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Introduction : l’angle mort du débat sur la réforme des soins de santé

 

Les soins de santé sont en crise et ce n’est pas (uniquement) la faute d’un virus… La pandémie que nous traversons actuellement a servi de révélateur à un malaise beaucoup plus profond dont témoigne, par exemple, le collectif « santé en lutte[1] ». Le manque de personnel, le sous-financement du temps passé avec les patient·es et l’inflation administrative induisent épuisement et démotivation. L’essentiel – le soin (« care ») – est de plus en plus réduit à la portion congrue. Qu’une réforme soit nécessaire ne semble heureusement plus contesté. Mais quelle forme prendra celle-ci ? Suffira-il d’augmenter le financement de certaines activités ?

Par ailleurs, les modifications environnementales qui s’annoncent – réchauffement climatique, pic pétrolier et leurs conséquences – ont de plus en plus d’impact sur la santé des populations et réduiront les moyens matériels dont nous disposerons pour les soigner. De plus, les soins de santé contribuent à la dégradation de l’environnement, tant en termes d’émissions de CO2 que de largage de divers polluants. Pourtant, la dimension environnementale est habituellement absente des discussions concernant la réforme des soins de santé. Lorsqu’elle est présente[2], elle se limite à la question de l’adaptation du système de soins aux modifications climatiques, sans aborder l’autre versant de cette question, la responsabilité environnementale des soins de santé.

Cette étude a pour objectif d’ouvrir le débat sur le sujet en abordant successivement les interactions à double sens entre environnement et (soins de) santé, puis quelques paradoxes du système actuel et enfin les grandes lignes d’une stratégie possible de soins de santé durables.

 

I. Environnement, social et santé : même combat ?

Coup de chaud sur la santé

 

L’environnement est un déterminant important de notre santé. En Europe, on estime que 13% des décès sont attribuables à des causes environnementales évitables telles que la pollution de l’air intérieur et extérieur, le bruit, des polluants chimiques. Les pathologies principalement concernées sont les cancers, pathologies cardiaques ischémiques, broncho-pneumopathies obstructives, l’AVC, les problèmes de santé mentale et le diabète[3].

Parmi les facteurs environnementaux influençant la santé, il faut également citer les conséquences du changement climatique, notamment les évènements météorologiques extrêmes (vagues de chaleur, sécheresses et incendies, tornades, inondations…) et l’élévation du niveau des océans. Les modifications environnementales qui en résultent favorisent de nombreuses pathologies, résumées dans le tableau 1.

Tableau 1 : effets sur la santé des modifications climatiques[4]

 

Médiateur Effets
Pollution de l’air Asthme, pathologies cardiovasculaires
Modification de répartition de vecteurs infectieux Malaria, dengue, encéphalite, hantavirus, fièvre du Nil, maladie de Lyme, chikunguya,…
Augmentation d’allergènes Asthme, allergies respiratoires
Altération de la qualité de l’eau Choléra, cryptosporidiose, campylobacter, leptospirose, effets toxiques de la prolifération d’algues,…
Réduction d’accès à l’eau potable et l’alimentation Malnutrition, diarrhées
Dégradation de l’environnement Migrations forcées, conflits civils, impact sur la santé mentale
Chaleur extrême Pathologies liées à la chaleur, insuffisance cardiaque
Evènements météorologiques extrêmes Blessures, décès, impact sur la santé mentale

 

A voir la grande place donnée aux maladies infectieuses dans ce tableau, on comprend que la pandémie actuelle soit loin d’être une surprise pour les spécialistes. En septembre 2019, un groupe d’expert·es mandaté·es notamment par l’ONU[5] écrivait : « la menace est bien réelle de voir un agent pathogène respiratoire entraîner la propagation rapide d’une pandémie à forte mortalité capable de tuer 50 à 80 millions de personnes et d’effacer près de 5 % de l’économie mondiale ». Et, plus loin dans le même texte, « le monde n’est pas prêt à faire face à la propagation rapide d’une pandémie. »

Quelques mois à peine après la publication de ce rapport, les événements lui donnaient tragiquement raison. Comment ne pas déplorer notre manque d’anticipation ? Mais surtout, comment mieux nous préparer pour le futur ? Outre le manque de moyens humains, cette pandémie a mis en exergue la fragilité de notre système d’approvisionnement en équipements médicaux (la « saga des masques » en est un exemple tragi-comique), mais aussi en médicaments (tels que les curarisants, utilisés chez les patient·es sous assistance respiratoire[6]). Or, un élément indispensable de la production et de l’acheminement de ces fournitures est… le pétrole, dont nous risquons de manquer bientôt.

 

Pas de pétrole, pas de (soins de) santé ?

 

Comme la plupart des domaines de notre vie, le secteur des soins de santé tel qu’il existe actuellement est extrêmement dépendant du pétrole et de ses dérivés.

A ce titre, les activités les plus gourmandes en pétrole sont le transport du personnel, des patient·es et des fournitures (habituellement manufacturées très loin de chez nous), surtout dans des systèmes de santé privilégiant la concentration des soins dans des centres hospitaliers très spécialisés[7]. Loin derrière en termes de volume pétrolier consommé se trouvent deux domaines pourtant stratégiques dans le modèle actuel, les plastiques et les médicaments.

Les plastiques à usage médical représenteraient 4% de la production mondiale de plastiques. On y trouve des dispositifs aussi variés que les gants en vinyle, seringues, poches et tubulures à perfusion, tubes pour prises de sang, sondes urinaires, masques à oxygène, tubes d’intubation, pièces d’appareillage médical… Beaucoup de ces dispositifs, à usage unique, sont actuellement considérés comme essentiels à des soins de qualité, afin notamment de garantir l’asepsie des actes techniques. Une augmentation des prix et des délais de livraison des seringues, observée lors de la crise pétrolière des années ’70, témoigne de l’importance de ce domaine stratégique[8].

Quant à l’industrie pharmaceutique, si elle ne consomme que 3% de la production pétrolière mondiale, elle en est totalement dépendante puisque 99% des matières premières et réactifs utilisés sont dérivés de produits pétroliers[9]. La production de médicaments dits « naturels » n’échappe pas à cette difficulté, car elle utilise des produits d’origine pétrolière : solvants pour l’extraction des composés actifs et polymères pour l’enrobage des comprimés.

Par ailleurs, la pénurie future de pétrole est susceptible d’affecter de nombreux autres domaines de la vie et ainsi la santé des populations[10] : récession économique et augmentation de précarité, pénuries alimentaires[11], guerres d’approvisionnement (et leurs effets en termes de morbidité/mortalité, atteinte aux infrastructures ou détournement de ressources)[12]

En conséquence, si l’approvisionnement en pétrole s’arrêtait demain, une grande partie du secteur de soins de santé serait très rapidement paralysée alors même que les pathologies à traiter augmenteraient, avec toutes les implications que l’on peut imaginer et que la pandémie actuelle n’a fait qu’esquisser.

Notons que le pétrole n’est pas la seule ressource consommée sans grand discernement par les soins de santé : en 1997, un hôpital allemand utilisait environ 450 litres d’eau potable par jour et par patient·e (contre 140 litres dans les usages domestiques), essentiellement pour le nettoyage[13]. En Italie, une publication de 2010 cite 550 à 670 litres par lit et par jour[14].

L’observation de la dépendance au pétrole des soins de santé pose une autre question, celle de leur impact environnemental.

 

Les soins de santé émettent autant de CO2 que le secteur alimentaire

 

La part relative des soins de santé dans l’empreinte CO2 d’un pays a été estimée à 6% pour la Grande-Bretagne[15], 7% en Australie[16] et 10% aux USA[17].

Dans une comparaison internationale utilisant des méthodes de calcul un peu différentes[18], en moyenne 5.5% des émissions de CO2 des pays de l’OCDE (tableau 2a) sont attribuables aux soins de santé (hospitalisations et soins ambulatoires, institutions de long séjour, activités de prévention). Ces taux relatifs – comparables à ceux calculés pour le secteur alimentaire – sont très mal corrélés aux émissions absolues calculées par habitant (tableau 2b). C’est ainsi que, dans le groupe de pays présenté au tableau 2, la Belgique se classe troisième en termes d’émissions relatives totales mais obtient un score plutôt honorable en termes d’émissions absolues par habitant.

