L’irruption de la Chine comme sauveur de l’Europe au sommet du G20 de Cannes en novembre 2011 ne va rien faire pour améliorer la défense des droits de l’Homme en Chine. En effet, l’opinion publique occidentale, qui avait déjà largement tendance à considérer que leurs médias se penchaient trop souvent sur le cas de quelques personnalités médiatiques en difficulté, tels Ai Weiwei, Liu Xiaobo ou Hu Jia, et qu’il fallait laisser les Chinois se débrouiller entre eux pour régler progressivement leurs problèmes intérieurs, va se sentir confortée dans ce genre de certitudes. La Chine ne vient-elle pas de prouver avec éclat que, non seulement un pays communiste était capable de rester au pouvoir alors que les dictateurs tombaient les uns après les autres dans le reste du monde, mais aussi qu’elle savait mieux intervenir dans les marchés financiers que les pays dits développés eux-mêmes ?

Un comble, n’est-ce pas ? Du coup, les associations humanitaires qui viennent en aide aux plus démunis peinent déjà à rassembler des fonds pour alimenter leur action. Pierre Haski, qui est à l’origine d’une très belle initiative puisqu’il a lancé « Les enfants du Ningxia » pour aider à la scolarité de plusieurs centaines de petites filles dans cette province du Nord-Est, où de nombreux Chinois musulmans tentent de survivre dans des conditions climatiques difficiles, avoue qu’il a du mal à convaincre les donateurs à poursuivre leur aide. Ces derniers rétorquent : « Puisque la Chine est si riche, c’est à elle de prendre le relais et d’assurer la scolarisation de ses enfants. » Pierre Haski constate avec regret que, même si son association a réussi en l’espace de quelques années à créer une dynamique autour de quelques établissements scolaires du Ningxia, le gouvernement local n’a pas pris le relais et que, faute de soutiens financiers, ces enfants seront de nouveau renvoyés dans la pauvreté.

De leur côté, les internautes chinois protestent : « Pourquoi nos dirigeants vont-ils verser des milliards de dollars à l’étranger, alors que nous ne trouvons pas à nous loger avec nos salaires de misère, ni à soigner nos vieux parents dans des hôpitaux devenus de plus en plus onéreux ? » Poursuivons dans le paradoxe, et voyons ce que pensent les milliardaires chinois de leur propre pays. Et tout d’abord, combien sont-ils ? Il y aurait un million de Chinois millionnaires et 213 milliardaires en dollars, selon la revue Forbes, avec, en quatrième position Robin Li, fondateur du moteur de recherche Baidu et première fortune du pays avec 9,4 milliards de dollars. Les trois premiers sont des entrepreneurs. Selon une étude publiée en Chine même par le Hurun Report et la Banque de Chine, un sondage réalisé auprès de 980 millionnaires chinois montre que 46% d’entre eux pensent à quitter la Chine[[ In « latribune.fr du 31/10/2011

]]. Les raisons ? Ils trouvent que l’éducation des enfants (encore elle !), la rigidité du système qui freine la modernisation du pays, l’environnement social qui se dégrade et l’insécurité alimentaire sont des raisons suffisantes pour aller tenter l’aventure ailleurs. Un autre sondage réalisé par China Merchants Bank et Bain & Co montre aussi que 27% de ceux qui étaient à la tête de fortunes dépassant la dizaine de millions d’euros avaient déjà émigré, et que 47 % se préparaient à émigrer[[ In CNBC.com, article de Shaun Rein publié le 12/9/2011

]] ! Là encore, les raisons invoquées sont l’éducation des enfants, la pollution des grandes villes chinoises, la santé, la qualité de la vie. Personne n’évoque directement le fait que les milliardaires sont fréquemment la cible des attaques de la justice chinoise et que tous les ans, l’un ou l’autre d’entre eux se retrouve derrière les barreaux, ou carrément condamné à mort, mais il est facile d’imaginer que ce genre de détail pèse lourd dans leur désir de posséder un passeport étranger, ou au moins un permis de résidence à l’étranger.

