Décision du Conseil des Verts allemands
Le 27 juin 2005 Berlin
Traduction libre par étopia_
L’Union européenne est actuellement en crise. Comment l’Europe peut-elle retrouver la confiance de ses citoyens ? Comment l’UE peut-elle parvenir à trouver un accord sur une réponse européenne à la globalisation et à l’orientation écologique et sociale de la modernisation ? Que faire du TCE après les deux réferendums négatifs ? Comment l’UE peut elle relever ses défis internationaux ? Comment l’UE peu-elle renforcer sa democratisation interne et son efficacité sur la base de sa politique d’élargissement ? Ces questions fondamentales continueront de dominer l’agenda européen dans les prochaines années, même si la question budgétaire était rapidement résolue.
Parmi les raisons du ‘non’ en France et aux Pays Bas on retrouve les peurs suscitées par la situation socio-économique, des critiques faites à certaines propositions spécifiques comme la directive Bolkestein, le rejet des politiques nationales, le manque de clarté au sujet des finalités de l’UE, de même que le succès de la propagande populiste et chauviniste qui exploite les difficultés de l’élargissement. Il est également vrai que l’UE a perdu le contact avec ses citoyens. Elle est perçue comme le projet d’une élite transeuropéenne. Par conséquent, la méfiance par rapport à cette élite est projetée sur le projet de cette élite, à savoir sur l’UE.
Le processus d’intégration européenne a été une histoire à succès qui a été portée par des leaders qui avaient une vision à long terme, en dépit des crises récurrentes. Les élites politiques ne sont pas suffisamment parvenues à communiquer sur ce qu’il y a de positif dans l’Europe et dans Bruxelles. Le fait que le marché commun et les politiques communes ont garanti ou créé des emplois au cours des dernières années contraste avec l’impression de beaucoup d’Européens qu’ils sont poussés vers des emplois moins stables et moins bien payés. Trop souvent, les élites nationales, c’est également le cas en RFA, mettent au crédit des politiques nationales des réalisations européennes et imputent à l’UE la responsabilité des politiques impopulaires, comme s’ils n’avaient rien à voir avec elles. Après des années de discours social négatif sur l’UE, il ne fallait pas être surpris que de trop nombreuses personnes ne considèrent plus l’UE comme étant leur projet.
Alors que pour la génération de la guerre et de l’après-guerre, l’Europe était encore liée à la volonté de mettre un terme à des siècles de guerres européennes, pour les générations les plus jeunes, l’Europe est une évidence. Chirac a été incapable d’offrir une réponse à ceux qui sont en faveur de l’intégration européenne de ces dernières décennies mais souhaitent voir un avenir différent pour l’Europe. Etre en faveur de l’UE mais contre le TCE est un paradoxe qui n’est pas reconnu comme tel par tous. Les gens qui sont contre l’UE n’avaient qu’à voter pour le ‘non’. Mais certains ont voté ‘non’ sans être contre l’UE. Comment gagner leur soutien pour un nouveau démarrage lorsqu’ils se seront rendus compte que la crise de l’intégration européenne est la porte ouverte à l’émergence d’un nouveau nationalisme ?
Il est crucial de ne pas faire du surplace ou de retomber dans les égoïsmes nationaux. Les propositions visant à approuver le TCE par morceau via des décisions du Conseil reste dans la logique élitaire et ne peut dès lors constituer la solution à la crise. Les leaders européens doivent montrer qu’ils sont capables d’écouter leurs citoyens et ils doivent présenter des propositions pour combler le fossé entre l’UE et ses citoyens. Mais les citoyens eux-mêmes doivent reconquérir activement l’UE et en faire leur projet. L’échec de Nice a montré que les gouvernements nationaux seuls ne peuvent pas faire avancer l’UE. La Convention a constitué un premier pas vers plus de participation des citoyens et a offert à l’UE avec la Charte des droits fondamentaux pour la première fois une base commune pour les droits politiques et sociaux des citoyens. Mais elle n’a pas réussi à créer le débat européen tant désiré.
Pour nous les Verts, une chose est Claire: l’UE est une partie de la réponse au défi de la globalisation. Ce n’est que dans le cadre de l’UE que nous pourrons développer la puissance nécessaire pour renforcer notre système européen sur le plan économique et social de même que pour orienter la globalisation dans le sens de la justice. Pour atteindre ce but, nous avons besoin de plus de démocratie, de plus de transparence et de plus d’efficacité de l’UE. C’est pour cela que nous nous battons et c’est pour cela que nous avons besoin d’une constitution européenne. C’est dans ce but que le processus constitutionnel européen a été largement initié par le discours de Joschka Fischer à l’Université Von Humboldt en Mai 2000. Nous voulons poursuivre dans cette voie.