 

Tableau 2 : Production de CO2 attribuable aux soins de santé, dans la plupart des pays d’Europe, le Canada et les USA, classés par ordre décroissant d’émissions relatives aux émissions totales (volet A) et d’émissions absolues par habitant (volet B). Les pays grisés sont ceux qui se situent dans la moyenne du sous-groupe présenté dans ce tableau. D’après Pichler et coll., 2019[19]

 

A

 

Pays

Relativement aux émissions totales du pays (%) Mégatonnes   B

 

Pays

Par habitant

(tCO2)

Pays-Bas 8.1 15.8 USA 1.51
USA 7.9 479.7 Luxembourg 1.24
Belgique 7.7 7.5 Pays-Bas 0.93
France 6.9 34.4 Canada 0.83
Autriche 6.7 6.8 Autriche 0.80
Allemagne 6.7 55.1 Suisse 0.73
Irlande 6.7 3.1 Finlande 0.72
Danemark 6.4 4 Danemark 0.71
Portugal 6.0 4   Norvège 0.70
Suisse 5.9 5.9 Allemagne 0.68
Grande-Bretagne 5.9 41.1 Irlande 0.68
Espagne 5.5 19.2   Belgique 0.66
Finlande 5.3 3.9 Grande-Bretagne 0.64
Canada 5.1 29.7 France 0.52
Italie 5.1 23.1 Suède 0.42
Norvège 4.7 3.6 Espagne 0.41
Suède 4.5 4.1 Grèce 0.39
Grèce 3.8 4.2 Italie 0.38
Luxembourg 3.6 0.7 Portugal 0.38

 

La répartition des émissions de CO2 entre sous-secteurs d’activité est variable selon les publications, qui diffèrent par leurs méthodologies et le niveau de soins analysé. Dans l’étude australienne, les hôpitaux (44% des émissions de CO2) et les produits pharmaceutiques (19%) viennent en tête. En Grande-Bretagne, le NHS estime que le matériel médical (médicaments et équipements) représente 30% des émissions de CO2, alors que la consommation des bâtiments en énergie et en eau n’en expliquerait que 15%. L’étude de comparaison internationale[20] retient le chauffage, l’approvisionnement en eau et électricité des bâtiments (38% au total), les transports (22%), les produits pharmaceutiques et autres fournitures chimiques (10%). Selon cette dernière publication, trois facteurs expliquent près de la moitié de la variance des taux relatifs : l’intensité carbone des systèmes énergétiques du pays (émissions de CO2 par combustion de combustibles fossiles / consommation d’énergie totale), l’intensité énergétique de son économie (consommation d’énergie par unité de PIB) et, dans une moindre mesure, les dépenses de soins de santé par habitant.

En conclusion, une proportion importante des émissions de CO2 du secteur des soins de santé correspond à des postes « classiques » (transport, chauffage, électricité…), qui peuvent à priori être améliorés selon les mêmes méthodes que dans d’autres secteurs. Cependant, 10 à 30% de ces émissions seraient directement attribuables aux fournitures de soins – et donc aux décisions médicales – notamment les médicaments et les dispositifs médicaux, souvent à usage unique. Que deviennent ces derniers ?

 

Les hôpitaux, des fabriques à déchets

 

En 1997, les hôpitaux allemands généraient plus d’un million de tonnes de déchets par an, soit environ 5 kg par jour et par patient·e (par comparaison, les déchets ménagers représentaient à la même époque 1 kg par personne et par jour). Aux Etats-Unis, selon une publication de 2014, un hôpital métropolitain produit 10.7 kg de déchets « généraux » et 2.8 kg de déchets infectés par patient·e et par jour. Les déchets potentiellement infectieux représenteraient environ 10% et les déchets radioactifs ou chimiques (argent, mercure, produits de chimiothérapie,…) 5% des déchets d’un hôpital. L’impact environnemental de ces déchets est très difficile à évaluer et dépend grandement de la manière dont ils sont gérés[21].

Papiers, cartons et plastiques – en particulier les plastiques à usage unique – représentent plus de la moitié des déchets généraux des hôpitaux[22]. Les plastiques à usage médical ont initialement été adoptés en raison de leur plus grande facilité d’utilisation et d’un plus grand confort pour les patient·es comparé, par exemple, à des seringues en verre qui cassaient facilement. Ce n’est que dans un second temps qu’ils ont peu à peu été considérés comme des éléments essentiels de l’hygiène hospitalière. La culture actuelle de la prévention des infections est basée sur l’utilisation d’objets éphémères[23]… alors qu’il existe de nombreuses alternatives réutilisables[24].

Qu’en est-il de l’industrie qui approvisionne le secteur des soins de santé ?

 

L’addition salée du secteur pharmaceutique

 

Une étude a comparé les émissions de CO2 des 15 plus grosses entreprises pharmaceutiques mondiales, avec des résultats surprenants[25]. L’industrie pharmaceutique émet en moyenne 55% de CO2 de plus que l’industrie automobile, mais avec de plus grandes variations d’une firme à l’autre. Comparant deux firmes dont le volume d’affaires et le portefeuille d’activités sont similaires, on observe que Procter & Gamble pharma (anciennement Merck pharma) émet 5x plus de CO2 que Johnson & Johnson. La firme Roche, meilleure de la classe, a augmenté ses revenus de 27% de 2012 à 2015, tout en réduisant son empreinte carbone de 19%, montrant qu’une politique environnementale ambitieuse n’est pas incompatible avec l’efficience économique (au contraire ?).

Cependant, l’empreinte carbone n’est peut-être que la partie émergée de l’iceberg de l’impact environnemental des médicaments et du secteur pharmaceutique. Dans nos pays, on s’inquiète souvent de la pollution générée par l’excrétion de métabolites actifs, tels que les antibiotiques, dans les urines ou les selles des patient·es. Des quantités non négligeables de médicaments sont également gaspillées – et souvent jetées sans précaution – suite à la prescription de conditionnement trop grands, une faible adhésion thérapeutique ou des dates de péremption plus courtes que nécessaire[26]. 14% des médicaments vendus en France finiraient ainsi dans la poubelle chaque année[27]. De plus, certains conditionnements comme les dispositifs à gaz propulseur pour le traitement de l’asthme sont particulièrement polluants, de même que les gaz anesthésiques.

Mais les quantités concernées sont sans commune mesure avec le relargage massif de produits dans l’environnement des usines pharmaceutiques, souvent localisées dans des pays où la législation sur le sujet est absente[28]. C’est ainsi qu’en 2007 en Inde, 44 kg de ciprofloxacine (assez pour soigner 44000 personnes) étaient déversés chaque jour dans les eaux usées de certaines usines. Des observations similaires ont été faites concernant des tétracyclines en Chine, ou des dérivés oestrogéniques, en Chine également, perturbant la reproduction des poissons de rivières.

Et à ce propos, qu’en est-il des conditions de travail dans les secteurs pharmaceutique et d’équipements médicaux ?

 

Le coût humain des soins de santé

 

« Quand la mort devient le prix de la mode », titrait Le Soir du 2 mai 2013[29], une semaine après l’effondrement du Rana Plaza. Soudain, le monde entier découvre – ou fait mine de découvrir – les conditions de travail des ouvrier·es du secteur textile, au Bangladesh et ailleurs.

Si aucune information ne semble disponible concernant le secteur pharmaceutique, la fabrication de matériel à usage médical (uniformes, masques, gants, instruments chirurgicaux) ne se démarque malheureusement pas de l’industrie textile : au Pakistan ou en Malaisie par exemple, nombreuses sont les situations de travail précaire, insuffisamment rémunéré, dangereux, voir même parfois effectué par des enfants ou des travailleurs immigrés dont on a confisqué les passeports[30]. En Chine, des masques seraient produits par des Ouïghours soumis au travail forcé[31].

Ces observations, ainsi que la pollution aux alentours des usines pharmaceutiques, illustrent notre propension à externaliser les coûts sociaux et environnementaux du confort de vie occidental, facilitant une certaine cécité collective qui risque bien de se retourner contre nous tôt ou tard.