Poursuivons l’enquête auprès des super-nantis et posons-nous la question qui fâche : si les droits de l’homme étaient réellement respectés en Chine, ses riches ressortissants ne s’y sentiraient-ils pas plus en sécurité ? Dans un article décrivant l’oligarchie chinoise, la chercheuse Valérie Niquet remarque que l’élite chinoise a réussi à sortir 123 milliards de dollars pour la seule année 2010[[ french.china.org.cn 22/6/2011.

]], soit un peu plus que ce que la Chine a proposé au sommet du G20 à Cannes pour aider l’Europe à sortir de la crise. « Comme dans la Chine du Guomindang si décriée, la corruption est partout, gangrène régulièrement dénoncée, mais contre laquelle le parti ne peut lutter tant elle est inscrite dans le système lui-même. » Nous y voilà ! La corruption nous ramène directement à notre sujet : qui dit corruption dit abus de pouvoir, qui dit abus de pouvoir dit violence, et la violence est devenue le moteur de la société chinoise.

Des incidents de masse aux enlèvements, des expulsions brutales aux immolations par le feu, des explosions de colère mettant les villes sens dessus dessous, des lourdes condamnations aux intimidations par la torture, les événements rapportés quotidiennement par la presse en Chine, les journalistes de Hong Kong, les internautes et les twitters, ainsi que la presse occidentale, rien n’est fait pour rassurer le lecteur concernant la douceur de vivre à la chinoise. Même l’expression weiwen (maintenir la stabilité, qui est une contraction de weichi wending) est associée maintenant au caractère fei (frais). Autrement dit, le concept de « stabilité » est directement à celui de la répression puisque la question est de savoir combien vont coûter les frais (weiwenfei) associés au maintien de ce délicat équilibre. La réponse a été donnée en mars 2011, lorsque le budget de la police a été porté à 624 milliards de yuan, soit un peu plus que le budget de la défense nationale.

Le cas le plus emblématique des méthodes du weiwen est celui d’un avocat aveugle du nom de Chen Guangcheng, dont la situation attire l’attention d’un nombre de plus en plus considérable de gens à l’intérieur et à l’extérieur de la Chine. Cet homme aura fêté son quarantième anniversaire, le 12 novembre 2011, dans des conditions d’autant plus difficiles à imaginer qu’il est littéralement soustrait de la vue du monde depuis de nombreux mois. Parce que Chen Guangcheng s’était aventuré à défendre les victimes de pratiques dont personne n’a le droit de parler en Chine, les avortements forcés, il fut condamné à quatre ans et trois mois de prison. Après avoir purgé sa peine, il a été reconduit chez lui par la police, dans son village de Dongshigu, à Linyi, dans la province du Shandong. Dès son arrivée, une surveillance constante du moindre de ses mouvements a empêché qui que ce soit d’entrer directement avec lui. Pire encore, sa femme, son enfant de six ans, et sa belle-mère, ont été pratiquement assignées à résidence en même temps que lui.

Au printemps 2011, Chen Guangcheng a réussi à enregistrer une vidéo de lui-même décrivant les conditions impossibles dans lesquelles il était condamné à survivre, et faisant un discours encourageant ses concitoyens à prendre leur destin en main, à utiliser tous les moyens possibles de communications pour se battre pour la démocratisation du pays, et à faire parvenir secrètement ce témoignage à des amis en-dehors de son district pour qu’il soit mis en ligne. Furieux, les vigiles chargés de sa surveillance l’ont sauvagement battu, ainsi que sa femme, pour leur faire passer le goût de la rébellion, mais l’affaire a tellement ému ses nombreux supporters que Chen Guangcheng est devenu une idole nationale. Des dizaines d’intellectuels connus se sont fait photographier avec des lunettes noires, comme en porte Chen, et nombreux sont ceux qui ont mis son portrait sur leur téléphone portable ou leur fond d’écran.