Voici notre proposition de «Plan C », le plan des citoyens de l’Europe en trois étapes :
1. Le débat sur l’orientation économique, sociale et écologique de l’UE dans ses politiques spécifiques est important et nécessaire. Il ne devrait pas avoir lieu qu’au seul parlement européen. Nous Verts, voulons avancer activement dans la discussion avec nos partenaires européens. Il est évident pour nous que la réponse européenne à la globalisation et à la modernisation doivent être orientées socialement et écologiquement. Pour nous, il s’agit de développer un modèle européen basé sur les meilleures et les plus efficaces traditions de ses états-membres. Notre objectif ce n’est pas un modèle britannique, français ou allemand, mais une économie de marché européenne sociale et écologique. En outre, nous souhaitons reprendre l’initiative française pour une pétition européenne demandant qu’un travail égal donne lieu à un salaire égal. Le traité constitutionnel comporte l’instrument de la pétition (article I-47), qui permet à un million de citoyens européens de mettre une question à l’agenda des décideurs européens. A long terme, cet instrument peut permettre aux citoyens européens de revendiquer des points précis sur le plan économique et social.
2. Dans le but de préparer le plébiscite européen sur la structure constitutionnelle, nous demandons un débat public européen – européen dans son continu et dans sa forme. C’est la raison pour laquelle nous demandons l’organisation de forums sectoriels largement ouverts aux citoyens européens. Ces forums devraient être lancés par la société civile et par l’impulsion des parlements à tous les niveaux. Cependant, nous ne voulons pas de forums organisés au seul niveau national. Ce que nous voulons, c’est que la société civile dans toute sa pluralité mène ces discussions au-delà des frontières. Des syndicalistes allemands, français et espagnols discutant entre eux et rencontrant des associations suédoises. Des associations environnementales polonaises dialoguant avec des pêcheurs portugais, des groupes de musulmans de France rencontrant des représentants de l’église protestante d’Allemagne. A travers ces forums citoyens, nous souhaitons également inviter des personnalités connues du sport, de la culture ou du spectacle à contribuer à la création d’un espace public européen. Il revient aux parlements nationaux, au parlement européen et à la Commission européenne de coordonner et de financer ces activités. Les parlements nationaux ont la mission importante de former et de communiquer cet important processus. Notre proposition implique un effort en termes d’échange et de dialogue – mais nous considérons cela comme nécessaire en Europe et pour l’Europe. Nous sommes optimistes quant à notre possibilité de gagner les citoyens à la cause d’une Europe constituée démocratiquement qui soit capable de donner une perspective d’avenir à 450 millions de personnes.
3. Nous appelons le Parlement Européen à prendre l’initiative pour un large référendum européen sur l’Europe en 2007. Les citoyens de l’Europe voteraient sur les deux premières parties du TCE, qui sont similaires aux constitutions nationales, à savoir l’architecture institutionnelle et la Charte européenne des droits fondamentaux. Nous souhaitons donc donner à l’UE la structure démocratique transparente et efficace nécessaire à ses actions.
Dans notre programme pour les élections européennes de 2004 nous avons déjà pris position pour un référendum ayant lieu dans toute l’Europe. Sous la bannière de la souveraineté nationale et inspiré par la foi dans leurs institutions représentatives cette proposition a été rejetée par plusieurs parties. Le « Non » en France et le « Nee » aux Pays Bas ont confirmé que sans une participation active, directe et démocratique de tous les citoyens européens comme porteurs de la souveraineté européenne, le processus de l’intégration aboutira à une impasse à son niveau actuellement insuffisant d’intégration et sera dispersé dans les débats politiques de chacun des états-membres. Un référendum sans participation publique conduit à un manque d’information et facilite les prises de position populistes. C’est la raison pour laquelle, nous appelons à un large débat public culminant dans un référendum organisé dans toute l’Europe.
Les étapes suivantes:
Nous développerons le dialogue avec les acteurs de la société civile, nationaux et européens, et nous souhaitons commencer à concrétiser la voie vers un espace public européen. Les Verts au Parlement européen commencent ce jour ce processus aujourd’hui en consultant un large panel de représentants de la société civile sur l’avenir de l’UE ? Nous saluons et soutenons cette initiative et nous la poursuivrons au niveau allemand, de concert avec les députés européens.