 

En conclusion de cette première partie, les modifications climatiques et environnementales sont déjà responsables d’une modification du profil de pathologies auxquelles nous avons à faire face. De plus, des domaines stratégiques de notre modèle actuel de soins de santé sont quasi totalement dépendants de l’approvisionnement pétrolier, qui ne pourra que se raréfier dans le futur. Enfin, les soins de santé ont de nombreux coûts cachés, environnementaux (émissions de gaz à effet de serre et d’autres polluants, en particulier plastiques et toxiques) et humains. Un changement de modèle est donc incontournable. Avant d’envisager les pistes de changement, il est utile de mieux comprendre le modèle de soins actuel, en particulier ses racines épistémologiques.

 

II. Une conception réductrice de l’humain et de la santé

 

Hors de la technique, point de salut ?

 

Historiquement, la médecine occidentale s’est construite en référence au projet moderne, selon lequel la science est le seul moyen d’accéder à la vérité sur la nature et ainsi de la contrôler et de l’améliorer[32]. L’approche « biomédicale » qui en résulte a montré une efficacité certaine dans de nombreux domaines, en particulier la médecine aiguë, mais elle a également des inconvénients[33].

En particulier, elle a modifié le rapport de l’être humain à sa santé : « pour mieux la comprendre, le médecin dépersonnalise la maladie. Celle-ci n’est pas perçue comme l’héritage de l’aventure individuelle d’un homme situé et daté, mais comme la faille anonyme d’une fonction ou d’un organe. (…) Cette vision de la maladie ne peut que conduire le malade à se déposer passivement entre les mains du médecin et à attendre que le traitement reçu fasse son effet. La maladie est autre chose que lui, son effort pour guérir, sa collaboration active ne sont pas considérés comme essentiels.[34] » Dans cette perspective, « les médecins (…) produisent de la dépendance. Cette dépendance vis à vis de l’intervention professionnelle tend à appauvrir l’environnement social et physique de ses aspects salubres et curatifs, bien que non médicaux, tout en diminuant les possibilités organiques et psychologiques que les gens ordinaires ont de faire face et de s’adapter[35]. »

L’« expropriation de la santé » (Illich) touche de nombreux domaines de notre vie, générant des demandes médicales pour résoudre des situations non pathologiques ou liées au mode de vie trépidant et aux contraintes de performance auxquels nous sommes toutes et tous plus ou moins soumis : insomnie, impuissance, stress, lombalgie, procréation, vieillissement… « Le rituel médical et son mythe correspondant ont transformé douleur, infirmité et mort, d’expériences essentielles dont chacun doit s’accommoder, en une suite d’écueils qui menacent le bien-être et qui obligent chacun à recourir sans cesse à des consommations dont la production est monopolisée par l’industrie médicale.[36] » De plus, « les anciennes défenses culturelles sont devenues désuètes, relayées par les procédés techniques. En conséquence, le seuil de tolérance a diminué[37] ».

Autrement dit : dans la droite ligne du projet moderne d’amélioration de la nature par la science, la médecine occidentale a largement débordé de sa mission de base, qui est de soutenir les malades dans le retour à la santé (dans la tradition hippocratique, « Le malade doit s’opposer à la maladie avec l’aide du médecin[38] »). Affirmant avec l’OMS que « la santé est un état de complet bien-être[39] physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité[40] », elle a colonisé tous les domaines de notre vie. En découlent des attentes de solution médicamenteuse et technique, non seulement pour le traitement des maladies, mais également pour la gestion des aléas non pathologiques de l’existence, dépossédant ainsi les personnes des ressources – ajustement du mode de vie, tisanes et autres « remèdes de bonne femme », rites culturels et autres – qui pourraient les aider à faire face à ceux-ci. Une autre conséquence est le refus de nos limites, perceptible notamment dans l’hyper-médicalisation de la fin de vie.

On comprend mieux que dans l’esprit de la majorité des gens – « patient·es » et soignant·es – les soins de santé ne peuvent être que techniques pour être de qualité. Mais la technique est-elle vraiment une garantie d’efficacité ?

 

En médecine, le high tech peut nuire à la santé

 

Le cas de la lombalgie illustre les effets négatifs d’une approche trop technique. La lombalgie est un phénomène très fréquent (qui n’a jamais eu mal au dos ?) et coûteux pour la société (jusqu’à 1.6 milliard d’euro en Belgique…[41]). Après des décennies de prise en charge biomécanique (« protégez votre dos ! »), on sait depuis plus de vingt ans qu’elle est bénigne dans la grande majorité des cas, très mal corrélée aux observations radiographiques et favorisée par la sédentarité. Les facteurs de risque de chronicisation sont psychosociaux (« drapeaux jaunes »), ils comprennent par exemple la peur d’avoir une lésion du dos et de l’aggraver en bougeant. Des guides de bonne pratique clinique basés sur des arguments scientifiques solides existent[42]. Ils déconseillent le recours à l’imagerie en l’absence de signes d’alerte (codifiés sous le nom de « drapeaux rouges ») et recommandent d’expliquer au patient ou à la patiente que la lombalgie est bénigne et de l’aider à se remettre rapidement en mouvement. Les éventuels drapeaux jaunes doivent être gérés par des kinésithérapeutes (et éventuellement des psychologues) spécifiquement formés.

Pourtant, les demandes injustifiées d’examens radiographiques restent élevées. On pourrait penser que, mis à part l’impact financier et environnemental de radiographies inutiles, cela n’a pas grande conséquence sur l’évolution des patient·es et pourrait peut-être même les rassurer. Cependant, plusieurs études montrent que les radiographies sont non seulement inutiles mais contre-productives. Par exemple, dans une étude de l’évolution de patient·es souffrant de lombalgie bénigne, il a été observé que les patient·es ayant « bénéficié » d’une IRM précoce évoluent moins favorablement, que celles et ceux n’ayant pas fait d’IRM : ces patient·es reprennent le travail plus tardivement et les coûts sont multipliés par huit, alors que leur lombalgie n’est au départ pas plus sévère que celle de l’autre groupe[43]. Les auteurs de l’étude concluent que la réalisation d’une IRM sans indication valable précipite les patient·es dans une escalade technique (examen et traitements) qui péjore leur situation.

Un des risques de cette escalade est la chirurgie. Le concept de « failed back surgery syndrome » (syndrome d’échec de la chirurgie du rachis) décrit un ensemble hétérogène de situations dans lesquelles la douleur lombaire persiste après une ou plusieurs interventions chirurgicales « anatomiquement réussies ». Son incidence est élevée (10-40%) et reste stable malgré l’amélioration des techniques chirurgicales. Parmi les prédicteurs de résultat insatisfaisant de la chirurgie, on retrouve ici aussi les facteurs psychosociaux[44]. Pourtant, les chirurgien·nes de la colonne sont très peu performant·es dans l’identification de ces facteurs de risque[45].

La dimension iatrogène[46] de la lombalgie est confirmée par des études qui montrent que l’exportation de la médecine occidentale dans des pays ou des populations « défavorisées » a transformé la lombalgie, passée en peu de temps du statut de phénomène banal à celui de maladie invalidante, par exemple chez les aborigènes australien·nes[47].

En conclusion, l’approche « technique » de la lombalgie n’est que rarement justifiée et contribue largement à augmenter le handicap – ainsi que les coûts et l’impact environnemental – de ce symptôme bénin.

On pourrait certainement faire le même constat concernant la gestion d’autres phénomènes fréquents. Le centre fédéral d’expertise des soins de santé (KCE) a ainsi émis un avertissement concernant les césariennes « de confort » et leur risque pour la mère et l’enfant[48]. Dans le domaine de l’insomnie, les recommandations basées sur les évidences scientifiques recommandent en première intention le traitement de la cause éventuelle, puis les approches non médicamenteuses (hygiène de vie, contrôle du stimulus) et enfin seulement des sédatifs, souvent des benzodiazépines, pendant une période limitée à quelques jours pour limiter le risque de dépendance[49]. Malgré cela, et malgré une campagne du SPF Santé Publique[50] une enquête récente de l’Agence fédérale des médicaments et des produits de santé montre que de nombreuses personnes utilisent des somnifères depuis plus d’un an et que des signes de dépendance psychologique sont retrouvés chez plus d’un tiers d’entre-elles[51]. Les auteurs rappellent que les benzodiazépines peuvent, outre la dépendance, induire divers problèmes (somnolence, amnésie, troubles du comportement, hallucinations, somnambulisme …) et augmenter les risques de chute chez les personnes âgées.

