessaires à la résolution des fractures.

Au-delà de cette légitimation intéressée, cette préservation se justifie au nom d’une éthique de la conservation du vivant à laquelle tous les défenseurs de l’environnement appellent aujourd’hui.

Il parait cependant impossible d’assurer la protection de toutes les espèces et tous les écosystèmes. C’est pourquoi les biologistes ont tenté de définir des priorités.

Certaines espèces méritent une protection particulière au nom de leur rareté (nombre réduit d’individus ou de localisations) ; elles sont en effet particulièrement menacées d’extinction.
Il y a des espèces qui en protègent un grand nombre d’autres : les « espèces parapluie » (par exemple les coraux qui abritent dans leurs récifs plus de 10.000 espèces de mollusques et de poissons !). Il y a aussi les « espèces clef de voûte » : des animaux dont l’activité prédatrice régule certains écosystèmes.

Enfin, des espèces animales comme le panda, le gorille et la baleine, menacées et marquées d’une forte charge émotive aux yeux du grand public, deviennent des symboles médiatiques utiles à la prise de conscience du problème général de la perte de biodiversité.

Le concept de « point chaud de biodiversité » a été créé : quelques dizaines de régions du globe ont été identifiées comprenant une diversité en espèces végétales et animales particulièrement grande avec des risques importants de dégradation à court terme.

Pour protéger la biodiversité il faut commencer par bien la connaître ; un soutien à la recherche scientifique s’impose. Il faut ensuite avoir la volonté de prendre les mesures de protection qui s’imposent.

Cela commence au niveau local ; même dans un milieu urbain une politique peut être efficacement menée à cet égard.

Le Ceraa (centre d’étude de recherche et d’action de l’Institut St Luc) a eu l’heureuse initiative d’organiser en novembre 2006, avec le soutien des Ministres régional et fédéral de l’Environnement, une journée d’étude sur le thème de « l’architecture et la biodiversité ».

La réalisation d’un maillage vert et bleu de qualité et la vigilance dans l’instruction des demandes de permis sont des instruments urbanistiques efficaces.

Il faudrait aussi laisser se déployer la biodiversité dans les espaces publics, par une gestion différentiée et l’abandon de l’emploi des produits pesticides dévastateurs. Le service de l’Environnement ucclois a enfin pu prendre cette responsabilité en charge, à partir de 2007, dans le cas particulier du cimetière de Verrewinkel (dont la gestion relevait traditionnellement de la compétence de l’échevinat de la Population, très peu sensible aux questions écologiques).

Protéger la biodiversité suppose aussi de la part des pouvoirs politiques une sensibilisation des citoyens qui pourrait se faire notamment par la publication régulière de données relatives à des indicateurs de l’état du patrimoine naturel national et mondial (comme il est habituel de le faire pour les indicateurs socio-économiques).

La biodiversité est un capital précieux et une assurance pour l’avenir de l’humanité.

Puisse 2010, « l’année internationale de la biodiversité », généraliser cette prise de conscience !

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