De plus une sorte de pèlerinage s’est créé autour de Dongshigu. Des journalistes, ou des avocats défenseurs des droits civiques ont tenté de s’en approcher, seuls ou en petits groupes, mais personne n’a réussi à passer la barrière invisible instaurée par les bandes de voyous qui ont été désignés pour effectuer ce genre de sale besogne. Certains ont été battus, d’autres dépouillés de leurs appareils photos, ordinateurs ou effets personnels, certains ont été emmenés ailleurs de force, et d’autres ont été plus ou moins gravement blessés. A chaque tentative, les participants postent le récit de leurs efforts en ligne, et ces tweets sont consultés plusieurs centaines de milliers de fois avant d’être effacés par la censure. En quelques mois, le prénom de Chen Guangcheng est même devenu une sorte de slogan politique : « Nous voulons la lumière (guang), nous voulons la sincérité (cheng) », qui appelle à l’émergence d’une nouvelle société. Et c’est sans doute grâce à cette pression populaire qu’une première victoire a été remportée : la fillette du couple Chen a été autorisée à se rendre à l’école. Il est pourtant difficile d’imaginer la mesquinerie des réactions au niveau local ! Maintenant que la petite peut, comme la plupart des enfants de son âge à la campagne, se rendre à l’internat durant la semaine, elle n’est plus autorisée à rentrer chez elle le dimanche.

Cette guerre souterraine qui se déroule autour du cas Chen pose la question des responsabilités : qui veut la peau de ce malheureux aveugle autodidacte ? Les autorités locales, au niveau du village ou du district, peuvent prendre quelques initiatives malheureuses, comme donner l’ordre de tabasser Chen tous les jours, ce qui est le cas, selon les dernières informations que nous avons pu obtenir. Elles ne peuvent toutefois pas exiger le budget nécessaire à une surveillance constante, nuit et jour, exercée à l’aide de dizaines de malfrats qui ne reculent devant aucune brutalité pour maintenir les curieux en dehors du périmètre du village, et faire régner la terreur dans le village. De plus, nombreux sont les militants chinois qui, ayant tenté d’approcher le village de Dongshigu, ont été retenus par la police, et maltraités dans des bourgades aux alentours, pendant plusieurs jours, sans qu’aucun d’entre eux puisse être défendu par une quelconque forme de légalité. Seul un dirigeant au plus haut niveau peut donner l’ordre d’une persécution aussi brutale, prolongée et inique. Alors ? De qui s’agit-il ? Hu Jintao, Wen Jiabao ou Zhou Yongkang ? Peu importe, au plus haut sommet de l’Etat, il a été décidé de faire de Chen Guangcheng un exemple à ne pas suivre, et la base, consciente du feu vert qui lui a été accordé, ne fait que refléter la violence de l’Etat en exécutant ses ordres. De plus, tout recul est devenu impossible : si le pouvoir cessait de persécuter Chen Guangcheng, ce serait une forme d’encouragement à tous ceux qui souhaitent protester contre un système de contrôle des naissances trop violent, ou tout autre abus de pouvoir en Chine.

Il existe d’autres victimes de ces décisions catégoriques du pouvoir. Ce qui varie, c’est leur exécution. Si Hu Jintao, par exemple déclare : « Personne ne peut approcher Liu Xiaobo, et nous ne céderons à aucune pression extérieure », la justice le condamne à onze ans de prison ferme, et ce n’est pas l’attribution du Prix Nobel de la paix qui va y changer quoi que ce soit. Même chose pour Gao Zhisheng, également avocat défenseur des droits civiques, qui est retenu quelque part et dont on est absolument sans nouvelles depuis mai 2010. En avril 2010, il était réapparu, suite à de très fortes pressions internationales et avait pu, durant les quinze jours de liberté dont il a profité, raconter les horribles tortures dont il avait été victime depuis sa première arrestation, en 2008. Pourquoi un tel acharnement ? La cause est claire : en défendant des membres du mouvement spirituel Falungong, Gao Zhisheng s’était aventuré dans l’une des nombreuses zones déclarées interdites par le pouvoir, qui persécute tous les adeptes de Falungong depuis 1999. Quant à des intellectuels comme Liu Xiaobo ou des artistes comme Ai Weiwei, ils font aussi office de modèle à ne pas suivre : « Vous prétendez que vous savez mieux que nous comment gouverner la Chine ? Voilà ce qu’il va vous en coûter. »