C’est pourquoi on a prôné le recours à l’Evidence-Based Practice[52] (EBP), ou « pratique fondée sur les preuves » pour évaluer les résultats des interventions de soins et en limiter les indications aux situations où elles apportent une réelle plus-value. Mais l’EBP n’est pas non plus une panacée et s’avère incapable de répondre à certaines questions, notamment d’ordre plus qualitatif que quantitatif[53]. Il est important d’investir dans le développement d’outils d’évaluation scientifique qui soient adaptés aux approches qualitatives et/ou concernant de petits groupes de patient·es ainsi qu’aux médecines dites « alternatives et complémentaires ».

L’échec de l’abord médicamenteux et technique d’un certain nombre de symptômes et pathologies suggère qu’un changement de modèle est nécessaire.

 

Du modèle biomédical au modèle biopsychosocial

 

Se basant notamment sur l’histoire d’un patient ayant fait une récidive d’infarctus au sein même d’un service d’urgence, dans un contexte de stress et de colère, Engel[54] a insisté sur l’importance d’un apport global des patient·es. En réaction à une approche « biomédicale » de la maladie, son « modèle biopsychosocial[55] » postule que la santé résulte de l’interaction complexe de facteurs biologiques, psychologiques et sociaux. Cette approche, qui peine à s’imposer[56] malgré ses nombreux succès, est pourtant probablement l’une des clés d’une médecine du futur, d’autant plus qu’un abord global de la personne malade permet souvent d’améliorer son évolution tout en réduisant le recours à la technique.

Pour revenir à l’exemple de la lombalgie, il est connu que le meilleur facteur prédictif de l’évolution d’un lumbago est l’opinion du sujet (sa réponse à la question « comment pensez-vous que votre lombalgie évoluera dans les prochains mois ? ») et non les résultats de la radiographie. En effet, ses « représentations et croyances » vont conditionner la réponse qu’il apportera à sa lombalgie : s’il pense que son dos est fragile, il évitera les activités, au risque de développer un cercle vicieux de « peur-évitement » renforçant la douleur et le handicap. En revanche, s’il n’est pas particulièrement inquiet concernant la lombalgie, il se remettra progressivement en mouvement et évoluera vers la guérison[57]. Les stratégies thérapeutiques devront donc spécifiquement aborder ces « représentations et croyances » pour aider la personne à se remettre en selle.

Dans cette perspective, la participation active des patient·es à la gestion de leur santé est essentielle. Cependant, l’expérience montre que cet objectif n’est pas toujours facile à atteindre…

 

Les paradoxes de l’autonomisation

 

Il n’est pas rare d’entendre des appels à sanctionner les patient·es qui ne suivent pas les recommandations médicales – alcooliques, fumeurs, obèses, patient·es « non compliant·es » au traitement… – par exemple en augmentant le ticket modérateur ou en leur refusant le remboursement de certains soins. Ces propositions qui stigmatisent les personnes ayant des comportements « déviants » sont inacceptables car elles sont basées sur plusieurs paradoxes[58]. D’une part, dans une perspective libérale qui considère qu’il suffit de vouloir vraiment quelque chose pour l’obtenir, on rejette sur les individus la responsabilité de situations dont les déterminants sociaux et économiques leur échappent largement (nous y reviendrons). D’autre part, on attend de la population un comportement « sanitairement correct » tout en faisant mine de ne pas savoir que, dans nos sociétés capitalistes gouvernées par la sacro-sainte croissance, tout est fait pour encourager une consommation irresponsable (de boissons sucrées, d’alcool, d’aliments gras et salés, de divertissements passifs…). Enfin, on oublie que l’hyper-médicalisation de nos vies constitue également un marché juteux et que l’industrie pharmaceutique et médico-technique s’emploie activement à le faire croître. Dans le domaine des soins de santé comme dans d’autres domaines essentiels de notre vie, croire que la « main invisible » du marché contribuera au bien commun est donc une grave erreur.

 

Pour résumer cette seconde partie, le modèle biomédical et l’économie capitaliste ont favorisé le développement d’une médecine hautement technique dépossédant les personnes de la gestion de leur santé et faisant l’impasse sur les facteurs psychosociaux, pourtant essentiels à la compréhension de nombreuses pathologies. La décroissance technique des soins de santé aurait le double avantage d’en réduire l’empreinte environnementale et d’augmenter significativement la santé dans certaines pathologies – notamment en déplaçant le focus de l’organe à la personne. Ceci permettrait de réserver la technique aux domaines dans lesquels elle apporte une plus-value indiscutable. Dans les paragraphes qui suivent, nous décrirons les grandes lignes d’une approche durable de soins de santé, avant d’en discuter plus en détails certains aspects et implications.

 

III. Pistes vers des soin de santé durables

D’abord réduire le besoin de soins

 

On pourrait définir les soins de santé durables comme la capacité d’un système de soins de santé de délivrer et maintenir dans le temps des soins de qualité, en tenant compte des générations futures. Pour répondre à cet objectif, plusieurs principes ont été dégagés[59]. On y retrouvera la philosophie des « 4R » (réduire, réutiliser, réparer, recycler… que certains font précéder du E de éviter).

Dans un premier temps, on visera à diminuer l’activité de soins. Cet objectif est décliné en trois stratégies : (1) réduire les besoins en adoptant des démarches de prévention et promotion de la santé, (2) réduire la demande en favorisant l’auto-gestion de leur santé par les individus et enfin (3) réduire les gaspillages en adoptant des stratégies de gestion « lean » (ou gestion au plus juste).

Ensuite, et ensuite seulement, on proposera des stratégies permettant de diminuer l’intensité carbone des activités de soins, d’une part en utilisant/développant des alternatives bas carbone aux soins existants et d’autre part en optimalisant l’utilisation des ressources et la gestion des déchets.

Ces différents domaines, ainsi que leur déclinaison en stratégies et exemples concrets, sont résumés dans le tableau 3 et discutés plus en détail dans les paragraphes ci-dessous.

 

Tableau 3 : stratégies possibles pour des soins de santé durables, inspiré de Mortimer[60]

Objectif principal : Décarboner sans réduire la santé
D’abord réduire l’activité de soins de santé
Domaine Stratégies Exemples
Prévention Agir sur les déterminants sociaux, économiques et environnementaux de la santé Accès aux études, logement, précarité, pollution…
Dépister et traiter rapidement certaines pathologies Diabète, hypertension, certains cancers… dont la gestion précoce permet d’améliorer le pronostic
Promouvoir les comportements favorisant la santé Hygiène de vie (sport, tabac, alimentation…)

Gestion du stress

Patient-acteur Informer, éduquer Déconstruction d’une vison « high tech » de la médecine qui génère des attentes inadéquates
Promotion de comportements de santé
Démédicalisation de la santé (insomnie, vieillissement, stress, impuissance…)
Favoriser l’auto-gestion de la maladie Meilleure connaissance et auto-gestion de la maladie, y compris l’accès du ou de la patiente à son dossier médical
Approches centrées sur le ou la patiente
Stratégies d’« Empowerment » du ou de la patiente
Favoriser une approche communautaire de la santé Groupes de soutien
« Community-based rehabilitation »
Gestion « au plus juste » (« Lean ») Réduire les traitements inappropriés Déprescription de médicaments inutiles (ex. somnifères)
Utilisation parcimonieuse de l’imagerie médicale (ex. lombalgie)
Recours à la pratique fondée sur les preuves (EBP) pour limiter certaines interventions aux situations dans lesquelles elles sont réellement indiquées (ex. césarienne)
Améliorer les trajets de soins Renforcement des soins de première ligne
Fluidification et intégration des trajets de soin
Utilisation d’outils de « télésanté » permettant des consultations ou des concertations multidisciplinaires à distance
Ensuite réduire l’intensité carbone des soins de santé
Domaine Stratégies Exemples
Utilisation et développement d’alternatives bas carbone Redéfinir l’utilité Prise en compte de la dimension sociale et environnementale des soins dans les calculs d’efficience
Repenser les procédures Chirurgie de la cataracte en Inde
Chercher des alternatives bas-carbone aux traitements actuels Alternatives au pharma-pétrole, prescription durable, phytothérapie

Accès à la nature, mindfulness, activités sportives et artistiques

Ambulanciers à vélo

« Chiens renifleurs » pour le dépistage de masse de certaines affection (Covid-19)

Meilleure utilisation des ressources opérationnelles Mieux gérer les déchets Remplacement du matériel à usage unique par du matériel réutilisable
Amélioration du tri, notamment pour éviter de traiter des déchets banals comme des déchets « infectés », plus coûteux à détruire
Améliorer la gestion des eaux Réduire la consommation d’eau (ex. lavage des mains au bloc opératoire)

Recycler les eaux usées (ex. eau de la dialyse dans les WC)

Optimaliser la consommation énergétique des bâtiments et des modes de transport Isolation des bâtiments, adaptation des transports publics,…

 

 

Prévention : le rôle essentiel de l’Etat

 

Contrairement à ce que l’on pourrait peut-être imaginer, la qualité des soins de santé d’un pays ne rend compte que de 15 à 43% des variations de santé entre individus. Les déterminants principaux de la santé sont socio-économiques et environnementaux, expliquant 45 à 60% de l’état de santé[61]. On peut classer ces influences en quatre niveaux[62] : (1) les comportements et modes de vie des individus, qui sont modulés par (2) le contexte social et communautaire et (3) les conditions de vie (enseignement, travail, logement, accès aux services essentiels, pollution…) et enfin (4) les conditions politiques et culturelles globales qui, en dernière analyse, déterminent largement les niveaux précédents.

En Belgique comme ailleurs, on note des inégalités de santé importantes en fonction du niveau d’éducation[63] : par comparaison aux personnes ayant terminé des études supérieures, les personnes ayant un niveau d’éducation bas ont une espérance de vie en bonne santé inférieure de 10.5 ans pour les hommes et 13.4 ans pour les femmes, et la différence s’est aggravée entre 2001 et 2011. Le lieu de vie est également un facteur important[64] : le risque de décès dans l’année des personnes vivant dans les quartiers les plus pauvres du pays est augmenté de 56 % par rapport aux personnes vivant dans les quartiers les plus riches.

Un exemple frappant de l’influence des conditions de vie sur la santé a été apporté récemment par la réduction du nombre de naissances prématurées pendant les périodes de confinement, en Belgique[65] comme ailleurs[66], possiblement en raison d’un certain apaisement du rythme de vie, malgré le stress lié à la pandémie.

Ces observations soulignent le rôle crucial de l’Etat dans la réduction des inégalités sociales et donc de santé, rappelant ainsi que les préoccupations sociales et environnementales sont synergiques et non concurrentes. Des politiques volontaristes de soutien scolaire et professionnel ainsi que d’amélioration des conditions de vie et de logement devraient être une priorité pour augmenter la santé physique et mentale de la population et ainsi réduire les besoins de soins de santé. Investir plus de moyens dans ces politiques permettrait ainsi à moyen terme de réduire les dépenses en soins de santé curatifs.

L’impact potentiel de ces stratégies est nettement supérieur à celui des stratégies de prévention classiquement dévolues aux soignant·es, qui restent cependant utiles si elles sont bien balisées (pour ne pas transformer en patient·es des gens bien portants) : prévention primaire visant à éviter l’apparition de maladies (par exemple la vaccination) et prévention secondaire pour limiter les complications des maladies (dépistage et traitement précoce de pathologies comme le diabète, l’hypertension ou certains cancers).

Un autre domaine des démarches de prévention est la promotion d’un mode de vie sain. Dans notre pays, les pathologies expliquant la différence de mortalité entre groupes sociaux plus ou moins éduqués – essentiellement les maladies respiratoires et cardiovasculaires  – sont corrélées aux différences de mode de vie : tabagisme, pollution, stress, alimentation[67]… Le message qui en découle semble simple : chaque individu est responsable de sa santé et peut améliorer celle-ci en adoptant une nourriture équilibrée, en faisant du sport, en évitant tabac et alcool… mais est-ce si facile ?

 

Rendre les rênes au sujet

 

Quoique nombreux soient les praticien·nes qui revendiquent une approche « centrée sur le patient » et/ou faisant appel à l’« empowerment » du ou de la patiente, dans la pratique il s’agit encore malheureusement d’approches minoritaires. Mais de quoi parle-ton ?

Les approches centrées sur les patient·es désignent des pratiques dans lesquelles les patient·es, leurs familles et les professionnel·les de santé s’engagent dans une collaboration active pour prendre des décisions partagées afin de mettre en place un plan de traitement personnalisé et global[68]. L’empowerment quant à lui – parfois traduit de manière quelque peu réductrice par « autonomisation » – désigne « un processus de transformation personnelle par lequel les patients renforcent leur capacité à prendre effectivement soin d’eux-mêmes et de leur santé, et pas seulement de leur maladie et de leur traitement »[69]. Dans les deux cas, il s’agit de considérer le ou la patiente comme étant le principal acteur de sa santé et donc de sortir d’une relation paternaliste dans laquelle les soignant·es sauraient mieux que le ou la patiente ce qui est bon pour elle. L’amélioration de la qualité des soins qui en découle n’est plus à discuter[70] mais pourtant, comme dans le cas du modèle biopsychosocial, la pratique laisse largement à désirer. Peut-être qu’une des raisons de cette difficulté est que ces approches font appel chez les soignant·es à d’autres compétences que celles qui sont habituellement enseignées ?

En effet, elles impliquent de pouvoir faire confiance au potentiel de croissance des patient·es, de les soutenir dans une démarche de reprise de confiance en soi, de compréhension de la maladie et ses implications, d’élaboration d’un nouveau projet de vie qui puisse « faire sens » tout en tenant compte des limitations imposées par la maladie, d’acquisition d’outils d’auto-gestion, de raisonner en termes de qualité de vie plutôt que de contrôle de symptômes mesurables,… le tout dans un contexte socio-économique favorisant des comportements irresponsables et diffusant massivement des « fake news » qui ne favorisent pas le dialogue.

Pour les soignant·es, cela peut-être une véritable révolution qui nécessite des capacités relationnelles, éducatives et de communication. Ces habiletés sont souvent peu et mal enseignées dans les facultés et hautes écoles, partiellement parce que leur utilité est sous-évaluée face à un corpus théorique massif, mais également pour des motifs pratiques (comment travailler la relation thérapeutique avec un auditoire de 400 étudiants ?). Elles nécessitent également du temps… denrée de plus en plus rare dans l’organisation actuelle des soins de santé.

L’ « acte intellectuel » désigne ce que fait tout·e soignant·e lorsque, « à mains nues » il ou elle prend le temps d’écouter la personne qui consulte, de l’interroger, de l’examiner, de réfléchir (seul, avec elle, son entourage et/ou en équipe) sur son problème de santé et les solutions qui peuvent y être apportées et de l’accompagner dans la mise en œuvre des options choisies[71]. Cet acte intellectuel est actuellement beaucoup moins bien financé que les actes techniques, alors qu’il est essentiel à la réalisation de soins de qualité. Un effet pervers de cette situation est que cela incite médecins et hôpitaux à « pousser à la consommation » en matière d’imagerie, d’analyses de laboratoire ou de prestations interventionnelles, et ce pour des motifs de rentabilité financière – les intérêts financiers des patient·es, des hôpitaux et de la société étant ici divergents. Ceci contribue à entretenir la croyance que des soins de qualité ne peuvent être que techniques et à déposséder les patient·es de la gestion de leur santé. Une autre conséquence est le risque de négliger l’influence de leur entourage… pour le meilleur et pour le pire.

 

Développer le soutien communautaire

 

Dans une étude, des patients de sexe masculin effectuaient un test d’effort sur tapis roulant trois semaines après un infarctus. Leurs épouses étaient invitées soit à rester en salle d’attente, soit à assister au test, soit à réaliser un test en même temps que le patient. Seules les épouses du troisième groupe ont développé une confiance adéquate dans les capacités physiques de leur mari. Lors d’un nouveau test d’effort réalisé 6 mois plus tard, leurs maris ont montré de meilleures performances que les hommes des deux autres groupes. Les auteurs concluent que, confiantes dans les capacités physiques de leur mari, ces épouses les ont soutenus dans leur réadaptation et ont ainsi contribué à leur guérison[72]. Dans une autre étude réalisée après pontage coronarien, impliquer le conjoint dans le programme de réadaptation a permis d’améliorer et de maintenir à moyen terme l’adhérence aux recommandations diététiques[73].