Depuis 2011, il ne suffit plus d’intimider la population à l’aide de quelques personnages emblématiques placés sous les verrous, il faut également condamner au silence des personnes un peu moins connues et leur instiller une terreur qui aura un effet prolongé sur leur entourage. Les cas des deux avocats défenseurs des droits civiques Teng Biao et Jiang Tianyong sont très révélateurs de ce nouvel état d’esprit. Teng Biao, fervent abolitionniste et infatigable défenseur des victimes d’une justice aveugle, a été kidnappé à deux reprises, une fois durant quelques jours en décembre 2010, l’autre fois, du 19 février au 29 avril. Il a été arrêté à l’issue d’une réunion avec ses collègues, où ils ont discuté des façons de venir en aide à Chen Guangcheng. Jiang Tianyong, arrêté en même temps que Teng Biao et tout aussi actif dans la défense des expropriés, des minorités ethniques opprimées, des condamnés après extorsion d’aveux sous la torture, a disparu jusqu’au 19 avril. Ce qui est particulièrement frappant dans le cas de ces deux hommes, c’est qu’ils n’ont recommencé à communiquer sur leurs blogs ou sur Twitter que plusieurs mois après leur retour à la maison. Le témoignage de Jiang Tianyong sur les conditions de son incarcération, rapporté seulement à la mi-septembre dans le South China Morning Post[[ Article de Ng Tze-wei du 14 septembre 2011.

]] , est poignant. Pendant soixante jours, personne n’a su où il se trouvait, et il a dû passer l’essentiel de son temps assis le dos droit, sans bouger, en regardant un mur. Il a aussitôt été violemment battu, parfois privé de sommeil pendant cinq jours d’affilée, souvent persécuté psychologiquement. Il se souvient avoir entendu une femme torturée dans la pièce à côté de la sienne durant la nuit du 21 mars. Il était persuadé qu’il s’agissait de sa propre épouse… Quand, plusieurs jours après, il a fini par comprendre qu’il ne s’agissait pas de sa femme, il était déjà si perturbé qu’il ne parvenait plus à dormir la nuit malgré un état de grand épuisement.

La question qui se pose est, évidemment, pourquoi Jiang Tianyong est sorti de sa réserve cinq mois après sa libération, pourquoi il a repris ses twit au mois d’août, et pourquoi il n’a pas été aussitôt arrêté, alors que les autorités policières lui avaient clairement signalé qu’il ne devait pas s’exprimer sur ses conditions d’incarcération. La réponse est complexe. Il est probable que l’effet de terreur provoqué sur Jiang par son incarcération a duré quelques semaines, et que sa famille, tout aussi effrayée, a fait pression sur lui pour qu’il se tienne coît pendant un moment. Et si, en septembre, il a tout de même accordé une interview à une journaliste de Hong Kong, c’est que, au fond, les autorités ne sont pas si mécontentes de faire indirectement savoir à toute la mouvance militante pour l’émergence d’une véritable société civile, le traitement qui leur sera réservé s’ils s’aventurent sur des terrains qui leur sont interdits.

Cette brève analyse de quelques cas particuliers de violations des droits de l’homme en Chine ne doit pas faire oublier les quelque cent mille incidents annuels reconnus par le gouvernement chinois. De tous côtés, et de toutes les couches sociales montent des revendications qui exigent satisfaction, et une volonté d’en découdre avec les décisions bureaucratiques contraires aux intérêts du peuple. La Lettre d’information de la Commission Enquête Chine[[ Pour s’abonner à cette lettre, le courriel est : comenchine@wanadoo.fr