Chez des personnes souffrant de diabète de type 2, une corrélation a été trouvée entre d’une part des manœuvres de « sabotage » du conjoint (tenter le patient avec des aliments interdits et/ou montrer un manque d’intérêt pour ses efforts diététiques) et d’autre part une faible adhérence aux recommandations diététiques ainsi que (dans une moindre mesure) une élévation du taux de glucose sanguin[74]. En revanche, les groupes de soutien rassemblant des patient·es diabétiques permettent d’améliorer le contrôle glycémique[75].

D’autres études concernant les groupes de pairs ont montré leur intérêt, par exemple dans le sevrage tabagique[76] ou chez des patientes souffrant de cancer du sein, pour autant que les groupes soient modérés et que leurs animateurs soient correctement formés[77].

Ces quelques exemples montrent l’intérêt d’associer l’entourage direct des patient·es à la gestion de leur santé, ainsi que l’utilité des « groupes de pairs ». Ces interventions à faible impact environnemental contribuent à soutenir les patient·es dans l’auto-gestion de leur santé.

D’autres acteurs et actrices incontournables de cette démarche sont bien sûr les soignant·es de proximité.

 

Renforcer la première ligne de soins

 

On peut distinguer aux moins deux raisons de sécuriser et développer des soins de proximité et multidisciplinaires (médecins généralistes, infirmier·es, kinésithérapeutes, pharmacien·nes, psychologues,…). D’une part, une première ligne de soins forte est corrélée à de meilleurs indicateurs de santé de la population pour un coût plus faible, un moindre recours aux services d’urgence et aux hospitalisations ainsi qu’une plus grande équité dans l’accessibilité des soins[78]. D’autre part, les soins de santé de proximité ont un impact environnemental plus faible que les soins de deuxième ligne et les soins hospitaliers, probablement tant en raison d’un moindre recours aux techniques que de la limitation des déplacements. Si en 2019, le NHS a émis 6.1 mégatonnes d’équivalents CO2, seulement 167 kilotonnes (2.7%) étaient attribuables aux soins de première ligne[79]. On peut également ajouter que la proximité favorise une bonne connaissance du contexte de vie des patient·es et ainsi des interventions communautaires ciblant les déterminants socio-économiques de la santé. Pourtant, dans beaucoup de pays industrialisés, un déséquilibre entre soins de première ligne et soins spécialisés persiste pour diverses raisons, notamment financières, de prestige et de qualité de vie pour les soignant·es[80].

En Belgique, la 6e réforme de l’état a transféré aux régions l’organisation des soins de santé de première ligne. Sur papier, un consensus semble exister sur l’importance de ce domaine, qui pourrait assurer la gestion de 90% des problèmes de santé, dans une perspective de soins globaux, de proximité et multidisciplinaires. Cependant, les soins de santé de première ligne sont encore peu structurés en Belgique francophone et ils doivent faire face à de nombreux défis[81].

Le modèle des maisons médicales, qui proposent une approche multidisciplinaire intégrée et de proximité à des populations souvent défavorisées, mériterait d’être renforcé. Une étude du KCE[82] montre que les maisons médicales au forfait ne coûtent pas plus cher à l’INAMI que la médecine à l’acte, pour un niveau de qualité égal en termes de traitement des pathologies analysées et supérieur pour les activités de prévention. Le recours à la deuxième ligne (consultations et hospitalisations) est moins fréquent et les dépenses de médicaments sont moindres – ce qui peut faire supposer un impact environnemental réduit également. Last but not least, l’absence de ticket modérateur permet une meilleure accessibilité des soins aux personnes défavorisées.

Il est donc essentiel de poursuivre les efforts de renforcement et de revalorisation des soins de santé de première ligne, tant pour des motifs de qualité que pour réduire l’impact environnemental des soins de santé et améliorer leur résilience face aux défis futurs[83]. Dans cette perspective, il sera également important d’améliorer les « trajets patient·es » entre les différents niveaux de soins.

 

Fluidifier les trajets de soin et utiliser les technologies d’information et de communication

 

Beaucoup d’entre nous, patient·es ou soignant·es, avons pu expérimenter combien le parcours des patient·es dans notre système de soins de santé peut être parfois chaotique. Résultats d’examens manquants avant une consultation ou une intervention qui doivent donc être postposées, patient·es référé·es par erreur et parcourant parfois plusieurs dizaines de kilomètres pour rencontrer un.e spécialiste non compétent·e pour leur problème, partage d’informations insuffisant entre prestataires de soins, patient·es consultant de leur propre initiative des spécialistes dans différents hôpitaux dans lesquels le même bilan est répété à plusieurs reprises,… ou parfois facteurs de risque et signes d’alerte qui passent « sous les radars », laissant ainsi se développer des pathologies dont le traitement aurait été facile si elles avaient été prises à temps.

Beaucoup de ces situations tirent leurs racines d’un manque de coordination entre soignant·es, de difficultés d’accès au dossier des patient·es (même s’il s’améliore peu à peu, le partage électronique de données des patient·es – organisé par la plateforme e-health[84] sous le contrôle de différentes institutions – reste aléatoire du point de vue du clinicien), couplés ou non à l’absence ou à la non-observance de guides de bonne pratique clinique basés sur la littérature scientifique.

Diverses initiatives – non exclusives – peuvent aider à répondre à ces situations. Le développement des réseaux multidisciplinaires locaux qui commencent à se mettre en place et le financement d’une fonction de coordination des soins permettraient de fluidifier le parcours des patient·es et d’améliorer la communication entre soignant·es. L’amélioration du réseau e-health, en favorisant l’accès aux données des patient·es, permettrait notamment d’éviter de dupliquer certains examens ou de négliger des co-morbidités potentiellement dangereuses. Les technologies d’information et de communication (avec bien entendu les balises éthiques et de sécurité nécessaires) peuvent permettre dans certaines conditions des consultations à distance, par exemple pour des patient·es déjà connu·es, et/ou des concertations interdisciplinaires, par exemple entre d’une part le ou la patiente et son/sa généraliste (dans le cabinet de ce·tte dernier·e) et d’autre part un ou plusieurs spécialistes hospitalier·es. Le développement et la promotion de guides de pratique clinique pertinents et adaptés à notre contexte permettraient d’améliorer la qualité des soins.

Un exemple en Belgique est celui des trajets de soins destinés aux personnes souffrant de diabète de type 2 ou d’insuffisance rénale chronique[85]. Mis en place en 2009, il s’agit de contrats signés entre le ou la patiente (dont le rôle actif est souligné), son/sa généraliste qui coordonne les soins et le/la spécialiste qui agit en soutien. Dans ce contexte, les consultations médicales sont intégralement remboursées, le/la patient·e a accès à divers services (podologue, diététicien,…) et équipements (matériel de testing de la glycémie par exemple). Des guides de bonne pratique clinique ont été développés. Une évaluation menée par Sciensano montre une amélioration de la qualité des soins[86]. Le rapport coût-bénéfice n’a pas été évalué dans cette étude, on peut imaginer qu’il sera positif si les trajets de soins permettent de limiter les complications de ces maladies chroniques.

Notons cependant que les évaluations coût bénéfice traditionnelles sur lesquelles sont basés les guides de pratique clinique ne prennent pas (encore ?) en considération la dimension environnementale et sociale des soins.

 

Redéfinir la « valeur »

 

Nous l’avons vu, l’evidence-based practice a pour objectif d’évaluer la qualité des interventions en santé. Elle définit la « valeur » d’une intervention comme étant le rapport entre ses résultats (modification de la santé des individus), et son coût financier « direct » (le prix des équipements, déplacements et fournitures, ainsi que les salaires du personnel). Cette définition néglige l’impact environnemental et sociétal des soins, dont le coût élevé est externalisé, c’est-à-dire reporté sur la collectivité. C’est la raison pour laquelle F. Mortimer et ses collègues ont proposé une définition élargie de la « valeur » comme étant le rapport entre d’une part les résultats de l’intervention en termes de santé (des patient·es et de la population) et d’autre part les impacts financiers, environnementaux et sociétaux de cette intervention. Divers outils concrets sont proposés pour intégrer les dimensions environnementales et sociétales dans les démarches qualité[87].

Cette approche, qui pose un certain nombre de défis méthodologiques et logistiques, est recommandée et enseignée en Grande-Bretagne par le Center for Sustainable Healthcare[88] et mériterait d’être développée, afin d’aider clinicien·nes, gestionnaires et dirigeant.es à évaluer l’impact global des interventions de soins de santé et ainsi concevoir et sélectionner des soins de qualité à faible impact environnemental et sociétal.

 

Développer des alternatives bas carbone

 

Comme discuté plus haut, la croyance élevée en la puissance d’une médecine techno-scientifique ainsi que le lobbying de l’industrie ont favorisé le développement de soins de santé polluants et grands émetteurs de CO2. Pourtant, dans certains cas, des alternatives moins gourmandes et moins polluantes existent. Parfois surprenantes voire choquantes, celles-ci sont souvent inspirantes. Nous en épinglerons ici quelques exemples : les alternatives au pharma-pétrole et la prescription durable, l’adaptation des pratiques opératoires et de dialyse, l’accès à la nature, l’utilisation de chiens renifleurs, ou des ambulanciers à vélo.

Nous l’avons vu, beaucoup de médicaments (de l’aspirine aux anticancéreux) sont dérivés de produits pétroliers. Cependant, des voies de synthèse alternatives sont souvent possibles et leur coût plus élevé pourrait ne pas avoir d’impact majeur sur le coût total, puisque les frais de production ne constituent qu’une petite fraction du prix du marché de la plupart des médicaments. Ceci nécessiterait cependant des efforts importants de la part des producteurs et l’agrément des offices de certification (Food and Drug Administration aux USA, Agence Européenne des Médicaments chez nous), agrément souvent très lent à obtenir[89]. Par ailleurs, des améliorations significatives sont possibles au niveau des emballages ou du mode de délivrance (à efficacité comparable, certains inhalateurs utilisés dans le traitement de l’asthme ont un impact environnemental beaucoup plus élevé que d’autres[90]). Outre l’amélioration des processus de fabrication des médicaments et de leurs emballages, des bénéfices environnementaux et financiers substantiels peuvent être obtenus d’une adaptation des pratiques de prescription. Les principes de « prescription durable » incluent notamment la prescription de conditionnements plus petits et justes suffisants pour le traitement prévu, la prévention des doubles prescriptions (vérifier ce que les patient·es ont déjà à domicile, limiter les confusions entre médicaments génériques et originaux,…), la déprescription lorsque le traitement n’est plus nécessaire, la réévaluation de dates de péremption parfois trop prudentes, la destruction des médicaments périmés dans des conditions contrôlées[91]. On pourrait également favoriser des projets de recherche en phytothérapie permettant d’évaluer correctement l’intérêt et les modes d’utilisation de plantes disponibles localement. Notons qu’un tel projet, comme beaucoup d’autres, nécessiterait un financement par les pouvoir publics car il ne serait pas industriellement rentable.

Une étude a comparé l’empreinte CO2 de la chirurgie de la cataracte dans deux systèmes de soins tout à fait différents : un service de référence de pointe en Grande-Bretagne et deux services à Aravind (Inde)[92]. Les pratiques utilisées en Inde sont de celles qui feraient frémir la plupart des chirurgiennes et chirurgiens occidentaux : il s’agit d’une approche « haut volume » traitant 750 à 1000 patient·es par jour. Chaque chirurgien·ne travaille sur deux tables d’opération contiguës permettant d’enchaîner plus vite les interventions. Le microscope opératoire passe d’une table à l’autre. Les gants chirurgicaux sont désinfectés au gel hydroalcoolique entre deux interventions et ne sont changés que tou·tes les dix patient·es. Blouses et masques sont gardés toute la journée. Les instruments chirurgicaux sont brièvement autoclavés entre chaque intervention et désinfectés plus en profondeur chaque nuit. Le résultat est surprenant : la qualité des soins et le taux de complications sont similaires, mais avec une empreinte CO2 réduite à 5% des observations effectuées en Grande-Bretagne.

L’hémodialyse fait partie des soins de santé à haut impact environnemental, en raison d’une consommation élevée d’eau (120 à 500 litres par séance et par patient·e soit 18 à 78 mille litres par an pour un·e patient·e traité·e 3x/semaine) et d’énergie (chaque séance de dialyse consomme autant d’électricité qu’un ménage moyen pendant 24h), ainsi que de la production d’un volume élevé de déchets (1.5 à 8 kg par séance, essentiellement des plastiques). Diverses possibilités d’amélioration existent, par exemple la récupération de l’eau pour alimenter les toilettes ou arroser les jardins (voire en agriculture), des améliorations techniques permettant d’améliorer l’efficience des appareils de dialyse, l’utilisation de sources d’énergie renouvelables, une meilleure gestion des déchets. Ces stratégies à impact environnemental favorable permettent également de réduire les coûts tout en garantissant la qualité du service fourni[93].

Dans un tout autre ordre d’idées, un article célèbre paru en 1984 dans la prestigieuse revue Science compare l’évolution de deux groupes de patient·es après cholécystectomie[94]. Toutes autres choses étant égales, les patient·es séjournant dans une chambre dont la fenêtre donnait sur un bosquet d’arbres évoluaient plus favorablement (moindre durée d’hospitalisation et moindre consommation d’antalgiques) que celles et ceux qui ne pouvaient voir qu’un mur de briques. Des données scientifiques croissantes (quoique parfois de faible qualité méthodologique) tendent à confirmer un impact positif de l’accès à la nature sur la santé. Par exemple, des interventions thérapeutiques basées sur la forêt ont montré une amélioration de l’hypertension, du stress, de la dépression et l’anxiété[95]. Le projet « NHS Forest », lancé en 2009, a pour objectifs de favoriser l’accès des patient·es et du personnel de santé à des espaces verts, pour améliorer leur santé et leur bien-être, notamment en plantant des arbres sur les terrains appartenant au NHS[96]. Remarquons que cette initiative est doublement utile puisqu’elle a également des bénéfices environnementaux directs (capture de CO2, régulation des températures locales, amélioration de la biodiversité,…).

De manière peut-être plus anecdotique, les médias se sont fait l’écho de l’utilisation de chiens renifleurs pour le dépistage d’infections à Covid-19[97]. Lorsqu’on creuse la littérature, on observe effectivement des données encourageantes (avec des chiens mais aussi des rats ou des souris) pour le dépistage de pathologies telles qu’infections à Covid-19[98], clostridium difficile, E. Coli, tuberculose, ou malaria[99], dans la détection d’hyper- ou d’hypoglycémies chez le diabétique[100] ou pour le dépistage de certains cancers[101]. Ces observations ouvrent des pistes qui mériteraient d’être explorées, potentiellement moins coûteuses et moins polluantes que les tests de laboratoire (qui seraient alors réservés à la confirmation des cas suspects). Elles nécessitent bien entendu des balises sérieuses protégeant le bien-être des animaux concernés.

Enfin, dans la très embouteillée ville de Londres, une expérience d’ambulanciers à vélo primée par le NHS a montré de nombreux bénéfices par comparaison à un service d’ambulance classique : vitesse d’arrivée sur les lieux réduite permettant un triplement du taux de survie des patient·es victimes d’arrêt cardiaque, réduction du recours aux services classiques (50% des incidents peuvent être résolus immédiatement), économie annuelle estimée à 2.7 millions de Livres Sterling, réduction des émissions de CO2… tout en améliorant la condition physique du personnel concerné[102].

On voit donc qu’il est possible dans de nombreux cas de développer des soins dont l’impact environnemental réduit n’entame pas la qualité, au contraire. En parallèle, il faudra identifier, parmi les approches thérapeutiques à empreinte environnementale élevée, celles qu’il faudra maintenir en raison de leur valeur importante et de l’absence d’alternative. Ces traitements, mais aussi les soins plus économes en carbone, seront vraisemblablement dépendants de moyens matériels et humains incompressibles.

 

Sécuriser les approvisionnements

 

La crise sanitaire a illustré les limites d’une économie globalisée dans laquelle l’accès au matériel de soin indispensable (tel que les masques FFP2), souvent produit au bout du monde, est susceptible de s’interrompre brutalement (qu’il s’agisse d’un manque de matières premières, de blocage des transports ou de motifs géostratégiques). Diverses stratégies doivent donc être mises en œuvre pour assurer l’approvisionnement des ressources nécessaires, notamment en relocalisant la production et/ou en faisant des réserves stratégiques.