]] est un bimensuel qui rend compte de l’évolution des conflits sociaux, de la vie du syndicat officiel AFCTU, et de ses ambiguïtés, de l’inflation, de l’évolution des chiffres du chômage, etc. Cette lettre décrypte, cas après cas, le contenu des revendications exprimées par les manifestants de ces innombrables « incidents ». Par exemple, le 8 septembre 2011, grève de dix mille ouvrières de la lingerie de luxe. Elles touchent entre 78 et 100€ par mois, et la réponse de la direction à une demande d’augmentation a été de proposer une prime inaccessible ! Il leur faudrait réaliser 40 pièces en 38 minutes pour augmenter leur maigre salaire. Le 23 septembre, plusieurs centaines de villageois de Lufeng, dans la province du Guangdong, ont protesté contre la saisie de terres par les autorités. Plus d’une douzaine de policiers ont été blessés et des bâtiments de la municipalité ont été saccagés. Le 10 janvier à Zhengzhou (province du Henan), des milliers de chauffeurs de taxi se sont mis en grève pour obtenir le retrait de la décision de la municipalité de faire travailler les 10 600 chauffeurs sept jours sur sept. Réponse des autorités locales : un millier de policiers ont été appelés en renfort pour maintenir l’ordre. Imaginez qu’il se produit à l’heure actuelle plus d’un « incident » de ce genre toutes les cinq minutes en Chine…

Un commentateur chinois, Liang Jing, analysait sur son blog, le 1er novembre 2011, les causes de cette violence en évoquant le cas de Zhili, bourgade du Zhejiang où ont explosé des émeutes d’une brutalité inattendue en octobre 2011. Alors que, depuis la fin des années 1990, les cadres locaux se sont enrichis sur l’expropriation des paysans et la vente des terrains aux entreprises locales, ce filon commence à s’étioler, et il s’agit maintenant de chasser les petits patrons chinois au profit d’entreprises à capitaux étrangers, ou d’entreprises plus ou moins subventionnées par l’Etat. Ces entreprises, bénéficiant de capitaux plus importants, peuvent racheter les terrains à prix fort. Pour déloger les patrons locaux, la municipalité a décidé d’augmenter les impôts locaux, sans préavis ni concertation avec la population. Comme le résume Liang Jing, « la façon de régler les problèmes suit les mêmes recettes habituelles : d’un côté, l’on réprime et de l’autre, on bloque l’information. » Et de conclure : « Pour les fonctionnaires locaux et nationaux, le seul problème c’est d’éviter que les conflits ne prennent trop d’ampleur au cours de l’année en cours. L’attitude est simple : ‘si le prochain conflit est encore plus violent, peu importe, la responsabilité retombera sur les épaules de mon successeur, et je pourrai m’en laver les mains’. »

Pour le moment, Hu Jintao est à la tête du pays. Xi Jinping sera probablement son successeur. Personne ne sait ce que pense Xi Jinping, ni quelle sera sa stratégie pour calmer les tensions grandissantes au sein de la population. La plupart des observateurs estiment qu’il ne pourra pas faire autrement que poursuivre une politique répressive, car le moindre relâchement de la dictature permettrait à tous les conflits latents d’exploser simultanément, et le pouvoir ne pourrait plus reprendre la main. Que ce soit en Chine intérieure, au Tibet, au Xinjiang, le moteur actuel du gouvernement chinois tourne à la dynamite de l’explosion sociale.

On voit bien que seule l’émergence d’une véritable société civile, capable de se défendre, de s’appuyer sur une justice au-dessus du parti, et au service des citoyens, permettra de sortir de ce cercle vicieux. La prise de conscience de la société est de plus en plus aiguë, et le pouvoir se sent en sursis, c’est pourquoi sa réaction reste immuable : censure de la presse, contrôle de l’Internet, propagande à tout crin, et répression. Sa grande terreur est évidemment la réplique d’une révolution de Jasmin. Ce n’est pas un hasard si l’immolation par le feu de plus d’une dizaine de moines du monastère de Kirti, et de deux nonnes des environs, dans la province du Sichuan, ont provoqué une réaction démesurée : en novembre 2011, cela faisait en effet plus de huit mois que le monastère était isolé du monde, les deux mille moines du monastère étant littéralement mis en état de siège par 30.000 hommes de la police armée. Le Président du Conseil Européen, le Président des Etats-Unis ont notamment demandé à l’Etat chinois d’entamer un dialogue avec la population tibétaine pour sortir de cette impasse, de revoir sa politique concernant la liberté religieuse et culturelle. Pour le moment, rien n’y fait : la seule réponse du pouvoir chinois reste la violence. Et le reste du monde est impuissant à l’endiguer.

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