 

Encourager et soutenir le changement

 

Les pistes esquissées ci-dessus impliquent des modifications profondes du système de soins de santé. Elles ne seront possibles que si chacun – politiques, gestionnaires institutionnels, soignant·es et population – s’y implique et elles nécessitent des actions volontaristes dans plusieurs domaines.

 

L’organisation et les normes d’accréditation des soignant·es et des institutions doivent être adaptées aux défis de la transition. Au Royaume-Uni, le NHS a décrété un objectif Zéro carbone pour 2040 concernant les émissions qu’il contrôle directement et 2045 pour les émissions qu’il peut influencer[103]. Les émissions de CO2 ont été réduites de 18.5% entre 2007 et 2017, la consommation d’eau a été diminuée de 21% entre 2011 et 2017[104]. A quand des initiatives semblables en Belgique ?

Pour atteindre de tels objectifs, soignant·es et gestionnaires ont besoin d’informations et d’outils adéquats. L’expérience montre que nombreux sont les soignant·es qui se sentent préoccupé·es par la situation actuelle et ses défis, mais qui se sentent démuni·es et isolé·es. En Belgique, des initiatives de transition dans le domaine des soins de santé existent[105], mais elles sont dispersées, basées sur des volontés locales et sans grande visibilité. Identifier les personnes, groupes et institutions motivées serait grandement favorisé par une plateforme de rencontre, de partage d’expériences et de diffusion d’information. Une source d’inspiration pourrait être le « Centre for Sustainable Healthcare[106] », une ONG située à Oxford, qui a développé divers outils théoriques et pratiques et organise des formations et partages d’expériences pour les professionnels. D’autres initiatives du même ordre existent, par exemple le Nordic center for Sustainable Healthcare[107] dans les pays scandinaves ou le Centre for Sustainable Health Systems[108] au Canada ou même des initiatives supra-nationales telles que le groupe Health Care Without Harm, qui constitue une réseau d’institutions hospitalières autour de différents projets[109].

Par ailleurs, le financement des soins de santé doit être adapté à ces nouveaux défis. Il est notamment important de revaloriser les soins de première ligne et l’acte intellectuel, tout en menant des programmes ciblant les déterminants socio-économiques de la santé. Les normes de financement des soins ainsi que les politiques d’accréditation doivent être revues pour soutenir – voire imposer – les projets de transition.

 

Enfin, l’enseignement doit apporter aux futur·es soignant·es des outils adaptés aux défis du futur : sensibilisation aux enjeux environnementaux des soins de santé, valorisation de la médecine générale, intégration réelle du modèle biopsychoscial et de l’interdisciplinarité dans les pratiques (notamment en organisant des cours communs aux étudiant.es de différentes disciplines de soins), gestion des nouvelles pathologies qui se profilent, développement des compétences relationnelles, revalorisation de la sémiologie clinique pour limiter le recours aux examens paracliniques, etc. Certaines universités ont fait de la transition et de son enseignement un élément phare de leur plan stratégique[110]. Pour que ce type de projet s’étende, le soutien des pouvoirs publics est nécessaire.

 

Conclusion : plus qu’un changement de modèle, un changement de culture

 

Dans cet article, nous avons vu que santé, situation sociale des individus et environnement sont profondément liés. D’une part, les modifications environnementales et le contexte social affectent la santé des populations et d’autre part, le système de soins de santé tel qu’il fonctionne actuellement contribue à altérer l’environnement et dépend de ressources produites parfois de manière inéquitable ou de matières premières appelées à se raréfier dans le futur. Nous avons également brièvement analysé les fondements épistémologiques et économiques d’un modèle de fonctionnement promouvant une approche technique de la santé, coûteuse, polluante et parfois pathogène. Nous avons enfin esquissé quelques pistes permettant d’abord de réduire la consommation de soins de santé (approches préventives et de promotion de la santé, autogestion de la santé, réduction des gaspillages) et ensuite de développer des alternatives bas-carbone aux approches existantes.

 

Ces pistes nécessitent plus que des ajustements à la marge, elles imposent une refonte complète de la philosophie et de l’organisation des soins (tableau 4) : passage d’un modèle de soins curatifs, centrés sur l’hôpital et hautement techniques à un modèle qui reconnaît l’importance de politiques sociales volontaristes, une première ligne de soins multidisciplinaires forte et une décroissance technique ciblée faisant la part belle au modèle biopsychosocial tout en permettant le maintien de la technique là où sa valeur ajoutée est élevée.

Tableau 4 : Un changement de modèle impliquant de nombreux défis

Modèle actuel Modèle futur
Soins curatifs Prévention ciblant les déterminants socio-économiques et environnementaux de la santé
Actes techniques Décroissance technique ciblée, acte intellectuel
Médecine spécialisée Soins multidisciplinaires de première ligne
Financement à l’acte Financement au forfait, définition élargie de la « valeur »
Economie de marché Les soins comme un bien premier

 

Il s’agit d’une révolution profonde, qui rencontrera tellement de résistances que certains la qualifieront probablement d’illusoire. Elle pose cependant une question impossible à éluder : quels soins de santé, quel monde, imaginer pour nos vieux jours et, surtout, pour les générations qui nous suivent ?

Le risque est grand de voir se creuser encore les inégalités, en santé comme dans d’autres domaines, entre régions du monde mais également au sein de chaque pays. Nombreux sont les récits d’anticipation décrivant une société dans laquelle certain·es privilégié·es, vivant dans des espaces protégés à grands frais, auront accès à une médecine high-tech entretenant le phantasme de toute puissance contre la maladie et la mort. Les autres, tou·tes les autres, seront abandonné·es, seul·es face à la lutte pour la survie dans un environnement hostile, appauvri et toxique.

Face à ces dystopies, Rob Hopkins nous invite à imaginer le futur que nous souhaitons, pour ensuite mieux nous donner les moyens de le mettre en oeuvre[111]. Alors rêvons…  Le monde de demain pourrait être un monde dans lequel l’être humain (occidental) aurait accepté sa finitude et repris sa juste place dans une nature dont il est partie intégrante et non propriétaire. Un monde dans lequel chacun·e comprendrait que la solidarité est bonne pour toutes et tous et dont chacun·e serait acteur ou actrice. Un monde affranchi des contraintes de productivité effrénée, dépollué, privilégiant un mode de vie lent, sain et inclusif, à la fois ouvert et ancré dans les communautés locales. L’incidence de certaines pathologies (diabète, hypertension, stress, dépression…) y serait réduite. Les soins de santé seraient essentiellement délivrés localement, soutenant les personnes dans la gestion de leur santé tout en maintenant la technique à sa juste place. Chacun·e aurait les moyens matériels, émotionnels et intellectuels de gérer sa santé – en ce compris l’acceptation de ses limites et un rapport différent à la maladie et à la mort.

Utopie ? Comme dit en introduction, cette étude a surtout pour objectif d’ouvrir le débat.

 

Références

 

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[39] Souligné par l’autrice

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[46] « Iatrogène » se dit d’une maladie causée par le médecin ou un traitement (le grec ancien « iatros » veut dire médecin)

[47] Ivan B. Lin and others, ‘Disabling Chronic Low Back Pain as an Iatrogenic Disorder: A Qualitative Study in Aboriginal Australians’, BMJ Open, 3.4 (2013) <https://doi.org/10.1136/bmjopen-2013-002654>.

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[51] Une Enquête Sur Les Médicaments Contre Les Troubles Du Sommeil Révèle La Nécessité d’un Meilleur Suivi Médical (Agence fédérale des médicaments et des produits de santé (AFMPS), 2021) <https://www.afmps.be/fr/news/une_enquete_sur_les_medicaments_contre_les_troubles_du_sommeil_revele_la_necessite_dun>.

[52] Dans le but d’inclure tous les métiers de soin dans cette réflexion, l’autrice a choisi d’utiliser ce terme générique, plutôt que l’une ou l’autre de ses déclinaisons (evidence-based medicine, evidence-based physiotherapy, evidence-based nursing,..).

[53] A. Berquin, ‘La médecine fondée sur les preuves : un outil de contrôle des soins de santé ? Application au traitement de la douleur’, Douleur et Analgésie, 20.2 (2007), 64–72 <https://doi.org/10.1007/s11724-007-0040-9>.

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